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Affectation et transfert d’un prisonnier

Affectation et transfert des détenus

(CPP : Code de Procédure Pénale)

Mise en ligne : 4 avril 2002

Dernière modification : 3 janvier 2010

Texte de l'article :

1 - QU’EST-CE QUE LA PROCEDURE D’ORIENTATION ?

Avant de décider dans quel établissement le détenu condamné doit effectuer sa peine, une procédure d’orientation est mise en œuvre. Elle consiste à réunir les informations nécessaires pour prendre la décision d’affectation : éléments relatifs à la personnalité du condamné, ses antécédents, sa catégorie pénale, ses aptitudes, son état de santé physique et mentale, ses possibilités de réinsertion....(art. D.74 du CPP). Tous ces éléments sont réunis sous la responsabilité du directeur de l’établissement pénitentiaire, au moyen d’un dossier d’orientation constitué à l’aide des renseignements fournis par l’autorité judiciaire et l’administration pénitentiaire. La procédure d’orientation peut aussi être complété par un passage au Centre National d’Observation(CNO).

1-1 / Quels sont les condamnés soumis à la procédure d’orientation ?
La procédure d’orientation est obligatoire pour les condamnés de plus de 18 ans dont le temps d’incarcération restant à subir est supérieur à un an et pour les mineurs dont le temps d’incarcération à effectuer est de plus de trois mois (art. D.75 du CPP). Pour calculer la durée de peine qui reste à subir, il ne faut pas prendre en compte le reliquat de peine tel qu’il est habituellement défini (durée de la peine restant à effectuer le jour où la condamnation devient définitive). Il faut se référer au temps d’incarcération restant à subir après imputation des réductions de peine éventuellement accordées lors de la première commission de l’application des peines qui a suivi la condamnation définitive. Pour les condamnés ayant subi le début de leur incarcération sous le régime de la détention provisoire, la commission de l’application des peines doit se réunir dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive (art.721 du CPP). Pour les condamnés n’ayant pas subi de détention provisoire, le temps d’incarcération à effectuer doit être calculé à partir du jour de l’écrou. L’orientation est facultative dans le autres cas. Pour les condamnés ayant à subir un temps d’incarcération inférieur ou égal à un an pour les majeurs, et à trois mois pour les mineurs, le chef d’établissement peut décider de constituer un dossier d’orientation, quand il estime que le profil particulier du condamné (personnalité, projet de réinsertion...) nécessite une orientation particulière (art.D.76 du CPP).

1-2 / Comment est élaboré le dossier d’orientation ?
Le dossier d’orientation est constitué sous la responsabilité du chef d’établissement chaque fois qu’une orientation est envisagée, que la procédure soit obligatoire ou facultative. Ce dossier comprend l’imprimé " MA 700-96 " et une série de pièces obligatoires.

L’imprimé " MA 700-96 "
Ce document est élaboré avec la participation des personnes qui ont eu à connaître le détenu pendant son incarcération dans la maison d’arrêt. Il fait donc état des avis ou propositions du service socio-éducatif, du juge de l’application des peines, du chef d’établissement et du juge des enfants si le condamné est mineur. Le service médical fournit pour sa part les éléments qui impliquent des conditions de prise en charge sanitaire particulières. Pour les mineurs, l’avis du service qui assure leur suivi éducatif peut être demandé .

 

Les pièces obligatoires

Les pièces constituant tout dossier d’orientation sont (art. D.77 du CPP)  :
- les renseignements relatifs à la situation pénale et pénitentiaire du condamné
- l’extrait de jugement ou d’arrêt
- la notice individuelle : renseignements sur l’état-civil, la profession, la situation de famille, les moyens d’existence, le degré d’instruction, la conduite habituelle, la moralité et les antécédents du condamné (art.D.158 du CPP).
- La décision sur les intérêts civils - La fiche psychotechnique du surveillant orienteur

Lorsque le reliquat de peine est supérieur ou égal à deux ans, et pour les mineurs à six mois, ce dossier comprend également les pièces suivantes :
- la copie du rapport de l’enquête ou des enquêtes sur la personnalité, la situation matérielle, familiale ou sociale de l’intéressé
- la copie du rapport de l’examen ou des examens médicaux, psychiatriques ou médico-psychologiques auxquels il aurait été éventuellement procédé en vertu d’une décision judiciaire
- la copie du réquisitoire définitif et de la décision de condamnation
- s’il y a lieu, l’avis du président de la juridiction qui a prononcé la condamnation ainsi que celui du représentant du ministère public.

 

L’enquête
Le ministre de la justice ou le directeur régional des services pénitentiaires peuvent demander une enquête au service socio-éducatif de l’établissement pénitentiaire à propos de la situation familiale ou sociale d’un détenu, afin de compléter le dossier d’orientation (art.D.79 du CPP). L’utilité de l’enquête est d’obtenir, dans le dossier du détenu des informations sur sa situation personnelle, afin de savoir s’il faut en tenir compte pour l’affectation de détenu : a-t-il une famille qui le soutient, celle-ci a-t-elle des revenus licites, est-elle impliquée dans le délit de personne détenue ?

1-3 / Comment le dossier d’orientation est-il utilisé ?
Une fois le dossier constitué, il est transmis dans un délai de trois mois à compter de la condamnation définitive au directeur régional des services pénitentiaires.

1) Lorsque le dossier relève de sa compétence, le directeur régional des services pénitentiaires peut décider (art.D.81 du CPP) :
- soit de délivrer un ordre de transfèrement à destination d’un centre de détention à vocation régionale ou d’une maison d’arrêt de sa circonscription
- soit du maintien de l’intéressé dans l’établissement où il se trouve
- soit de sa mise à la disposition d’un autre directeur régional après accord de ce dernier.
Le ministre de la justice est compétent en cas de désaccord entre les directeurs régionaux.

2) Lorsque le dossier d’orientation ne relève pas de sa compétence, le directeur régional le communique assorti de son avis à la direction de l’administration pénitentiaire dans un délai d’un mois.
Le ministre de la justice peut alors décider (art. D.81-1 du CPP) :
- soit d’envoyer le condamné au centre national d’observation
- soit de délivrer un ordre de transfèrement du condamné à destination d’un établissement pour peine ou d’une maison d’arrêt qui paraît le mieux adapté à sa situation
- soit du maintien de l’intéressé à l’établissement où il se trouve (très rare)
- soit de sa mise à la disposition d’un directeur régional (le directeur régional décidera de l’affectation dans un établissement de son ressort).

1-4 /Qu’est-ce que le Centre National d’Observation ?
Les condamnés dont les reliquat de peine est égal ou supérieur à 10 ans au moment où leur condamnation est devenue définitive doivent obligatoirement faire l’objet d’un passage au CNO en vue de leur affectation. Le passage au CNO peut être exceptionnellement décidé pour des condamnés dont le reliquat de peine est inférieur, si une observation approfondie s’avère nécessaire à la décision d’affectation. l’observation au CNO dure en moyenne six semaines. Les détenus sont placés en régime cellulaire individuel et subissent une série dÎexamens et de tests de nature médicale et psychologique. Le personnel pénitentiaire pratique, en outre, une observation personnelle des détenus. Un bilan est effectué à l’issue du séjour. Le CNO fait une proposition d’affectation au ministère de la justice (art. D.81-2 du CPP).

 

2 - COMMENT EST PRISE LA DECISION D’AFFECTATION DANS UN ETABLISSEMENT PENITENTIAIRE ?

L’affectation consiste à déterminer sur la base des éléments issus de la procédure d’orientation dans quel établissement le condamné doit exécuter sa peine (art.D.74 du CPP). La compétence est partagée entre le directeur régional de l’administration pénitentiaire et le ministre de la justice. Les décisions d’affectation concernent uniquement les personnes condamnées. Les prévenus (détenus non jugés définitivement) sont obligatoirement incarcérés dans la maison d’arrêt qui dépend de la juridiction en charge de leur affaire (art.714 et D.53 du CPP).

2-1 / Quelles décisions d’affectation relèvent du directeur régional ?
Le directeur régional des services pénitentiaires est compétent pour l’affectation des condamnés écroués dans sa région qui répondent aux critères de l’exécution d’une peine dans les centres de détention à vocation régionale (art. 717 du CPP), à savoir :
-les condamnés à une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont la durée totale n’excède pas 5 ans - les condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale est inférieure à 7 ans si la durée de l’incarcération qui reste à subir au moment où la dernière condamnation devient définitive est inférieure à 5 ans. La compétence du directeur régional est par principe limitée aux personnes incarcérées dans un établissement de son ressort et pour leur affectation dans les établissements pénitentiaires de sa région, à l’exception des maisons centrales et des centres de détention à vocation nationale, pour lesquels l’administration centrale (ministère de la justice) a une compétence exclusive en matière d’affectation.
Toutefois, il existe des exceptions à ce principe de la compétence territoriale des directeurs régionaux  :
1) Une procédure d’affectation interrégionale ou " droit de tirage " est prévue pour équilibrer l’occupation des différents centres de détention régionaux :certains directeurs régionaux désignés par l’administration centrale ont compétence pour l’affectation des condamnés incarcérés dans leurs régions vers des centres de détention régionaux situés en dehors de leur région.

2) une procédure de " mise à disposition interrégionale " permet à un directeur régional de mettre un condamné qui demande un rapprochement familial à la disposition d’un autre directeur régional, qui peut l’affecter dans un établissement relevant de sa compétence. Cette procédure d’affectation peut être utilisée par tout directeur régional sans désignation préalable de l’administration centrale. Par ailleurs, le directeur régional peut aussi déléguer une partie de sa compétence aux directeurs des établissements pénitentiaires composés d’un quartier maison d’arrêt et d’un quartier centre de détention régional pour l’affectation des condamnés qui y sont détenus et auxquels il reste à subir une incarcération inférieure à deux ans (art. D.80 du CPP). Il s’agit de conférer le pouvoir d’affectation au chef d’établissement pour des condamnés qui ne nécessitent pas un changement d’établissement, mais juste un passage du quartier maison d’arrêt au quartier centre de détention d’un même établissement pénitentiaire dans un autre centre de détention régional que celui dont il a la responsabilité.

2-2 / Quelles décisions d’affectation relèvent du ministre de la justice ?
Le ministre de la justice est seul compétent pour les décisions d’affectation en maison centrale ou en centre de détention à vocation nationale (art.D.80 du CP). Mais, il dispose aussi d’une compétence d’affectation dans tout établissement pénitentiaire du territoire national. Il dispose ainsi d’une compétence subsidiaire à celle du directeur régional pour les affectations en centre de détention à vocation régionale, notamment quand la décision d’affectation appropriée excède la compétence territoriale du directeur régional.

2-3 / Selon quels critères s’effectue le choix de la catégorie d’établissement : maison d’arrêt, centre de détention, maison centrale ?
Pour définir la catégorie d’établissement vers laquelle le condamné est dirigé, le premier critère est celui de la durée de la peine :
- les condamnés auxquels il reste à subir une peine inférieure ou égale à 1 an au moment où la condamnation devient définitive peuvent " à titre exceptionnel " être maintenus en maison d’arrêt (art.717 du CPP). Ils ne font donc pas l’objet d’une procédure d’affectation. En théorie, ils doivent être détenus dans un quartier distinct de celui des prévenus (art.D.59 du CPP). Cependant, cette règle n’est pas toujours appliquée et des condamnés auxquels il reste plus d’un an à purger peuvent être maintenus en maison d’arrêt.
- les autres condamnés doivent, en principe, quitter la maison d’arrêt pour être affectés dans un établissement pou peine, qui reçoit les condamnés définitifs :
1) les condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale est supérieure à cinq ans effectuent leur peine dans un centre de détention à vocation nationale ou une maison centrale (art.D.71 du CPP).
2) les condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale n’excède pas cinq ans effectuent leur peine dans un centre de détention à vocation régionale. Ces centres peuvent recevoir également les condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale est inférieure à sept ans, si la durée de l’incarcération qui reste à subir au moment où leur dernière condamnation est devenue définitive est inférieure à cinq ans (art.D.72 du CPP).
3) les condamnés qui font l’objet d’une mesure de semi-liberté ou d’un placement à l’extérieur sans surveillance sont placés dans des centres ou quartiers de semi-liberté (art.D.70 du CPP).

D’autres critères sont pris en compte dans le choix de la catégorie d’établissement
Les centres de détention comportent un régime principalement axé sur la réinsertion sociale des condamnés (art.D.70 du CPP). Les maisons centrales comportent une organisation et un régime de sécurité plus stricts ; Cependant, les possibilités de réinsertion sociale doivent aussi y être préservées et développées. Le choix ente ces deux types d’établissement est fait à la lecture de l’ensemble des avis portés sur le dossier d’orientation.

2-4 / Selon quels critères s’effectue le choix de l’établissement  ?
L’article 718 du code de procédure pénale prévoit quatre critères guidant ce choix : la catégorie pénale, l’âge, l’état de santé et la personnalité du détenu.
- la catégorie pénale correspond aux différentes classifications pénales : délits et crimes, primaires et récidivistes.
- l’âge intervient dans le choix de l’établissement en raison de la nécessité de regrouper les mineurs et les jeunes majeurs (moins de 21 ans) qui font l’objet d’un régime particulier et individualisé dans des quartiers distincts des adultes.
- L’état de santé physique et mental est à prendre en compte si des traitements particuliers sont nécessaires , si la présence d’un service médico-psychiatrique (SMPR) dans l’établissement est indispensable.
- La personnalité est prise en compte dans ses aspects de problèmes psychologiques, de risques pour la sécurité et de type de délinquance.

Par ailleurs, les condamnés pour meurtres ou assassinat d’un mineur de moins de quinze ans précédé ou accompagné d’un viol, de tortures ou d’actes de barbarie " exécutent leur peine dans des établissements pénitentiaires permettant d’assurer un suivi médical et psychologique adapté " (art.718 du CPP), à savoir en général ceux qui disposent d’un SMPR (Service Médico-Psychiatrique) ou ceux qui accueillent spécifiquement des délinquants sexuels (comme les centres de détention de Mauzac et Casabianda). Cette énumération n’est pas limitative, d’autres critères sont pris en compte : le sexe, les antécédents, les aptitudes, les possibilités de réinsertion sociale (art.D.74 du CPP). L’administration opère également dans certains cas une politique de dispersion ou de regroupement de certaines catégories de détenus en fonction du motif de la condamnation (par exemple, les détenus pour affaires de mœurs, les étrangers sous le coup d’une mesure d’expulsion, ou encore les condamnés pour affaire de terrorisme). Enfin , le " projet " du condamné peut être pris en considération (travail, formation, rétablissement ou maintien des liens familiaux...).

2-5 / A quel moment la décision d’affectation est-elle prise ?
La décision d’affectation est en principe prise entre trois et six mois après la condamnation définitive, quand toutes les voies de recours sont épuisées ou que les délais pour ces voies de recours sont dépassés. Toute décision d’affectation prise par le directeur régional ou le ministère de la justice doit être motivé, en indiquant les éléments qui ont présidé au choix de l’établissement de destination (projet d’exécution de peine, rapprochement familial, possibilité de réinsertion...).

 

3 - DANS QUELLES CONDITIONS INTERVIENNENT LES CHANGEMENTS D’AFFECTATION ?

3-1 / Qui peut faire une demande de changement d’affectation ?
L’affectation peut être modifiée soit à la demande du condamné, soit à la demande du chef d’établissement dans lequel il exécute sa peine. La demande de changement d’affectation ne peut intervenir que si un fait ou un élément d’appréciation nouveau le justifie(art.D.82 du CPP).

La demande du condamné
A tout moment de l’exécution de sa peine, le condamné peut demander un changement d’affectation. Sa demande peut être motivée notamment par un rapprochement familial, une perspective de réinsertion ou une volonté de changer de régime de détention. Le détenu doit formuler sa demande par écrit et indiquer les raisons pour lesquelles il souhaite changer d’établissement (volonté de suivre une formation qui n’est dispensée que dans un établissement, demande de se rapprocher de sa famille qui a dû déménager.. .). Il doit adresser ce courrier au directeur de l’établissement pénitentiaire qui constitue obligatoirement un dossier de changement d’affectation, même si la requête lui paraît manquer de fondements (art. D.82-1 du CPP). Le chef d’établissement transmet la demande de changement d’affectation du détenu à la direction régionale des services pénitentiaires.

La demande du chef d’établissement
Le chef d’établissement peut solliciter de l’autorité compétente le changement d’affectation d’un condamné si son maintien à l’établissement se révèle incompatible avec le régime de détention (pour les centres de détention), le bon ordre de l’établissement ou l’intérêt du détenu (art. D.97 du CPP). Dans toute la mesure du possible, le directeur de l’établissement doit tenir compte en effectuant sa demande, de la situation familiale du détenu et des formations engagées dans cette prison.

3-2 / Qui prend la décision en cas de changement d’affectation ?
La décision de changement d’affectation appartient à l’autorité qui a décidé de l’affectation initiale, à l’exception du cas où le condamné a été mis à la disposition d’un directeur régional par le ministre de la justice ou un autre directeur régional (art.D.82 du CPP). Le changement d’affectation est décidé, sauf urgence, après les avis du juge de l’application des peines et du procureur de la République du lieu de détention (art.82-1 du CPP). Une enquête peut être réalisée sur la situation familiale ou sociale du condamné à la demande du ministre de la justice, du directeur régional ou du chef d’établissement (art.D.82-1 du CPP).
Lorsque la décision doit être prise par le directeur régional, celui-ci peut décider (art.D.82-2 du CPP) :
- soit de délivrer un ordre de transfèrement à destination d’un centre de détention à vocation régionale ou d’une maison d’arrêt de sa circonscription
- soit du maintien de la personne dans l’établissement où elle se trouve Lorsque la décision incombe au ministre de la justice, il peut (art.D.82-3 du CPP) :
- soit envoyer le condamné au CNO
- soit délivrer un ordre de transfèrement du condamné vers un autre établissement
- soit décider de la mise à disposition du condamné à un directeur régional, qui lui-même prendra une décision d’affectation dans sa région.
Indépendamment de toute demande de changement d’affectation , le ministre de la justice peut charger le centre national d’observation d’effectuer un bilan d’évolution de la personnalité du condamné dans la perspective d’une libération conditionnelle, d’une meilleure individualisation du régime de détention ou d’exécution de la peine (art D.82-4 du CPP).

 

4 - COMMENT LES TRANSFERTS SONT-ILS EFFECTUES ?

Suite à toute décision d’affectation, intervient une décision de transfèrement. Le transfèrement consiste alors à escorter le détenu jusqu’à son établissement d’affectation. En dehors de ce cas, d’autres mesures de transfèrement peuvent être prises, qui ne résultent pas d’une procédure d’orientation.

4-1 / La translation judiciaire ou le cas particulier du prévenu
L’autorité judiciaire en charge d’une affaire concernant un prévenu incarcéré peut demander sa " translation judiciaire ". Il s’agit d’un transfert momentané pour les besoins de l’instruction. Mais le prévenu est ensuite réintégré dans l’établissement dont il a été extrait (art.D.57, D.297 et suivants du CPP). Cette opération peut concerner une personne détenue uniquement à des fins de prévention, mais aussi un détenu condamné pour une affaire et prévenu pour une autre. Le transfert est opéré par les services de police ou de gendarmerie. La réintégration du prévenu est confiée aux soins du Parquet à l’initiative duquel le transfert a eu lieu. Si la translation judiciaire concerne un condamné (qui comparaît pour une autre affaire ou à titre de témoin), la réintégration éventuelle dans l’établissement d’origine relève de l’administration pénitentiaire. En dehors de ce cas, les prévenus ne sont généralement pas transférés, et en tout cas jamais sans l’accord du juge

saisi du dossier, puisqu’ils sont obligatoirement incarcérés dans la maison d’arrêt qui dépend de la juridiction en charge de leur affaire.

4-2 / Quels sont les cas de transfert en dehors de la procédure d’orientation ?

1) Les opérations de désencombrement
Des transferts peuvent être décidés en raison de la suroccupation de certains établissements (maisons d’arrêt principalement). Théoriquement, ces transferts doivent être guidés par le même souci d’individualisation qui prévaut à toute affectation et se fonder, autant que possible, sur le volontariat des détenus qui reçoivent des visites fréquentes. Sauf urgence particulière, les transferts de détenus en cours de scolarité ou de formation ne doivent en aucun cas intervenir avant la fin de l’année scolaire ou le terme du stage. En pratique, ces principes sont rarement respectés et les transferts en désencombrements interviennent le plus souvent dans l’urgence et sans tenir compte de la situation personnelle de détenus.

2) Les autres motifs de transferts
L Îadministration centrale peut demander un transfert pour tout motif. En pratique, elle intervient pour le maintien de l’ordre et de la sécurité (suite à des émeutes par exemple), pour lutter contre la surpopulation ou dans l’intérêt du détenu. Les directions régionales peuvent ordonner un transfert pou remédier à l’encombrement d’un établissement, pour une meilleure répartition des détenus au regard du travail pénitentiaire, pour envoyer un détenu dans un établissement plus sûr quand le détenu est jugé dangereux, pour envoyer un détenu à l’hôpital pénitentiaire de Fresnes...

4-3 / A qui appartiennent ces décisions de transfert ?
a) Le ministre de la justice dispose d’une compétence exclusive pour :
- les transferts d’une région pénitentiaire à une autre
- les transferts vers ou à partir d’une maison centrale ou d’un centre de détention à vocation nationale (art.D300 du CPP)
b) Le directeur régional peut ordonner tous les transfèrements individuels ou collectifs qu’il estime nécessaires à l’intérieur de sa région et concernant les condamnés relevant de sa compétence d’affectation, les détenus soumis à la contrainte par corps et les condamnés mis à sa disposition (art.D.301 du CPP). Il est enfin compétent pour ordonner les transfèrements individuels à l’intérieur de sa région quand ils permettent à un détenu ayant des problèmes de santé d’être pris en charge dans de meilleures conditions (art.D.360 du CPP).

4-4 / Tout détenu peut-il être transféré ?
Il existe une situation dans laquelle un transfert est impossible : quand un détenu doit être tenu à la disposition de la juridiction du ressort dans lequel il se trouve, soit parce qu’il fait l’objet de poursuites, soit parce qu’il est susceptible d’être entendu comme témoin (art.D.302 du CPP). Par ailleurs, un détenu malade peut être jugé non transportable par un médecin habilité ou autorisé à intervenir dans l’établissement. Dans ce cas, le transfert ne pourra pas avoir lieu. Cette décision a un caractère impératif, le chef d’établissement doit s’y conformer sans le moindre retard (art. D.292 du CPP). Enfin les détenus de nationalité étrangère faisant l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire, et dont la peine restant à subir est inférieure à six mois, ne peuvent faire l’objet d’aucun transfert. Il s’agit du délai nécessaire au ministère de l’intérieur pour assurer la mise à exécution de la mesure d’éloignement.

4-5 / Le détenu est-il informé de son transfert et de sa date  ?
Généralement non, pour des raisons tenant à la sécurité pendant le transfert. L’exécution des transferts doit être préparée et poursuivie avec la plus grande discrétion quant à la date et à l’identité des détenus concernés, le mode de transport, l’itinéraire et le lieu de destination (art.D.296 du CPP). Une circulaire du 26/01/1983 prévoit cependant que le détenu pourra prévenir sa famille par courrier la veille du transfert. En pratique, les détenus sont exceptionnellement informés de leur destination, mais pas de la date exacte du transfert, quand l’administration n’a pas à redouter d’incident de leur part, c’est-à-dire quand ils n’ont aucun antécédent disciplinaire, qu’ils n’ont jamais fait de tentative d’évasion et que leur infraction pénale ne laisse pas craindre de risques. Dès que le détenu transféré est arrivé à destination, sa famille ou les personnes autorisées de façon permanente à communiquer avec lui, en sont informées (art.D.296 du CPP). En pratique, c’est parfois le travailleur social qui téléphone à la famille pour la prévenir. Mais le plus souvent, le détenu informe lui-même sa famille par courrier. Il peut arriver, en raison de lenteurs de l’acheminement du courrier, que la famille se rende pour une visite à l’établissement d’origine alors que le détenu n’y est plus.

4-6 / Comment se déroule le transfert  ?
L’autorité à l’origine de l’ordre de transfèrement est chargée de son exécution. Le service central des transfèrements de l’administration pénitentiaire est chargé de l’exécution des décisions de transfèrement prises par le ministère de la justice (art.D.304 du CPP). Les transferts résultant de la décision du directeur régional sont réalisés par les services de la direction régionale (art.D.305 du CPP). Cependant, la même charge incombe au directeur régional pour un transfert ordonné par l’administration centrale entre deux établissements pénitentiaires de sa région. L’autorité à laquelle incombe l’organisation du transfert décide du moyen de transport et de l’itinéraire, compte tenu de l’importance du convoi, du caractère dangereux du détenu, de la distance à parcourir, de l’urgence de l’opération et de l’état de santé du détenu (art. D.306 du CPP). Elle détermine aussi les moyens de surveillance à mettre en œuvre, notamment l’importance de l’escorte. Celle-ci est composée de membres du personnel de surveillance qui peuvent être accompagnés de membres de la gendarmerie nationale si nécessaire (art.D.308 du CPP). Par ailleurs, toutes les précautions doivent être prises pour assurer aux détenus transportés des conditions suffisantes de confort et d’hygiène (art. D.306 du CPP). Cette disposition implique en pratique de nourrir le détenu, lui donner à boire et lui permettre d’accomplir ses besoins naturels. Une circulaire du 10/03/1982 prévoit que les détenus transférés sont autorisés à conserver avec eux quelques objets utiles comme des cigarettes, allumettes... Quelle que soit leur destination, les détenus transférés peuvent faire un arrêt, prolongé ou non, à l’établissement pénitentiaire de Fresnes. Il n’est pas rare que l’administration opère un certain nombre de regroupements afin de limiter les frais de transport, qui sont à sa charge (art.D.307 du CPP). Pour cette raison, un transfert peut être retardé. Le chef de l’établissement remet au chef de l’escorte les pièces judiciaires, le dossier individuel des détenus, ainsi que leur paquetage.

4-7 / Que deviennent les affaires personnelles du détenu ?
Les objets appartenant au détenu sont remis à l’agent responsable de l’escorte (art. D.340 du CPP) et doivent être si possible transférés avec le détenu. Les bagages comprennent à la fois les objets personnels des détenus et ceux déposés au greffe lors de l’entrée en prison. Il n’y a plus de limitation de poids à 30 kilos, mais une diminution de volume à deux cartons calibrés mis à la disposition des détenus. En outre, les détenus sont invités au moment de leur incarcération à se défaire des objets volumineux en leur possession (art. D.337 du CPP). Il doit être laissé au détenu le temps de réunir ses affaires personnelles. L’inventaire des bagages doit être établi en présence du détenu est contresigné par lui avant le départ. Les colis trop lourds ou volumineux doivent être expédiés aux frais du détenu, en général par la SERNAM (à partir de 350F selon le poids) vers sa nouvelle destination, ou sont remis à un tiers que le détenu désigne (art. D.340 du CPP). Toutefois, la circulaire du 10/03/1982 prévoit que l’administration doit prendre en charge ces frais pour les détenus ne disposant pas de ressources suffisantes ou justifiant de charges familiales, scolaires ou professionnelles. Le détenu doit faire une demande d’acheminement une fois arrivé dans le nouvel établissement. Les délais de réception peuvent être particulièrement longs (15 jours à deux mois). En cas d’absence de réception, il faut écrire à l’établissement d’origine pour savoir si le colis est parti (obtenir à la SERNAM pour savoir pourquoi il n’est pas arrivé. Lorsqu’un détenu est transféré pour faire cesser un trouble au sein d’un établissement (" transferts disciplinaires "), le départ est généralement inopiné et le détenu n’a pas forcément le temps d’emballer toutes ses affaires. La circulaire prévoit que les objets de première nécessité doivent tout de même accompagner le détenu et que les bagages qui n’ont pas pu le suivre le jour même doivent être envoyés , au plus tard le lendemain, aux frais de l’administration pénitentiaire. Pour ce qui est de l’argent dont disposent les détenus sur leur compte, il doit être transmis par virement postal au nouvel établissement. Il ne leur est pas remis directement.

4-8 / Quelles sont les mesures de sécurité prévues pendant le transfert ?
Avant de quitter l’établissement, le détenu subit une fouille intégrale. Au cours du transfert, toutes précautions doivent être prises pour éviter au détenu de communiquer avec qui que ce soit (art.D.295 du CPP). Les précautions utiles doivent être prises pour soustraire le détenu transféré à la curiosité ou à l’hostilité publique, ainsi que d’éviter toute publicité. Concrètement, cela se traduit par le fait d’éviter le train comme moyen de transport. Il appartient au directeur de l’établissement d’origine d’attirer l’attention du chef d’escorte et de lui donner tous les renseignements nécessaires sur un détenu qui lui paraît dangereux, afin qu’il soit particulièrement surveillé (art.D.294 du CPP). Les détenus peuvent être soumis, sous la responsabilité du chef d’escorte, au port des menottes ou des entraves (art.D.294 du CPP) par mesure de précaution contre les évasions ou lorsque les circonstances ne permettent pas d’assurer efficacement leur garde d’une autre manière (art.D.283-4 du CPP). Les conditions d’utilisation des menottes ou des entraves sont cependant limitées par l’article 803 du CPP aux seuls cas où le détenu est considéré comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, ou comme susceptible de prendre la fuite. Malgré ces dispositions, le port des menottes est utilisé de façon systématique par l’administration pénitentiaire en cas de transfert ou d’extraction.

4-9 / Quels sont les recours dont dispose un détenu opposé au transfert ou à qui on le refuse ?
Les recours concernant les décisions de transfèrements des détenus sont aujourd’hui très incertains. Les transferts sont considérés comme des " mesures d’ordre intérieur " par la jurisprudence et non comme des actes administratifs faisant grief (arrêt Kanayakis du conseil d’Etat du 8/12/1967 et tribunal administratif de Strasbourg, 20/02/1998, Rizzuti). Ils ne peuvent donc pas faire l’objet de recours devant le juge administratif. Cependant, les détenus peuvent continuer à former des recours devant le tribunal administratif pour tenter d’obtenir un changement de jurisprudence. Par ailleurs, le détenu peut adresser des plaintes ou réclamations aux autorités judiciaires et administratives. Il faut savoir que ces démarches aboutissent rarement, ce qui n’empêche pas de les tenter.
1) Chaque détenu peut (théoriquement) demander à être entendu par les magistrats et fonctionnaires chargés de l’inspection ou de la visite de l’établissement hors de la présence de tout membre du personnel de la prison (art.D.259 du CPP).
2) La lettre aux autorités administratives ou judiciaires (art.D.262 du CPP). La liste de ces autorités est fixée par le ministère de la justice. Les lettres leur sont adressées sous pli fermé et leur envoi ne doit subir aucun retard. Cependant, ces courriers ne doivent pas être l’occasion de formuler des outrages, menaces ou imputations calomnieuse, ni, par leur multiplication, constituer des réclamations injustifiées (art.D.249 du CPP). Rien ne contraint les autorités sollicitées à donner suite à la demande.
3) Les requêtes ou plaintes au chef d’établissement (art. D.259 du CPP). Pour être entendu, le, le détenu doit invoquer un " motif suffisant ", condition appréciée souverainement par le directeur. D’où la nécessaire attention que le détenu doit porter au contenu et à la forme de la lettre qu’il adresse. Il est important de motiver sa requête en donnant tous les éléments qui démontrent le préjudice causé par le transfert effectué ou envisagé. Le chef de l’établissement n’a aucune obligation de tenir compte de cette démarche.
4) Le recours hiérarchique (art.D.260 du CPP) Il s’agit ici pour le détenu de s’adresser par écrit à l’autorité supérieure à celle qui a pris la décision de transfert contestée. Si la décision a été prise par la direction régionale, il faut s’adresser à l’administration centrale. Si l’ordre de transfert émane de l’administration centrale, il faut s’adresser directement au directeur de l’administration pénitentiaire ou au ministre de la justice. Le détenu n’aura aucune assurance de voir son recours aboutir. En attendant une éventuelle réponse, la décision sera appliquée.

5 - COMMENT LES AFFECTATIONS EN CELLULE A L’INTERIEUR DE L’ETABLISSEMENT SONT-ELLES OPEREES ?

Le choix des détenus à placer en commun et leur répartition à l’intérieur de chaque maison d’arrêt incombent personnellement au chef de l’établissement (art.D.91 du CPP). Dans toutes les catégories d’établissements, l’emprisonnement individuel (un détenu par cellule) est la règle (art.D.83 et D.95) : de nuit comme de jour en maison d’arrêt, de nuit en établissement pour peine. Le code de procédure pénale prévoit cependant que l’administration pénitentiaire peut y déroger " à titre temporaire " en maison d’arrêt (art.D.84). En pratique, elle y déroge à titre permanent, pour des raisons d’encombrement.

5-1 / Quelles catégories de détenus doivent être séparés ?
- L’incarcération des hommes et des femmes dans es établissements ou quartiers distincts est obligatoire (art. D.248 du CPP). Dans un même établissement, toutes les dispositions doivent être prises pour qu’il ne puisse y avoir aucune communication entre le quartier des hommes et celui des femmes.
- Les jeunes adultes, c’est-à-dire les détenus âgés de moins de 21 ans, doivent être séparés des autres prisonniers (art.D.516 du CPP). Cet article prévoit cependant une dérogation à cette règle : si les jeunes adultes ne peuvent être incarcérés dans un quartier distinct, il est demandé qu’ils soient placés dans une autre cellule en compagnie d’autres détenus de leur âge.
- Les détenus mineurs sont incarcérés dans des établissements distincts ou des quartiers qui leur sont propres.
- Dans la mesure du possible, l’administration pénitentiaire ne doit pas placer ensemble des détenus primaires (première condamnation) et des récidivistes (art. D.85 du CPP). Là encore, cette disposition est rarement appliquée dans la pratique.
- L’administration doit enfin séparer des autres détenus les prisonniers " bénéficiant du régime spécial " (art.D.493 du CPP). Ce régime concerne les personnes poursuivies ou condamnées pour infractions de presse, sauf en cas d’outrage aux bonnes mœurs, et les personnes poursuivies ou condamnées pour atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation (art.D.490 du CPP). Sur un plan plus général, le chef d’établissement peut déterminer le placement des détenus en fonction d’un certain nombre de critères, avec pour objectif principal d’éviter tout incident en détention. Ainsi, certains établissements regroupent les détenus par ethnie, sépare les détenus homosexuels ou travestis et les détenus pour affaires de mœurs du reste de la détention afin de les protéger des agressions.

5-2 / Un détenu peut-il demander à changer de cellule ?
L’organisation de la détention au sein d’un établissement appartient au directeur de l’établissement. c’est lui qui ordonne tous les changements de cellule. Le détenu peut toujours en faire la demande, soit par écrit, soit en sollicitant une audience. Mais le directeur reste seul titulaire du pouvoir de décision et le détenu ne dispose d’aucun recours particulier contre sa décision.

5-3 / Qui sont les " détenus particulièrement surveillés " (DPS) ?
Cette catégorie particulière de détenus existe depuis 1967. Il s’agit d’un fichier constitué par l’administration pénitentiaire regroupant l’ensemble des condamnés nécessitant pour des raisons diverses une attention particulière. Les DPS regroupent les détenus inscrits au fichier du grand banditisme tenu par l’Office central de répression du banditisme ainsi que les détenus qui, selon l’appréciation de l’administration centrale, présentent des risques pour l’ordre public. Les critères pris en considération pour évaluer les risques à l’ordre public sont : la nature des faits commis, le caractère organisé ou professionnel de la délinquance, le lien avec une association de malfaiteurs, ou encore les détenus qui peuvent sembler dangereux au travers de leur comportement en détention (risques d’évasion ou d’agression). L’inscription d’un détenu comme DPS, qui n’est pas nécessairement définitive, est décidée par le directeur de l’administration pénitentiaire, sur proposition d’une commission présidée par le procureur de la République et composée d’un certain nombre d’autorités comme le juge de l’application des peines, le directeur régional et les chefs d’établissement. Ce " statut " implique pour le détenu un certain nombre de mesures de sécurité sans limite ni définition exactes : transfert ou affectation dans un établissement sécuritaire, emprisonnement dans une cellule facile à surveiller, consignes plus strictes pour la surveillance, fouilles intégrales, et contrôles plus fréquents, impossibilité de travailler au service général ou dans certains ateliers insuffisamment surveillés, privation d’activités, déplacements ou extraction évités le plus possible... L’ensemble de ces dispositions ne sont pas forcément prises, mais elles peuvent l’être. Les DPS peuvent aussi bien être affectés dans une cellule ordinaire avec d’autres détenus ou en cellule individuelle, ou encore à l’isolement. Cependant, la classification DPS n’implique pas automatiquement un placement à l’isolement.

6 - QU’EST-CE QUE LE QUARTIER D’ISOLEMENT ?

A ne pas confondre avec le quartier disciplinaire, le quartier d’isolement est un quartier prévu pour les détenus qui ne doivent pas avoir de contact avec le reste de la population carcérale. Ce quartier est spécialement aménagé pour un enferment seul en cellule, avec une surveillance constante et des déplacements uniquement au sein de ce quartier. Il est souvent situé à côté du quartier disciplinaire.

6-1 / Qui décide d’une mesure d’isolement ?
Les mesures d’isolement relèvent de l’administration pénitentiaire. Les mesures d’isolement interviennent sur décision du chef d’établissement, soit à la demande du détenu, soit par mesure de précaution ou de sécurité (art.D.283-1 du CPP). Ces mesures donnent lieu à un compte-rendu dans les plus brefs délais au directeur régional et au juge de l’application des peines ainsi qu’au rapport du chef d’établissement lors de la prochaine réunion de la commission de l’application des peines. Dans le cas des prévenus, le placement à l’isolement peut aussi être décidé suite à une interdiction de communiquer ordonnée par le juge d’instruction pour un délai de 10 jours maximum, renouvelable une fois (art.145-4 du CPP). La mise à l’isolement reste de la seule compétence du chef d’établissement lorsque sa durée n’excède pas trois mois. Au-delà de trois mois, la décision de prolongation relève du directeur régional des services pénitentiaires. Au-delà d’un an, la mesure d’isolement ne peut être prolongée que sur décision du ministre de la justice, après rapport motivé du directeur régional qui recueille préalablement l’avis du médecin et de la commission de l’application des peines. Le motif de cette décision d’isolement doit être notifié au détenu, ses explications recueillies, et les demandes de prolongation motivées.

6-2 / Quel est le régime de détention au quartier d’isolement ?
Le principal effet de l’isolement et de mettre le détenu à l’écart du reste de la population carcéral. Il ne peut plus participer aux activités qui nécessitent un contact avec les détenus non isolés (travail, offices religieux...). Mais le détenu reste soumis au régime ordinaire de détention (art.D.283-2 du CPP) : il ne peut pas être privé de cantine, de radio, de télévision, de correspondance ou de visites au parloir (à l’exception d’un isolement résultant d’une interdiction de communiquer). Enfin, le médecin doit visiter les détenus isolés au moins deux fois par semaine. Il lui appartient, chaque fois qu’il l’estime utile en fonction de l’état de santé du détenu, d’émettre un avis sur l’opportunité de mettre fin à la mesure d’isolement (D.283-1 du CPP). Les directeurs régionaux doivent en outre procéder périodiquement à un examen attentif des conditions dans lesquelles la mise à l’isolement des détenus est assurée dans chacun des établissements pénitentiaires de leur région. En pratique, certains détenus considérés comme dangereux en raison de la nature de leur infraction ou de leur comportement en détention peuvent passer plusieurs années à l’isolement.

6-3 / Est-ce qu’un recours est possible contre une mesure d’isolement ?
Pour contester une mesure d’isolement, les possibilités de recours sont très limitées. Compte tenu de la jurisprudence actuelle, les recours contentieux devant le tribunal administratif ne sont pas recevables. Il est possible de tenter malgré tout un tel recours, si le dossier est particulièrement convaincant quant aux aspects coercitifs de la mesure contestée. Le détenu peut toujours faire parvenir ses observations au juge de l’application des peines (JAP), soit directement , soit par l’intermédiaire de son avocat (art.D.283-1 du CPP). L’avocat peut intervenir à tout moment pour réclamer des explications au JAP ou aux autorités pénitentiaires. Le détenu isolé peut aussi tenter un recours gracieux auprès de l’autorité qui a pris la décision. Il dispose enfin d’un recours hiérarchique : auprès de la direction régionale des services pénitentiaires si la décision émane du chef d’établissement, auprès du ministre de la justice si la décision provient du directeur régional (art.D.260 du CPP).