Nous vous présentons, à titre d’exemple, l’ensemble des étapes suivies par un créateur pour mener à bien une activité de vente de bois au détail.
Cette expérience met en avant :
- l’identification des facteurs quantitatifs qui conditionnent la vente de bois au détail,
- la construction de l’offre de l’entreprise à partir de l’élément fixe imposé sur le marché : le prix,
- les options prises sur les variables produits, clientèle et commercialisation les actions commerciales mises en oeuvre en terme d’approche du marché,
- les objectifs de développement de clientèle après trois ans d’activité.
Nous vous transmettons également les commentaires de l’accompagnant qui a soutenu le créateur dans ses démarches.
Nous tenons à préciser que cette expérience, bien que réussie et significative sur les points précités, ne constitue pas pour autant un modèle de démarche applicable à toutes les activités de vente de détail.
VENTE DE BOIS AU DETAIL
DE L’IDEE AU PROJET DE CREATION
C’est en tant que bricoleur que le créateur apprend que la scierie proche de son domicile et dont il est client ne trouve pas de repreneur.
Directeur d’exploitation, licencié économique plusieurs fois, le créateur a déjà réfléchi aux critères de gestion d’une entreprise. Il étudie le projet de reprise dans sa globalité avec l’ancien patron -chiffre d’affaires, clientèle- et décide de s’écarter de l’activité manufacture de bois inhérente à la scierie.
Il oriente alors son projet sur une activité d’achat-revente. L’absence d’activité de négoce de bois à 25 kilomètres alentour le conforte dans sa décision de créer une entreprise et de l’implanter sur le secteur géographique dont il a analysé les besoins.
Un associé s’adjoint au projet qui prend la forme d’une SARL. L’entreprise démarre en mai 1994.
L’ETUDE DE MARCHE
Le créateur a réalisé une étude de marché “d’instinct”.
Deux paramètres lui font dire que son activité de négoce de bois est sur un créneau
porteur :
1) il y a une clientèle locale de bricoleurs
2) il est possible d’être compétitif avec les prix des grandes surfaces
La preuve :
En 1991 un magasin Bricosphère s’implante près du site de la scierie. 1994 voit l’arrivée d’un nouveau magasin Bricosphère à 30 km de distance. Les magasins Bricosphère proposent, entre autres, un espace consacré au bois.
Le créateur apprend que ce qui a justifié l’ouverture d’un second magasin sur la zone de chalandise c’est la réalisation, sur le produit bois, de trois fois l’objectif fixé en termes de CA dès la première année.
Le paramètre “clientèle” est validé la clientèle bricoleurs existe du “bricoleur étagère du week-end” au bricoleur confirmé, propriétaire d’une maison principale ou secondaire.
Plus généralement, le créateur a remonté l’information suivante les grandes surfaces spécialisées bricolage qui réalisent environ 12 MF annuels de CA font 2 à 3 MF de chiffre sur le produit bois.
Pour valider le second paramètre “Etre compétitif sur ce marché”, le créateur a pris des contacts avec des grossistes et des distributeurs pour comprendre la “base d’achat” (le volume nécessaire à la négociation), a étudié le circuit centrales d’achat-grandes surfaces et les prix publics pratiqués.
Il a ainsi pu déterminer le volume d’achat (donc de stock) qui lui permettrait de traiter directement avec des grossistes sans l’intermédiaire du distributeur, de dégager une marge brute suffisante et de proposer des prix de vente concurrentiels.
En ce qui concerne l’identification de la concurrence :
Pas de point de vente spécialisé en bois à 25 km alentour du lieu qu’il imagine être son lieu d’implantation.
Le créateur cite :
- Lapeyre et La Maison du Bois à 40 km sur la N7,
- Canault à 30 km sur la N20.
En revanche, d’autres solutions sur son rayon d’action (30 km) sont proposées sous forme de :
- grandes surfaces spécialisées en bricolage avec secteur bois => 2 magasins Bricosphère, 1 magasin Leroy Merlin
- grossistes matériaux =>Lambert, Point P Cima, etc.
- magasins proposant des meubles en bois : Ikea, la Pinède, etc.
LA CONSTRUCTION DE L’OFFRE DE L’ENTREPRISE
? L’élément fixe imposé par le marché : le prix
Les tarifs pratiqués :
Ils sont alignés sur ceux du marché de la grande distribution spécialisée bricolage. C’est la proximité du point de vente qui fait accepter des prix parfois sensiblement supérieurs à ceux de la concurrence. Le créateur se réserve toujours 5 % de marge brute.
? Les options prises sur les variables : les destinataires
Positionnement/Clientèle :
L’entreprise réalise 60 à 70 % de son chiffre d’affaires avec une clientèle de particuliers, 30 à 40 % avec des entreprises (puisque il a pu maintenir des prix similaires à ceux pratiqués par la scierie).
Adaptation à la demande et au contexte :
La clientèle de charpentiers et de maçons requiert un stock important de façon à pouvoir proposer toutes les cotes usuelles de bois de charpente. Le créateur a donc dû investir très tôt en stock pour satisfaire cette clientèle.
La clientèle de particuliers nécessite quant à elle des gammes étendues par types de produit. Le créateur propose donc, par exemple, du lambris à 43,5 F /m2, à 55 F en petites longueurs à petits noeuds, jusqu’à 85 F/m2 sans noeud. Idem pour le parquet flottant qu’on peut se procurer de 129F/m2 à 259FI m2 en l3 mm support latté.
Le produit
- bois de charpente diversifié : chevrons, bastins, madriers dans les cotes de bois les plus utilisées (de 3 m à 8 m),
- panneaux en aggloméré et en contreplaqué -> étagères, caissons, coffrages,
- bardages, lambris, tasseaux, parquets flottants -> structure bois, aménagement intérieur.
Distinction de l’offre :
Vente spécialisée et activité axée sur le service et le conseil aux particuliers.
Conseil :
- recherche de solution client au moins cher, après analyse du projet de bricolage,
- disponibilité vis à vis du client, entretiens techniques,
- démonstrations techniques de pose via cassettes vidéo.
Service :
- livraison gratuite sous 20 km,
- orientation si nécessaire vers des artisans locaux identifiés pour leurs compétences,
- possibilité de découpe de bois sur place à la demande.
Produits de qualité à prix compétitifs.
Magasin d’exposition et stock disponible sur place.
La commercialisation
La zone géographique de couverture :
Implantation sur une petite zone d’activités, à 50 km au sud de Paris. Choix du site en fonction de la clientèle repérée sur un rayon de 25 à 30 km.
L’infrastructure :
De 1994 à 1996 : location d’un bâtiment de 300 m2.
En 1996, transfert de site et changement d’infrastructure (magasin et entrepôt en bois) pour des raisons esthétiques et également économico-commerciales :
- investissement en matériaux réduit de moitié et diminution des traites,
- meilleur emplacement dans la zone d’activité (entre Champion et Bricomarché, en face de la sortie de la ZAC) avec une surface de vente et de stockage plus importante (gain de 200 m2).
L’ORGANISATION DE LA FORCE DE PROPOSITION
Approche du marché :
La clientèle se développe de bouche à oreille compte tenu de la qualité des produits et des conseils apportés. La clientèle des particuliers est sensible au rapport qualité/prix proposé.
Le créateur fait deux distributions de prospectus par an dans les boîtes à lettres via des distributeurs privés. Cette communication a pour objectif d’informer sur l’existence du magasin et sa localisation.
L’audace du créateur en matière de choix du site s’avère porteuse. Le créateur note un retour positif en termes d’affluence.
Partenariat :
Partenariat informel avec les artisans du cru : le créateur recommande volontiers à ses clients des artisans pour leur savoir-faire et se garantit ainsi de bonnes relations commerciales avec chacun, client comme artisan.
• Sa stratégie commerciale vise la fidélisation de la clientèle. En ce sens, l’accent est mis sur l’image : le magasin lui-même est en bois, la convivialité est instaurée, de très bonnes relations avec les artisans locaux sont développées.
BILAN DEPUIS LE DEBUT DE L’EXISTENCE
Evolution du marché
Le créateur a fait la découverte que son activité atteint le point mort avec le particulier, la clientèle entreprise permet quant à elle le bénéfice. Découverte en ce sens que : il avait pensé fonctionner à l’exemple d’une boulangerie pâtisserie pour laquelle c’est le pain qui paye tout. Le pain, dans son activité, étant la vente standard de bois aux entreprises. C’est l’inverse qui s’est produit. C’est la vente de bois (non standardisée) aux particuliers qui équilibre l’activité.
Il l’explique par :
1) la conjoncture économique : à situations financières difficiles correspond un investissement dans des recherches personnelles de solutions (trouver au moins cher, réaliser soi-même, etc.)
2) la zone géographique de couverture : à zone rurale correspond une clientèle de particuliers bricoleurs
Difficultés rencontrées
Le créateur confie avoir en stock pour 70 à 80 000 F de produits difficiles à écouler.
Il s’agit de produits de seconde qualité, achetés dans les débuts de l’activité.
Il reconnaît une erreur de début de parcours.
Les conseils du créateur
Réaliser une étude de marché préalable pour connaître les marchés amont et aval.
Avoir de réelles qualités de négociateur pour gérer les relations fournisseurs.
Analyser les effets de la stratégie appliquée pour tirer partie des erreurs.
Les perspectives d’évolution
Conserver la souplesse d’une petite infrastructure.
Elargir progressivement la gamme de produits.
Son objectif de clientèle aujourd’hui 80 % de particuliers pour 20 % d’entreprises c’est-à-dire maintenir le volume existant d’entreprises et développer proportionnellement le volume de particuliers de façon à ce que les 30 à 40 % d’entreprises représentent 20 % de la clientèle globale.
Les commentaires de l’accompagnant
La situation géographique du magasin d’exposition a pour particularité de se trouver sur l’axe transversal du sud Essonne entre les N7 et N20. Cette implantation a été choisie en fonction de :
- la concentration de la concurrence sur les principaux axes routiers du département (les N7 et N20 et l’A6 pour les dessertes Nord Sud, la Francilienne pour la desserte transversale Nord)
- l’absence de concurrence sur l’axe transversal Sud.
L’accompagnant avait jugé le choix du site audacieux voire risqué. Il félicite maintenant le créateur pour la réussite du challenge et lui reconnaît de grandes compétences commerciales.