Paris, le 12 janvier 2006.
Communiqué de presse du Collectif « Octobre 2001 »
Adoption des nouvelles règles pénitentiaires du Conseil de l’Europe
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Le comité des Ministres du Conseil de l’Europe, réuni le 11 janvier 2006, vient d’adopter la nouvelle version des « Règles pénitentiaires européennes ». La version précédente datait du 12 février 1987 [1].
C’est un long chantier de 5 années d’études, de consultations et de discussions entre les 46 Etats membres qui s’achève sur ce consensus [2].
Le gouvernement français tiendra-t-il les engagements politiques et diplomatiques qu’il vient de prendre par l’intermédiaire de son représentant au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe ? Le Collectif « Octobre 2001 » refuse qu’il en soit de ce texte, qui revêt une grande importance pour les droits de l’Homme, comme des recommandations précédentes, ignorées sinon dénigrées par le pouvoir exécutif comme par la majorité parlementaire : recommandation du 30 septembre 1999 sur « le surpeuplement des prisons et l’inflation carcérale », recommandation du 24 septembre 2003 sur « la libération conditionnelle », recommandation du 9 octobre 2003 sur « La gestion des condamnés à perpétuité et autres condamnés à de longues peines par les administrations pénitentiaires ?
Le gouvernement doit mettre en cohérence la condition pénitentiaire en France avec les règles qui viennent d’être adoptées à Strasbourg. La « société civile organisée » militant pour les droits de l’Homme et toutes les forces de progrès doivent se mobiliser dans ce but. Le Collectif « Octobre 2001 » fort de la diversité et de représentativité de ses membres y prendra toute sa part : le travail est immense et urgent.
Organisations signataires :
Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-France),
Association française de Criminologie (AFC),
Association nationale des visiteurs de prison (ANVP),
Ban Public - Association pour la communication sur les prisons et l’incarcération en Europe,
Club social-démocrate DES Maintenant en Europe,
Groupe national étudiant d’enseignement aux personnes incarcérées (GENEPI),
Fédération des associations réflexion action prison et justice (FARAPEJ)
Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS),
Les VERTS,
Ligue des droits de l’homme (LDH),
Parti communiste français (PCF),
Syndicat de la Magistrature (SM),
Syndicat national de l’ensemble des personnels pénitentiaires (SNEPAP-FSU).
Union générale des syndicats pénitentiaires (UGSP-CGT)
• Responsable de la diffusion du communiqué : pierre-victor.tournier@wanadoo.fr
• Contact avec tous les membres du Collectif : contact@collectif2001.org
Le texte exhaustif des nouvelles règles pénitentiaires européennes ainsi que l’exposé des motifs a été mis en ligne
- sur le site du Collectif « Octobre 2001 » : http://www.collectif2001.org
- sur le site de Ban Public : http://www.prison.eu.org
Règles pénitentiaires européennes :
http://www.prison.eu.org/article.php3?id_article=7584
Motifs des règles pénitentiaires européennes : http://www.prison.eu.org/article.php3?id_article=7585
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Le Comité des Ministres « recommande aux gouvernements des Etats membres :
- de suivre dans l’élaboration de leurs législations ainsi que de leurs politiques et pratiques des règles contenues dans l’annexe à la présente recommandation qui remplace la Recommandation no R (87) 3 du Comité des Ministres sur les Règles pénitentiaires européennes,
- de s’assurer que la présente recommandation et son exposé des motifs soient traduits et diffusés de façon la plus large possible et plus spécifiquement parmi les autorités judiciaires, le personnel pénitentiaire et les détenus eux-mêmes.
Principes fondamentaux des règles pénitentiaires européennes de 2006
Règle 1. Les personnes privées de liberté doivent être traitées dans le respect des droits de l’homme.
Règle 2. Les personnes privées de liberté conservent tous les droits qui ne leur ont pas été retirés selon la loi par la décision les condamnant à une peine d’emprisonnement ou les plaçant en détention provisoire.
Règle 3. Les restrictions imposées aux personnes privées de liberté doivent être réduites au strict nécessaire et doivent être proportionnelles aux objectifs légitimes pour lesquelles elles ont été imposées.
Règle 4. Le manque de ressources ne saurait justifier des conditions de détention violant les droits de l’homme.
Règle 5. La vie en prison est alignée aussi étroitement que possible sur les aspects positifs de la vie à l’extérieur de la prison.
Règle 6. Chaque détention est gérée de manière à faciliter la réintégration dans la société libre des personnes privées de liberté.
Règle 7. La coopération avec les services sociaux externes et, autant que possible, la participation de la société civile à la vie pénitentiaire doivent être encouragées.
Règle 8. Le personnel pénitentiaire exécute une importante mission de service public et son recrutement, sa formation et ses conditions de travail doivent lui permettre de fournir un haut niveau de prise en charge des détenus.
Règle 9. Toutes les prisons doivent faire l’objet d’une inspection gouvernementale régulière ainsi que du contrôle d’une autorité indépendante.
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Exemples de règles en contradiction flagrante avec la situation des prisons françaises
Champ d’application
Règle 12.1 Les personnes souffrant de maladies mentales et dont l’état de santé mentale est incompatible avec la détention en prison devraient être détenues dans un établissement spécialement conçu à cet effet.
Conditions de détention
Règle 17.1 Les détenus doivent être répartis autant que possible dans des prisons situées près de leur foyer ou de leur centre de réinsertion sociale.
Répartition et locaux de détention
Règle 18. 5. Chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle, sauf lorsqu’il est considéré comme préférable pour lui qu’il cohabite avec d’autres détenus.
6. Une cellule doit être partagée uniquement si elle est adaptée à un usage collectif et doit être occupée par des détenus reconnus aptes à cohabiter.
7. Dans la mesure du possible, les détenus doivent pouvoir choisir avant d’être contraints de partager une cellule pendant la nuit.
Hygiène
Règle 19.3 Les détenus doivent jouir d’un accès facile à des installations sanitaire hygiéniques et protégeant leur intimité.
Contacts avec le monde extérieur
Règle 24. 1 Les détenus doivent être autorisés à communiquer aussi fréquemment que possible - par lettre, par téléphone ou par d’autres moyens de communication - avec leur famille, des tiers et des représentants d’organismes extérieurs, ainsi qu’à recevoir des visites des dites personnes.
2. Toute restriction ou surveillance des communications et des visites nécessaire à la poursuite et aux enquêtes pénales, au maintien du bon ordre, de la sécurité et de la sûreté, ainsi qu’à la prévention d’infractions pénales et à la protection des victimes - y compris à la suite d’une ordonnance spécifique délivrée par une autorité judiciaire - doit néanmoins autoriser un niveau minimal acceptable de contact.
4. Les modalités des visites doivent permettre aux détenus de maintenir et de développer des relations familiales de façon aussi normale que possible.
8. Tout détenu doit avoir le droit d’informer immédiatement sa famille de sa détention ou de son transfèrement dans un autre établissement, ainsi que de toute maladie ou blessure grave dont il souffre.
12. Les détenus doivent être autorisés à communiquer avec les médias, à moins que des raisons impératives ne s’y opposent au nom de la sécurité et de la sûreté, de l’intérêt public ou de la protection des victimes, des autres détenus et du personnel.
Régime pénitentiaire
Règles 25. 1. Le régime prévu pour tous les détenus doit offrir un programme d’activités équilibré.
2. Ce régime doit permettre à tous les détenus de passer chaque jour hors de leur cellule autant de temps que nécessaire pour assurer un niveau suffisant de contacts humains et sociaux.
3. Ce régime doit aussi pourvoir aux besoins sociaux des détenus.
Bon ordre
Règle 50. Sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à discuter de questions relatives à leurs conditions générales de détention et doivent être encouragés à communiquer avec les autorités pénitentiaires à ce sujet.
Contrôle indépendant
Règle 93. Les conditions de détention et la manière dont les détenus sont traités doivent être contrôlées par un ou des organes indépendants, dont les conclusions doivent être rendues publiques. Ces organes de contrôle indépendants doivent être encouragés à coopérer avec les organismes internationaux légalement habilités à visiter les prisons.
Approche applicable aux prévenus
Règles 95.3 Dans leurs rapports avec les prévenus, les autorités doivent être guidées par les Règles applicables à l’ensemble des détenus et permettre aux prévenus de participer aux activités prévues par les dites Règles.
Travail des détenus condamnés
Règles 105. 4. Lorsque des détenus condamnés participent à des programmes éducatifs ou autres pendant les heures de travail, dans le cadre de leur régime planifié, ils doivent être rémunérés comme s’ils travaillaient.
Education des détenus condamnés
Règle 106. 1. Un programme éducatif systématique, comprenant l’entretien des acquis et visant à améliorer le niveau global d’instruction des détenus, ainsi que leurs capacités à mener ensuite une vie responsable et exempte de crime doit constituer une partie essentielle du régime des détenus condamnés.
2. Tous les détenus condamnés doivent être encouragés à participer aux programmes d’éducation et de formation.
3. Les programmes éducatifs des détenus condamnés doivent être adaptés à la durée prévue de leur séjour en prison.