Fiche action 19 D ’ Proposition de document pour évaluer le potentiel suicidaire et prévoir les actions de prévention et d’intervention
Ce document inclut des commentaires destinés à expliquer les paramètres de l’évaluation ainsi que les actions à entreprendre. Le document final pourrait, par exemple, contenir au recto l’évaluation et les actions de prévention et au verso les principes d’utilisation.
La formation à l’intervention de crise suicidaire permet une bonne utilisation d’un tel document. Sa mise en place ne peut être conseillée sans un minimum de personnes formées.
L’évaluation du potentiel suicidaire intègre trois dimensions : le risque, l’urgence et la dangerosité.
Cette évaluation se fait au cours d’un dialogue qui vise à entrer en confiance avec la personne, à identifier le facteur précipitant et à concevoir un plan d’actions pour protéger et orienter, si nécessaire.
1. Evaluation du risque suicidaire
Le risque suicidaire est la probabilité de décéder par suicide dans les 2 ans à venir. L’évaluation
se fait en fonction de la présence ou de l’absence des facteurs de risque suivants et de leur cumul. Le risque peut être évalué en degré faible, moyen et élevé. La population pénitentiaire présente un sur risque important. De ce fait, la plupart des personnes détenues ont un risque moyen ou élevé. Toutes les personnes détenues doivent bénéficier de cette évaluation. Le niveau de risque est assez stable sauf quand des événements surviennent dans la vie de la personne.
Dans ce cas l’évaluation est à renouveler. L’évaluation du risque est moins importante quand la personne est en urgence élevée. L’intervention de crise prime sur une entrevue approfondie.
Il n’est pas possible avec un tel nombre de facteurs de risque d’intensité variable de donner un seuil strict entre les trois degrés de risque. Le jugement clinique doit s’appuyer sur une bonne vision des facteurs en jeux et faire une synthèse au cas par cas.
Facteurs de risque de suicide
La liste ci-dessous comprend les facteurs connus pour la population générale et pour les personnes détenues.
Les intervenants successifs ont à entourer les facteurs identifiés. La commission de prévention du suicide doit valider ces informations et le plan de prévention à mettre en oeuvre. Une place est laissée pour inscrire un facteur de risque qui ne figurerait pas dans les listes.
Le risque est classé en degré faible, moyen ou élevé. Il n’existe pas de gradation préétablie pour classer une personne les personnes détenues selon les 3 degrés. Le jugement clinique est essentiel car il est nécessaire d’inclure les facteurs de protection. La formation nationale donne une large part à cette évaluation.
2. Evaluation de l’urgence
L’urgence est la probabilité de décéder par suicide dans les 48 heures. La progression de la crise suicidaire est évaluée selon les 9 points de repères du tableau ci-dessous : idées de suicide =>intention=>programmation.
L’évaluation de l’urgence est établie à partir d’un dialogue direct avec la personne. Elle ne peut pas se deviner. Si l’évaluation n’est pas faite, il est important de noter qu’elle reste à faire. Le plus dangereux serait de ne pas réaliser l’évaluation et de noter l’absence d’idéation suicidaire lorsque la personne n’en a pas parlé spontanément.
Une personne en urgence suicidaire doit être réévaluée périodiquement.
Un professionnel qui fait une intervention de crise peut noter son évaluation en début et en fin d’intervention selon l’exemple donné dans le tableau. Les flèches successives permettent de voir l’évolution de la crise suicidaire au fil de la trajectoire de la personne.
3. Evaluation de la dangerosité
Elle repose sur la létalité du moyen et l’accessibilité au moyen. La létalité est le nombre de décès pour 100 tentatives. S’agissant d’hommes en milieu pénitentiaire, les tentatives sont plus létales qu’en population générale.
La pendaison ou la strangulation font partie des moyens très létaux, utilisés quand aucun autre moyen n’est accessible.
Les médicaments sont peu létaux dans la mesure où il ne s’agit pas de médicaments pour une fonction vitale. Les objets coupants sont peu létaux car beaucoup de personnes interrompent leur geste et demandent des secours pour recevoir des soins.
Il est important de diminuer l’accessibilité au moyen en obtenant l’accord de la personne.
4. Identification du facteur précipitant
Il s’agit de l’événement qui a augmenté la tension et le désespoir. L’objectif de l’intervention de crise suicidaire vise à permettre un retour vers le niveau de tension avant cet événement. Il n’est pas possible de revenir à un état d’équilibre mais seulement à un état de vulnérabilité.
Le facteur précipitant peut être l’incarcération elle-même ou une de ses conséquences. Cela peut être aussi un événement non encore survenu qui menace l’avenir.
La personne doit être encouragée à dire ses émotions suscitées par cet événement. L’expression émotionnelle et leur reconnaissance sont des éléments importants de l’intervention de crise.
5. Plan de prévention et d’intervention
La liste des actions de prévention prévues et réalisées est à enregistrer. Le plan de prévention est un élément essentiel pour être simultanément et successivement ensemble autour d’une personne en difficulté. La fiabilité humaine des intervenants est essentielle car un événement, en apparence peu important, peut déstabiliser le détenu en cas de crise. Tous les événements qui peuvent prendre la signification d’un abandon, d’une perte de la face représentent un risque supplémentaire.
La liste des actions d’évaluation, de surveillance, de soins et de suivi est à décrire pour les intervenants de 1ère, 2ème et 3ème ligne avec leurs dates et/ou fréquences de réalisation.