Nous vous présentons, à titre d’exemple, l’ensemble des étapes suivies par un créateur pour mener à bien son activité de maréchalerie itinérante.
Cette expérience met en avant :
l’analyse des caractéristiques de la demande et de l’offre,
- l’identification des facteurs qualificatifs concernant la cible de l’activité de maréchalerie,
- la construction de l’offre de l’entreprise à partir de l’élément fixe imposé sur le marché : les destinataires et leur localisation,
- les options prises sur les variables produit, prix et commercialisation,
- les actions commerciales mises en oeuvre en terme d’approche du marché.
Nous vous transmettons également les commentaires de l’accompagnant qui a soutenu le créateur dans ses démarches.
Nous tenons à préciser que cette expérience, bien que réussie et significative sur les points précités, ne constitue pas pour autant un modèle de démarche applicable à toutes les activités de production artisanale.
MARECHAL FERRANT ITINERANT
DE L’IDEE AU PROJET DE CREATION
Natif de Montpellier, le créateur a suivi, sur les conseils de ses parents, une formation initiale de viticulture oenologie (BTAO).
Il exerce le métier de viticulteur et développe, à chaque fois que la saisonnalité de la viticulture le permet, des activités professionnelles liées aux chevaux. En 20 ans, il a été tour à tour garçon d’écurie, lad, palefrenier, etc. Il s’est, entre autres, peu à peu spécialisé sur les chevaux de trait avec lesquels il proposait du halage.
Il rencontre alors des difficultés à trouver des maréchaux ferrant pour ce type de chevaux et a l’idée de se former pour obtenir la qualification maréchalerie.
Après sa formation, le créateur a pu maintenir et diversifier ses activités avec les chevaux de trait en parfaite autonomie. Il a notamment proposé des promenades avec un attelage de percherons.
Il prend en 1992 un poste de palefrenier soignant (attelage et maréchalerie) chez un particulier à Fontainebleau. En 1995, il démissionne pour s’installer à son compte.
Le créateur a une motivation de toujours pour le travail en extérieur.
Quand il démissionne pour s’installer à son compte, il cherche à vivre son métier de façon autonome. Ses expériences professionnelles l’ayant amené à se déplacer très fréquemment, il accepte l’idée que l’exercice de la maréchalerie peut être envisagée de façon itinérante.
L’ETUDE DE MARCHE
Le créateur n’a pas fait d’étude de marché. Il a toujours trouvé du travail en tant que salarié et a identifié pendant ses activités professionnelles l’existence d’une demande exigeante.
? Caractéristiques de la demande :
Il sait qu’un propriétaire qui a eu un souci avec le ferrage des chevaux (fers qui ne tiennent pas ou qui blessent l’animal) est en quête d’un bon maréchal ferrant jusqu’à trouver celui qui restera son maréchal ferrant attitré.
C’est aussi la raison pour laquelle la demande n’est pas concentrée géographiquement dans la mesure ou seul le critère de compétence intervient dans le choix du maréchal ferrant.
En ce qui concerne les critères de satisfaction de la clientèle le créateur cite :
- la qualité technique du ferrage, qui tient compte de l’anatomie de l’animal, de son type d’activité, etc.,
- le rapport à l’animal, qui tient compte de la psychologie du cheval,
- la prise en charge du cheval sans obligation de présence des propriétaires,
- l’implication par rapport au bien-être du cheval ; au delà de la maréchalerie, le créateur prête attention au développement de l’animal.
? Caractéristiques de l’offre :
La concurrence est très nombreuse et va en croissant.
De plus en plus d’écoles privées forment, sur deux ans en alternance, au métier sans sélectionner les candidats sur leur connaissance des chevaux. La profession constate une arrivée massive sur le marché de jeunes maréchaux ferrant débutants qui présentent un double handicap terrain : une connaissance du cheval qui se révèle insuffisante et une préparation physique incomplète (manque d’endurance).
LA CONSTRUCTION DE L’OFFRE DE L’ENTREPRISE
Le marché est mouvant. Le créateur le définit comme un milieu de “commerçants”, toujours en recherche d’un meilleur prix à qualité égale. Le sachant, le créateur raisonne en gestionnaire. Il prend la précaution de ne pas compter trop sur les clubs hippiques pour se garantir de ne pas perdre un volume important d’interventions. Perdre un club hippique comme client signifie 20 chevaux perdus. En conséquence, le créateur cible à 90 % une clientèle de particuliers et limite à 10 % sa clientèle de clubs.
? L’élément fixe imposé par le marché : le destinataire
Après trois ans d’activité, le créateur a fidélisé sa clientèle et l’a équilibré entre :
- particuliers propriétaires de chevaux de loisirs,
- particuliers propriétaires de chevaux de course,
- clubs hippiques.
60 % des chevaux sont suivis directement chez les particuliers et 40 % dans des clubs hippiques. Un club représentant un volume de 20 chevaux.
? Les options prises sur les variables : le produit
La maréchalerie : parage (taille de la corne) et ferrage des chevaux
Le créateur exerce en tant que maréchal ferrant itinérant. Il intervient sur tout type de chevaux. Sa connaissance et sa pratique des chevaux sont des atouts supplémentaires dans l’exercice de son métier.
Les aspects techniques :
La fréquence d’intervention est relative à l’activité du cheval.
Pour les ferrures : elle est comprise entre 6 semaines et 2 mois.
Pour les parages : entre 2 et 3 mois. Sachant que le parage implique nécessairement le ferrage.
Le prix
La ferrure (changement des 4 fers) varie entre 300 et 400 F. Ce sont les tarifs courants hors région parisienne. Ce prix comprend également le parage quand il intervient.
Le déplacement n’est pas supporté par le client.
Du point de vue des tarifs, le créateur pratique ceux ayant cours sur le marché.
La commercialisation
Le créateur est installé dans le Nord près de Lille.
La moitié de sa clientèle se trouve dans ce département. L’autre moitié nécessite qu’il se déplace. Il intervient jusqu’à 400 km vers le sud.
Le créateur gère son planning de façon très rigoureuse. Il organise ses déplacements et rythme ses tournées pour proposer une disponibilité régulière en fonction de la fréquence des besoins en ferrage. Ses clients n’ont pas besoin de reprendre contact avec lui d’une intervention à une autre. Il programme lui-même sa prochaine visite en fonction de l’activité des chevaux qu’il prend en charge.
L’ORGANISATION DE LA FORCE DE PROPOSITION
Approche du marché :
Pour trouver les moyens de se faire connaître, il a testé :
- le mode mailing, en direction des clubs hippiques et des haras, sans succès,
- l’encart publicitaire dans “cheval magazine” qui draine très peu de clientèle,
- la présentation spontanée dans les clubs hippiques auprès des propriétaires et des gérants de clubs, qui semble le mode à privilégier.
Il a développé un argumentaire ; il propose sa disponibilité, son sérieux, ses compétences, ses tarifs sans jamais dénigrer la concurrence, le milieu étant très fermé.
Il a commencé sa prospection dans le Nord.
La clientèle se développe maintenant de bouche à oreille. Un propriétaire qui change de club le fait connaître dans le nouveau club qu’il rejoint.
Ces réapprovisionnements - en fers, clous, etc. - sont l’occasion d’entretenir des relations avec les vendeurs qui contribuent également à le faire connaître.
BILAN DEPUIS LE DEBUT DE L’EXISTENCE
Difficultés rencontrées
Le créateur a créé entièrement sa clientèle. La première année d’activité fut de ce point de vue difficile.
Le créateur s’est trouvé confronté à la difficulté de ‘vendre ses compétences”, en situation de face à face.
Les commentaires de l’accompagnant
Le créateur a su refuser, à bon escient, de satisfaire des demandes.
Il a su prendre le risque de choisir sa clientèle dès la première année.
L application de sa maxime -“la vie appartient aux audacieux”- lui vaut aujourd’hui de travailler pour une clientèle fidèle “de qualité”
Cette approche commerciale est rendue possible par une gestion rigoureuse des déplacements et une recherche constante d’optimisation du planning des tournées.