440 Peut-on contester une décision prise par les services de la protection sociale ?
Quel que soit son auteur (Etat, collectivité territoriale, organisme chargé d’un service public ou de sécurité sociale...), sa forme (lettre, arrêté...), ou son contenu (décision imposant une obligation ou refusant un avantage), une décision de l’administration peut être contestée. Un recours peut également être engagé si, suite à une demande formulée par un usager, celui-ci n’a pas obtenu de réponse dans un délai fixé. Dans ce cas, en effet, la demande est considérée comme rejetée. Il existe, toutefois, des cas, limitativement définis par la loi, où le silence vaut acceptation implique. C’est le cas, par exemple, de l’admission à la CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire) ou de la reconnaissance du caractère professionnel d’un accident du travail ou d’une maladie. En général, le délai accordé à l’administration pour répondre est de deux mois, mais il peut être différent dans certains cas (également limités). La CDAPH (commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées) dispose, par exemple, d’un délai de quatre mois pour prendre une décision relative à l’AAH (allocation aux adultes handicapés. A compter de la notification de la décision, ou de l’expiration du délai de réponse imparti à l’administration pour répondre, l’intéressé dispose d’un délai de deux mois pour contester la décision.
441 Quels sont les recours possibles contre une décision prise par les services de la protection sociale ?
S’il ne souhaite pas saisir directement une juridiction, l’intéressé peut s’adresser, en premier lieu, à l’administration à l’origine du litige pour lui demander de revenir sur sa décision (recours gracieux) ou saisir l’autorité hiérarchiquement supérieure (recours hiérarchique). Le recours gracieux, comme le recours hiérarchique, a pour effet de conserver le délai de deux mois pour saisir la juridiction compétente. La personne doit conserver la copie de l’ensemble des démarches qu’elle a accomplies auprès de l’administration. Aussi est-il préférable de les effectuer par voie de lettre recommandée avec accusé réception. Si l’intéressé n’obtient pas gain de cause après avoir formé un recours gracieux ou hiérarchique, il peut saisir la juridiction compétente. Avant d’engager une action devant les tribunaux, la personne doit s’assurer que sa demande n’est pas manifestement mal fondée. En effet, si elle perd son procès, la personne peut se voir condamnée à payer les frais engagés dans la procédure par la partie adverse, ou même être condamnée à une amende, si le juge estime que le recours est abusif.
442 Est-il indispensable de se faire assister par un avocat ?
Sauf devant la cour administrative d’appel et en cas de pourvoi en cassation, l’assistance d’un avocat devant les juridictions spécialisées qui interviennent dans le contentieux de la protection sociale n’est pas obligatoire. Toutefois, compte tenu du caractère parfois très technique des dossiers, il est recommandé de se faire conseiller ou assister par une personne compétente. Pour cela, l’usager peut, par exemple, s’adresser à une association oeuvrant dans le domaine en rapport avec la nature du litige (association de défense des sans-papiers, d’aide aux personnes handicapées, de chômeurs, etc.). Si l’intéressé souhaite faire un appel à un avocat, il peut bénéficier de l’aide juridictionnelle, sous réserve de répondre à certaines conditions de ressources.
443 Comment s’organise le contentieux de la protection sociale ?
Le contentieux de la protection sociale diffère selon la nature de la décision et fait intervenir de nombreuses instances et juridictions. Le contentieux général concerne les réclamations contre les décisions relatives à l’application des législations et des réglementations relatives à la sécurité sociale (paiement des cotisations, attribution des prestations, etc.). Il est soumis à des instances et juridictions - CRA et TASS - ou administratives. Les décisions d’ordre technique ou médical renvoient, quant à elles, à des contentieux spéciaux faisant intervenir d’autres instances particulières (tribunal du contentieux de l’incapacité ou procédure d’expertise indépendante). C’est également le cas du contentieux de l’aide sociale (attribution du revenu minimum d’insertion ou de l’allocation personnalisée d’autonomie) qui dispose également de juridictions spécifiques - CDAS (commission départementale d’aide sociale) et CCAS (commission centrale d’aide sociale). Enfin, le contentieux de l’assurance chômage (recours des chômeurs contre les décisions de l’ASSEDIC et de l’agence nationale pour l’emploi) a lui aussi ses règles propres (Q.424 et 425).
444 Quels sont le rôle et les compétences de la commission de recours amiable ?
Dans le contentieux de la protection sociale, la CRA est compétente en matière de litiges d’ordre administratif - c’est-à-dire ceux concernant, notamment, une affiliation, un calcul des cotisations ou un refus de versement de prestation -, à quelques exceptions près (Q.447). La CRA, qui n’est pas une juridiction, doit obligatoirement être saisie avant tout recours devant les tribunaux, dans les deux mois suivant la notification de la décision litigieuse ou à compter de l’expiration du délai imparti à la caisse pour prendre sa décision. La saisine peut se faire par lettre simple, mais il est conseillé de l’envoyer par lettre recommandée avec accusé de réception. La CRA compétente est celle instituée auprès de la caisse qui a pris la décision. Le recours peut être formé soit par l’assuré, soit par un tiers dûment mandaté. La CRA doit répondre dans un délai d’un mois à compter de la réception de la réclamation. Elle statue sur pièce, c’est-à-dire que la personne n’est pas convoquée ni entendue. En cas de réponse négative pour saisir le TASS, généralement situé dans les locaux du TGI.
445 Quels sont le rôle et les compétences du tribunal des affaires de la sécurité sociale ?
Lorsque la CRA d’une caisse de la sécurité sociale a rejeté le recours d’un assuré (par décision notifiée ou en l’absence de réponse dans un délai d’un mois suivant la réception de la demande), l’intéressé peut saisir le TASS. En principe, le tribunal compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le domicile du bénéficiaire. En général, il y a un TASS par département, installé le plus souvent au TGI. Il doit être saisi dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision de la CRA ou à compter de l’expiration du délai d’un mois suivant la saisine de la CRA. Le TASS peut être saisi par simple requête déposée à son secrétariat ou adressée à son secrétaire par lettre recommandée avec accusé de réception. Devant la TASS, la procédure est contradictoire. Autrement dit, les deux parties sont convoquées (au moins quinze jours avant l’audience) et peuvent exposer leur position. L’intéressé peur s’y faire représenter soit par son conjoint, soit par l’un de ses ascendants ou descendants en ligne directe, soit également par un salarié exerçant la même profession, ou un représentant syndical. Il peut également désigner un avocat. Lorsqu’il rend sa décision, le TASS peut ordonner l’exécution du jugement par provision (c’est-à-dire que le jugement est mis à exécution, même si une des parties a fait appel). La décision du TASS est notifiée à l’intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception.
446 Comment contester une décision du tribunal des affaires de la sécurité sociale ?
L’appel d’une décision du TASS n’est possible que lorsque le litige porte sur des sommes dont le montant est supérieur à 4.000 euros. Si la somme est inférieure ou égale, seul un pourvoi en cassation est possible, devant la Cour de cassation (chambre sociale). Si la somme est supérieure, le recours doit être formé dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision du TASS, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au secrétariat du TASS qui a rendu la décision. La déclaration est accompagnée d’une copie de la décision contestée. Cette déclaration, datée et signée, doit contenir, sous peine de nullité : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de l’appelant ; l’indication du nom et du siège social de l’organisme contre lequel l’appel est dirigé ; l’objet de la demande ; le cas échéant, les nom et adresse du représentant de l’appelant ; les références du jugement dont il est fait appel. L’appel est ensuite transmis à la cour d’appel (chambre sociale), devant laquelle l’assuré pourra défendre son dossier. Il est toutefois recommandé de se faire assister par un avocat. Les jugements du TASS rendus sur des litiges portant sur des sommes inférieures à 4.000 euros, ainsi que les décisions de la cour d’appel peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation devant la Cour de cassation (chambre sociale). Ce pourvoi doit être formé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision du TASS ou de la cour d’appel. Le recours à un avocat est obligatoire devant la Cour de cassation. Si la cour rejette le pourvoi, la décision contestée est définitive. Dans le cas contraire, l’affaire est renvoyée devant un autre TASS ou une autre cour d’appel.
447 Quels sont le rôle et les compétences du tribunal administratif ?
Dans le contentieux de la protection sociale, le tribunal administratif est compétent lorsque le contentieux n’a pas été attribué par la loi à une juridiction administrative spécialisée, comme les CDAS, ou une juridiction judiciaire, comme le TASS. Tel est le cas, notamment, des décisions relatives à l’aide à l’acquisition d’une couverture médicale complémentaire ou aux allocations chômage relevant du régime de solidarité.
448 Comment saisir le tribunal administratif ?
Tout recours devant le tribunal administratif doit être dirigé contre une décision de l’administration, qu’elle soit explicite ou implicite. Ce qui signifie qu’on ne peut pas porter plainte contre une autorité administrative, mais qu’il faut contester une décision déterminée (par exemple, le refus d’attribution d’une aide à l’acquisition d’une couverture maladie complémentaire). Le recours doit être formé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision litigieuse, ou à compter de la décision implicite de rejet (née du silence gardé par l’administration pendant plus de deux mois après réception de la demande). L’intervention d’un avocat n’est pas obligatoire, mais conseillée. Le recours doit être motivé, c’est-à-dire qu’il doit comporter les éléments de fait et de droit invoqués à l’appui de la demande. Il doit obligatoirement mentionner clairement ce qui est demandé au juge (conclusions), en général l’annulation de la décision administrative. Lorsqu’un recours gracieux ou hiérarchique a été préalablement exercé, il convient d’attaquer également la décision de rejet à laquelle ce recours a donné lieu. Le recours doit comporter le nom du requérant et de l’administration dont l’acte est mis en cause, et être signé. Il doit, en outre, être accompagné de la décision attaquée ou, s’il s’agit d’une décision implicite, être accompagné de la décision attaquée ou, s’il s’agit d’une décision implicite, de la copie de la demande faite initialement par l’intéressé. Les pièces jointes doivent être numérotées. Le recours doit être adressé au greffe du tribunal, en quatre exemplaires (l’original et trois copies).
449 Quels sont le rôle et les compétences de la cour administrative d’appel ?
La personne qui n’a pas obtenu gain de cause devant le tribunal administratif peut contester le jugement devant la cour administrative d’appel, dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Le recours doit être obligatoirement présenté par un avocat. Le requérant doit critiquer les motifs retenus par le tribunal administratif pour rejeter sa demande. C’est-à-dire qu’il doit expliquer en quoi le jugement n’est pas justifié, et non pas se limiter à recopier la requête qu’il avait présentée en première instance. La conclusion du recours (ce qui est demandé à la cour administrative d’appel) est l’annulation du jugement du tribunal administratif.
450 Quels sont le rôle et les compétences du Conseil d’Etat ?
L’arrêt de la cour administrative d’appel peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat, dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Le Conseil d’Etat ne réexamine pas les faits, mais s’assure que la cour a respecté le droit et que son arrêt n’est pas irrégulier, en particulier au regard des exigences de motivation. Le recours doit être présenté par un avocat spécialisé (avocat aux conseils).
451 Que faire en cas de litige d’ordre médical ?
Une procédure d’expertise médicale peut être mise en œuvre en cas de contestation de décision d’ordre médical de prise en charge de soins ou d’attribution d’indemnités journalières. Cela pourra être, par exemple, le cas lorsqu’il existe une différence d’appréciation sur l’état d’un malade entre le médecin traitant de ce dernier et le médecin-conseil de la CPAM (caisse primaire d’assurance maladie). L’arbitrage d’un médecin expert indépendant est alors censé dénouer la situation. L’expertise est effectuée soit à la demande de l’usager, soit à la demande de la CPAM, soit, lorsqu’une procédure est en cours devant les tribunaux, par décision de la juridiction concernée. Dans le cadre de l’assurance maladie, l’assuré dispose d’un délai d’un mois après notification de la décision contestée pour demander à la caisse d’organiser une expertise. Dans le cadre de l’assurance accidents du travail et maladies professionnelles, l’expertise peut être demandée par l’intéressé avant toute décision de la caisse, et aussi longtemps que le délai de prescription de l’indemnité (deux ans) n’est pas écoulé. La demande d’expertise doit être formulée par écrit et préciser l’objet de la contestation, ainsi que le nom du médecin traitant. Elle doit être adressée par lettre recommandée ou déposée contre récépissé au guichet de la caisse de la sécurité sociale. L’examen médical demandé doit ensuite être effectué dans les cinq jours. Les conclusions motivées de l’expert sont envoyées à l’intéressé dans les quarante-huit heures et s’imposent à l’assuré comme à la caisse. Aucune contre-expertise n’est donc possible.
452 Que faire en cas de litige relatif à une inaptitude au travail ?
Les litiges qui relèvent du contentieux technique correspondent à toutes les contestations des décisions relatives à l’état d’inaptitude au travail, au degré d’invalidité pi d’incapacité, prises par la CDAPH ou par une CPAM. La juridiction compétente est le tribunal du contentieux de l’incapacité. Dans un délai de deux mois à compter du jour où elle a été informée de la décision qu’elle conteste, la personne doit adresser une lettre recommandée avec accusé de réception au secrétariat du tribunal de son lieu de résidence, qui siège en général auprès de la DRASS (direction régionale des affaires sanitaires et sociales). Cette déclaration doit convertir, sous peine de nullité : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ; l’indication des nom et adresse de l’autorité contre laquelle la demande est formée ; l’objet de la demande ; si nécessaire, le nom et l’adresse du médecin que le demandeur désigne pour recevoir les documents médicaux ; un exposé sommaire des motifs de la demande. Il convient de joindre à la demande une copie de la décision contestée. La décision du tribunal est notifiée dans un délai de quinze jours à l’assuré.
453 Comment contester une décision du tribunal du contentieux de l’incapacité ?
L’assuré peut faire appel d’une décision du tribunal du contentieux de l’incapacité devant la CNIT (cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail), située à Amiens. Ce recours doit être formé dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision contestée. Il doit être adressé non pas à la CNIT, mais au secrétariat du tribunal du contentieux de l’incapacité qui a rendu le jugement, par une lettre recommandée avec accusé de réception. La déclaration, datée et signée, doit contenir, sous peine de nullité : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du requérant ; l’indication des nom et adresse de l’autorité contre laquelle la demande est formée ; l’objet de la demande ; la désignation du jugement dont il est fait appel ; la mention, le cas échéant, du nom et de l’adresse du représentant de l’appelant devant la cour. Le secrétariat du tribunal transmet ensuite le dossier au secrétariat général de la CNIT. Cette dernière demandera alors à l’intéressé et à l’auteur de la décision litigieuse de fournir, dans un délai de vingt jours, ses observations ou, le cas échéant, celles des personnes qu’ils ont choisi pour les assister. Le dossier peut être soumis à instruction et des expertises peuvent être pratiquées. La procédure est écrite et le recours à un avocat n’est pas obligatoire. L’aide d’un conseil, d’une association de défense des personnes handicapées peut se révéler utile. La décision de la cour peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation dans les deux mois après sa notification. Dans ce cas, l’assistance d’un avocat spécialisé est obligatoire.
454 Que faire en cas de litige suite à une décision en matière d’aide sociale ?
La CDAS (commission départementale d’aide sociale) est la juridiction spécialisée compétente en ce qui concerne le contentieux de l’aide sociale, à l’exception des décisions relatives à l’attribution des prestations d’aide sociale à l’enfance. Cette commission se prononce donc sur les décisions des commissions d’admission à l’aide sociale ou des autorités (préfet, président du conseil général) qui décident des attributions en matière d’aide sociale (aide médicale de l’Etat, revenu minimum d’insertion, allocation personnalisée d’autonomie, etc.). Le demandeur dispose d’un délai de deux mois à compter de la notification de la décision contestée pour former son recours. La commission siège au chef-lieu du département et son secrétariat est assuré par la DDASS (direction départementale des affaires sanitaires et sociales). L’intéressé peut demander à être entendu et se faire accompagner de la personne ou de l’organisme de son choix.
455 Comment contester une décision de la commission départementale d’aide sociale ?
Une décision de la CDAS peut être contestée devant la CCAS (commission centrale d’aide sociale). Le délai d’appel est également de deux mois. La commission centrale siège au ministère des Affaires sociales. L’intéressé peut demander à être entendu et se faire accompagner de la personne ou de l’organisme de son choix. L’appel doit être formé dans un délai de deux mois. Le recours à un avocat n’est pas obligatoire. Il est possible de former un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat contre une décision de la CCAS. Par exception, le recours à un avocat devant le Conseil d’Etat n’est pas obligatoire en cette matière. Il est toutefois vivement conseillé d’en désigner un, compte tenu du caractère très technique de la matière. Un grand nombre de pourvois introduits sans avocat au Conseil d’Etat ne sont pas admis par cette juridiction.