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Labita c. Italie, Décision de la Commission n°26772/95, 20 octobre 1997

Mise en ligne : 23 juin 2005

Texte de l'article :

SUR LA RECEVABILITE ?

de la reque ?te N° 26772/95 pre ?sente ?e par Benedetto LABITA contre l’Italie

 La Commission europe ?enne des Droits de l’Homme, sie ?geant en chambre du conseil le 20 octobre 1997 en pre ?sence de

 M. S. TRECHSEL, Pre ?sident
 Mme G.H. THUNE
 Mme J. LIDDY
 MM. E. BUSUTTIL
 G. JO ?RUNDSSON
 A.S. GO ?ZU ?BU ?YU ?K
 A. WEITZEL
 J.-C. SOYER
 H. DANELIUS
 F. MARTINEZ
 C.L. ROZAKIS
 L. LOUCAIDES
 J.-C. GEUS
 M.P. PELLONPA ?A ?
 B. MARXER
 M.A. NOWICKI
 I. CABRAL BARRETO
 B. CONFORTI
 N. BRATZA
 I. BE ?KE ?S
 J. MUCHA
 D. SVA ?BY
 G. RESS
 A. PERENIC
 C. BI ?RSAN
 K. HERNDL
 E. BIELIUNAS
 E.A. ALKEMA
 M. VILA AMIGO ?
 Mme M. HION
 MM. R. NICOLINI
 A. ARABADJIEV

 M. M. de SALVIA, Secre ?taire de la Commission ;

 Vu l’article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Liberte ?s fondamentales ;

 Vu la reque ?te introduite le 10 avril 1994 par Benedetto LABITA contre l’Italie et enregistre ?e le 21 mars 1995 sous le N° de dossier 26772/95 ;

 Vu les rapports pre ?vus a ? l’article 47 du Re ?glement inte ?rieur de la Commission ;

 Vu les renseignements fournis par le Gouvernement de ?fendeur le 23 fe ?vrier 1996 et les commentaires du reque ?rant en date du 7 mai 1996 ;

 Vu les observations pre ?sente ?es par le Gouvernement de ?fendeur les 19 fe ?vrier, 7 mars et 16 juin 1997, apre ?s prorogation du de ?lai imparti, et les observations en re ?ponse pre ?sente ?es par le reque ?rant le 24 avril 1997 ;

 Apre ?s avoir de ?libe ?re ?,

 Rend la de ?cision suivante :

EN FAIT

 Le reque ?rant, citoyen italien ne ? en 1955, re ?side a ? Alcamo (province de Trapani). Sa profession actuelle n’est pas connue. En tout cas, avant d’e ?tre arre ?te ? et jusqu’en septembre 1991, il a e ?te ? employe ? aupre ?s d’une socie ?te ? financie ?re prive ?e.

 Devant la Commission il est repre ?sente ? par Me Vito di Graziano, avocat a ? Alcamo.

 Les faits de la cause, tels qu’ils ont e ?te ? pre ?sente ?s par les parties, peuvent se re ?sumer comme suit.

 La de ?tention du reque ?rant et le de ?roulement de la proce ?dure engage ?e a ? son encontre

 Le reque ?rant fut arre ?te ? le 21 avril 1992 sur ordonnance de mise en de ?tention du tribunal de Trapani du 18 avril 1992. Il e ?tait en effet soupc ?onne ? d’appartenir a ? la mafia de la petite ville d’Alcamo et de diriger une socie ?te ? financie ?re pour le compte de son beau-fre ?re V.M., chef du groupe mafieux local dominant. Les accusations porte ?es a ? l’encontre du reque ?rant, ainsi qu’a ? l’encontre de 45 autres personnes, se fondaient notamment sur les de ?clarations faites par un mafieux soi-disant "pentito" (ci-apre ?s de ?signe ? "repenti"), B.F., qui avait mis en cause un nombre important de personnes soupc ?onne ?es d’appartenir a ? deux clans mafieux qui s’e ?taient livre ?s a ? une guerre sanglante.

 Le reque ?rant fut d’abord incarce ?re ? a ? la prison de Palerme, ou ? il resta trente-cinq jours en isolement. Il s’adressa ensuite au tribunal de la liberte ? de Trapani et demanda sa mise en liberte ?.

 Le 6 mai 1992, le tribunal de Trapani de ?bouta le reque ?rant de son recours. Le tribunal conside ?ra en particulier que les de ?clarations faites par B.F. sur l’appartenance du reque ?rant a ? la mafia d’Alcamo en tant que tre ?sorier, bien que de ?pourvues de tout renseignement sur le ro ?le et l’activite ? exerce ?s concre ?tement par le reque ?rant et de tout e ?le ?ment de preuve objectif, pouvaient bien constituer un indice suffisant pour justifier la de ?tention du reque ?rant, e ?tant donne ? la cre ?dibilite ? et la fiabilite ? des diverses de ?clarations faites par B.F. quant a ? d’autres personnes ou e ?pisodes relatifs aux agissements de la mafia locale (crite ?re de la "cre ?dibilite ? globale" - "attendibilita ? complessiva"). En outre, il fallait e ?galement tenir compte du fait que B.F. avait indique ? le reque ?rant comme e ?tant le beau-fre ?re du chef de l’une des familles mafieuses d’Alcamo, au sein de laquelle il occupait selon lui une place importante, et avait de ?clare ? le reconnai ?tre sur une photo. Enfin, B.F. avait soutenu que le reque ?rant ge ?rait une socie ?te ? financie ?re et e ?tait co-titulaire de parts dans une socie ?te ? ge ?rant une discothe ?que avec une autre personne, dont l’appartenance a ? la mafia avait e ?te ? alle ?gue ?e par B.F. dans d’autres de ?clarations.

 Par ailleurs, la de ?tention du reque ?rant se justifiait e ?galement par la ne ?cessite ? de sauvegarder les preuves recueillies, s’agissant surtout de preuves orales et donc susceptibles d’e ?tre mises en pe ?ril par des pressions sur les te ?moins.

 Le reque ?rant, qui entre-temps avait e ?te ? transfe ?re ? a ? la prison de Pianosa, se pourvut en cassation. Il fit valoir en particulier que sa de ?tention reposait uniquement sur les de ?clarations de B.F., qui n’e ?taient corrobore ?es par aucun e ?le ?ment de fait. En effet, tel ne pouvait e ?tre conside ?re ?e notamment l’alle ?gation selon laquelle le reque ?rant aurait e ?te ? le ge ?rant d’une socie ?te ? financie ?re, ce qui selon les juges confirmait sa position de cadre dans la finance locale et donc renforc ?ait l’accusation d’e ?tre le tre ?sorier d’une branche de la mafia. En effet, au sein de ladite socie ?te ?, le reque ?rant n’e ?tait en re ?alite ? qu’un employe ? et dans le passe ? avait me ?me e ?te ? soumis a ? une proce ?dure disciplinaire. Ce pourvoi fut cependant rejete ? le 2 octobre 1992.

 Le reque ?rant s’adressa a ? nouveau au juge des investigations pre ?liminaires (ci-apre ?s de ?signe ? "G.I.P."), mais cette demande fut rejete ?e le 29 de ?cembre 1992.

 Le reque ?rant interjeta alors appel, qui fut cependant rejete ? par le tribunal de Trapani, section d’appel compe ?tente en matie ?re de de ?tention, le 8 fe ?vrier 1993, au motif que le reque ?rant n’avait pas prouve ? la disparition des exigences de l’enque ?te justifiant son maintien en de ?tention, e ?tant donne ? en particulier que d’apre ?s l’article 275 par. 3 du Code de proce ?dure pe ?nale (ci-apre ?s "C.P.P."), l’existence de ces exigences e ?tait pre ?sume ?e pour certaines infractions, parmi lesquelles figurait celle reproche ?e au reque ?rant. Ce dernier s’e ?tait en effet borne ? a ? invoquer l’e ?coulement du temps.

 Sur demande du ministe ?re public, par ordonnance du 8 avril 1993 le tribunal de Trapani prorogea les de ?lais maxima de de ?tention provisoire en application de l’article 305 par. 2 C.P.P.

 A cette e ?poque les accusations porte ?es a ? l’encontre du reque ?rant se fondaient toujours uniquement sur les de ?clarations de B.F. Par ailleurs, au cours de l’enque ?te d’autres repentis avaient de ?clare ? ne pas connai ?tre le reque ?rant.

 Ce dernier interjeta appel de cette ordonnance pre ?s la section d’appel compe ?tente en matie ?re de de ?tention du me ?me tribunal, faisant valoir la nullite ? de l’ordonnance attaque ?e au motif que la demande du ministe ?re public n’avait pas e ?te ? notifie ?e pre ?alablement a ? son avocat, et en outre que la ne ?cessite ? de proroger les de ?lais avait e ?te ? motive ?e d’une fac ?on ge ?ne ?rique et sans se rapporter directement a ? sa situation.

 Le tribunal de Trapani, section d’appel compe ?tente en matie ?re de de ?tention, rejeta l’appel du reque ?rant le 21 juin 1993. Il conside ?ra en particulier que la loi se bornait a ? exiger que l’avocat soit entendu sur la demande du ministe ?re public, ce qui avait bien e ?te ? fait en l’espe ?ce, et non pas une notification pre ?alable et formelle de pareille demande. Quant a ? la ne ?cessite ? de la mesure incrimine ?e, le tribunal fit valoir que bien que l’ordonnance attaque ?e fu ?t motive ?e d’une manie ?re pluto ?t succincte, elle avait mis en e ?vidence le danger d’alte ?ration des preuves, les caracte ?ristiques spe ?cifiques du crime d’association de type mafieux reproche ? aux pre ?venus et le danger de re ?pe ?tition de graves de ?lits tels que des homicides, surtout dans le contexte de lutte entre clans dans lequel se situait l’affaire. En outre, le ministe ?re public avait amplement explique ? les exigences de l’instruction ayant motive ? sa demande, a ? savoir la ne ?cessite ? de proce ?der a ? des enque ?tes complexes de nature bancaire et fiscale, afin d’e ?claircir l’e ?tendue du contro ?le exerce ? sur le territoire par les pre ?venus. Le tribunal souligna e ?galement qu’au demeurant, la nature du crime en question exigeait des enque ?tes concernant l’association mafieuse dans son ensemble et donc force ?ment tous les pre ?venus.

 Le reque ?rant se pourvut en cassation, alle ?guant le non-respect des droits de la de ?fense en ce que la demande du ministe ?re public ne lui avait pas e ?te ? notifie ?e au pre ?alable, mais il fut de ?boute ? par arre ?t du 18 octobre 1993.

 A une date qui n’a pas e ?te ? pre ?cise ?e, le reque ?rant fut renvoye ? en jugement pour association de type mafieuse (article 416bis du Code pe ?nal).

 Par jugement du 12 novembre 1994, de ?pose ? au greffe le 10 fe ?vrier 1995, le tribunal de Trapani acquitta le reque ?rant pour n’avoir pas commis les faits qui lui avaient e ?te ? reproche ?s. Le tribunal observa en particulier que les faits concernant le ro ?le du reque ?rant au sein de l’organisation mafieuse avaient e ?te ? relate ?s par B.F. sur la base de ce qu’il avait appris de deux autres personnes, qui cependant e ?taient entre-temps de ?ce ?de ?es, ce qui rendait impossible une confirmation externe de sa version des faits. Par ailleurs, cette version avait e ?te ? contredite par d’autres te ?moignages et e ?le ?ments de fait.

 Nonobstant que le jugement d’acquittement eu ?t e ?te ? prononce ? le 12 novembre 1994 et que le dispositif du jugement ordonna ?t la libe ?ration du reque ?rant, ce dernier ne fut en re ?alite ? remis en liberte ?, par la prison de Termini Imerese, que le 13 novembre 1994. En effet, le reque ?rant fut accompagne ? en audience le 12 novembre a ? 07h30 et il retourna en prison a ? 15h25, en raison du report de l’audience. Il se rendit de nouveau au tribunal de Trapani a ? 19h40 et ce ne fut qu’a ? 00h25 du 13 novembre qu’il rentra en prison, selon lui avec des menottes, afin d’accomplir les formalite ?s ne ?cessaires pour sa mise en liberte ? et que le chef de l’escorte remit au personnel pe ?nitentiaire le jugement d’acquittement. Cependant, le reque ?rant ne put e ?tre libe ?re ? imme ?diatement apre ?s en raison de l’absence de l’employe ? du bureau de la matricule, dont l’intervention e ?tait ne ?cessaire dans le cas d’un de ?tenu soumis a ? un re ?gime de de ?tention spe ?cial. Par conse ?quent, il passa la nuit dans sa cellule et fut remis en liberte ? le lendemain a ? 08h30.

 Le procureur de la Re ?publique interjeta appel.

 Par arre ?t du 14 de ?cembre 1995, devenu de ?finitif quant au
reque ?rant le 25 juin 1996, la cour d’appel de Palerme confirma son
acquittement, conforme ?ment a ? l’avis exprime ? par le procureur ge ?ne ?ral.

 Les mauvais traitements que le reque ?rant pre ?tend avoir subis dans
 la prison de Pianosa

1. Les traitements incrimine ?s

 Le reque ?rant fut d’abord de ?tenu dans la prison de Termini Imerese
jusqu’au 20 juillet 1992, date a ? laquelle il arriva a ? la prison de
Pianosa. Le reque ?rant resta de ?tenu dans cette dernie ?re prison d’une
fac ?on ininterrompue jusqu’au 29 janvier 1993. Par la suite, il fit
l’objet de fre ?quents transfe ?rements temporaires afin de pouvoir
participer aux diffe ?rentes phases du proce ?s le concernant.

 Du tableau clinique de la prison de Pianosa il ressort qu’a ? son
arrive ?e dans cette prison, le reque ?rant e ?tait en bonne condition de
sante ? ge ?ne ?rale.

 Dans la prison de Pianosa le reque ?rant aurait e ?te ? soumis a ? des
mauvais traitements, en particulier entre juillet et septembre 1992.

 Le reque ?rant alle ?gue avoir e ?te ? souvent gifle ? et avoir subi des
le ?sions a ? son pouce droit. On lui aurait e ?galement presse ? les
testicules, pratique qui, selon le reque ?rant, e ?tait syste ?matiquement
inflige ?e a ? tous les de ?tenus.

 Une fois, alors que le reque ?rant e ?tait battu, son tricot aurait
e ?te ? de ?chire ?. Le reque ?rant aurait fait des remontrances. Deux heures
plus tard, un gardien lui aurait enjoint de se taire, l’aurait insulte ?
et ensuite frappe ?, en lui causant la rupture d’une prothe ?se dentaire,
outre l’endommagement de ses lunettes.

 Le reque ?rant alle ?gue ensuite avoir e ?te ? malmene ? a ? d’autres
occasions. Ainsi, il relate que les de ?tenus avaient la permission de
poser dans les couloirs adjacents a ? leurs cellules des produits
d’hygie ?ne. Parfois, les gardiens de la prison provoquaient le
de ?versement de ces produits sur le sol et y faisaient tomber en me ?me
temps de l’eau, ce qui rendait le sol glissant. Les de ?tenus e ?taient
ensuite contraints de courir dans les couloirs, entre deux files de
gardiens, ce qui provoquait des chutes, auxquelles les gardiens
re ?agissaient en matraquant et en frappant les de ?tenus qui e ?taient
tombe ?s.

 Le reque ?rant relate e ?galement qu’il aurait du ? subir souvent des
fouilles corporelles pendant qu’il prenait sa douche, et que lors des
visites me ?dicales il devait garder ses menottes.

 Enfin, selon le reque ?rant les transfe ?rements de la prison aux
tribunaux lors des audiences e ?taient faits dans des conditions
inhumaines, a ? savoir dans la cale des bateaux, sans air, lumie ?re,
hygie ?ne ou nourriture.

 Du tableau me ?dical de la prison de Pianosa il ressort qu’en date
du 9 septembre 1992, le reque ?rant avait signale ? l’instabilite ? d’une
prothe ?se dentaire. Le me ?decin avait demande ? en conse ?quence une visite
de dentiste.

 En avril 1993, une visite chez un dentiste en vue de fixer la
prothe ?se instable fut a ? nouveau demande ?e.

 Le 10 aou ?t 1993, le service me ?dical de la prison de Pianosa
demanda des radiographies et une visite orthope ?dique, le reque ?rant
faisant e ?tat de douleurs aux genoux. Apre ?s des examens, une visite
orthope ?dique en date du 22 septembre 1993 e ?tablit la pre ?sence d’ennuis
aux genoux, bien que l’e ?tat du dossier ne permette pas d’en de ?terminer
la nature exacte.

 Le 17 mars 1994, le dentiste releva la rupture de ?finitive de la
prothe ?se et la ne ?cessite ? d’une re ?paration en atelier.

 Le reque ?rant a en outre produit un rapport me ?dical date ? du
24 mars 1995, faisant e ?tat de calcifications au niveau de
l’articulation du genou. Une e ?chographie date ?e du 3 avril 1996 a par
ailleurs releve ? deux petites le ?sions d’origine traumatique dans la
partie ante ?rieure externe du me ?me genou.

 Enfin, le reque ?rant a produit un certificat me ?dical date ? du
20 mars 1996, faisant e ?tat de troubles psychologiques (asthe ?nie, e ?tat
confusionnel, de ?pression), ayant de ?bute ? trois ans auparavant.

2. Le recours tente ? par le reque ?rant

 Le reque ?rant de ?nonc ?a avoir subi des traitements inhumains et
de ?gradants une premie ?re fois le 2 octobre 1993, lors de l’audience
pre ?liminaire devant le G.I.P. pre ?s le tribunal de Trapani, en me ?me
temps qu’un autre de ?tenu. A cette occasion, le reque ?rant se plaignit
en particulier des mauvais traitements, tels que des "tortures,
humiliations et se ?vices", qu’il alle ?guait avoir subis dans la prison
de Pianosa jusqu’en octobre 1992. Il de ?clara avoir subi en particulier
la fracture d’un doigt et la rupture de dents. Me ?me si cette situation
s’e ?tait ame ?liore ?e a ? partir du mois d’octobre 1992, le reque ?rant se
plaignit que le traitement global auquel il e ?tait soumis, et qui
de ?coulait notamment de l’application de l’article 41bis de la loi
n° 354 de 1975, e ?tait inhumain et tre ?s lourd d’un point de vue
affectif.

 Le juge informa par la suite le parquet de Libourne, qui ouvrit
une enque ?te (n° 629/93). Selon le reque ?rant, cette plainte aurait e ?te ?
re ?ite ?re ?e le 5 janvier 1994 devant les autorite ?s de la prison de
Pianosa. Le Gouvernement a fait valoir a ? cet e ?gard que la pre ?sentation
de cette plainte n’est confirme ?e par aucun document.

 Le reque ?rant fut entendu par les carabiniers le 5 janvier 1993,
auxquels il de ?crit les mauvais traitements qu’il alle ?guait avoir subis.
Il pre ?cisa cependant ne pas pouvoir reconnai ?tre les gardiens
responsables puisque les de ?tenus e ?taient oblige ?s de garder la te ?te
baisse ?e lorsqu’ils e ?taient en relation avec des gardiens.

 Le reque ?rant fut ensuite entendu par le G.I.P. pre ?s le tribunal
de Libourne, auquel il de ?clara avoir e ?te ? maltraite ? et matraque ?. Selon
une note du parquet de Libourne date ?e du 5 aou ?t 1996, ces traitements
n’avaient pas laisse ? de traces et le reque ?rant n’avait en tout cas pas
fait constater des le ?sions e ?ventuelles par un me ?decin. Cependant, le
reque ?rant mentionna aussi un coup lui ayant cause ? le de ?tachement d’une
prothe ?se dentaire et cette le ?sion, comme le reconnai ?t le parquet de
Libourne dans sa note susmentionne ?e, ressortait effectivement du
tableau me ?dical de la prison.

 Dans le cadre de l’enque ?te qui s’en suivit, le 9 mars 1995 le
reque ?rant fut convoque ? par les carabiniers de Trapani, sur mandat du
parquet de Libourne promoteur de l’enque ?te, qui lui pre ?sente ?rent la
photocopie des photos de 262 gardiens de prison ayant travaille ? a ? la
prison de Pianosa. Le reque ?rant de ?clara ne pas reconnai ?tre la personne
qu’il accusait de l’avoir maltraite ?, tout en observant que les photos
remontaient a ? une e ?poque ante ?rieure aux faits et en plus il ne
s’agissait que de photocopies. Il ajouta e ?galement qu’il n’aurait eu
aucune difficulte ? pour reconnai ?tre le gardien en question s’il avait
pu le voir en personne.

 Compte tenu du re ?sultat ne ?gatif de la tentative d’identifier le
ou les auteurs des faits de ?nonce ?s, le parquet de Libourne demanda le
18 mars 1995 le classement sans suite de la plainte, ce qui fut fait
par de ?cret du G.I.P. pre ?s le tribunal de Libourne en date du 1er avril
1995, au motif que les auteurs des faits de ?nonce ?s ne pouvaient pas e ?tre
identifie ?s ("perche ? ignoti gli autori del reato").

3. Le rapport du juge d’application des peines de Libourne sur les
 conditions de de ?tention dans la prison de Pianosa

 Le 5 septembre 1992, le juge d’application des peines de Libourne
avait envoye ? un rapport au ministre de la Justice ainsi qu’a ? d’autres
autorite ?s pe ?nitentiaires et administratives compe ?tentes, concernant les
conditions de de ?tention dans la prison de Pianosa.

 Ce rapport, qui e ?tait issu d’une premie ?re inspection sur les
lieux en aou ?t 1992, faisait e ?tat notamment de violations re ?pe ?te ?es des
droits des de ?tenus et de plusieurs e ?pisodes de mauvais traitements,
aussi bien dans la section spe ?ciale "Agrippa" que dans les sections
ordinaires. A titre d’exemple, on peut rappeler que ce rapport avait
releve ? :

- que les conditions d’hygie ?ne e ?taient lamentables ;

- que la correspondance des de ?tenus, bien qu’autorise ?e sous
 censure, e ?tait totalement bloque ?e, et les te ?le ?grammes e ?taient
 remis aux inte ?resse ?s avec des retards importants ;

- que les de ?tenus e ?taient oblige ?s de se rendre dans la cour de
 promenade en courant, probablement a ? l’aide de coups de matraque
 sur les jambes ;

- que les de ?tenus faisaient parfois l’objet de matraquages et
 d’autres mauvais traitements (par exemple, un de ?tenu aurait e ?te ?
 contraint de se de ?shabiller comple ?tement et d’effectuer des
 exercices au sol - "flessioni" -, suivis d’un contro ?le rectal,
 qui selon le juge d’application des peines n’e ?tait pas du tout
 ne ?cessaire, le de ?tenu en question venant de terminer un travail
 accompli en pre ?sence d’autres gardiens ; ce de ?tenu, qui pendant
 qu’il se rhabillait aurait e ?te ? gifle ?, s’e ?tait ensuite adresse ? au
 me ?decin de la prison ; pendant la nuit, trois gardiens se
 seraient rendus dans sa cellule et l’auraient battu) ;

- que d’autres e ?pisodes de ce genre semblaient s’e ?tre produits par
 la suite, bien que plus re ?cemment la situation paraissait s’e ?tre
 ame ?liore ?e, probablement a ? la suite d’interventions pre ?s les
 gardiens de la prison ; quoi qu’il en e ?tait, le juge
 d’application des peines se re ?servait de rapporter ces faits au
 parquet.

 A la suite des informations faisant e ?tat de violences sur les
de ?tenus dans la prison de Pianosa, relate ?es e ?galement par la presse,
le procureur de la Re ?publique de Libourne se rendit sur l’i ?le pendant
une journe ?e et de ?clara a ? la presse n’avoir trouve ? aucun e ?le ?ment
confirmant les informations susmentionne ?es.

 Par ailleurs, le 30 juillet 1992 l’inspection de l’administration
pe ?nitentiaire pour la Toscane avait informe ? le de ?partement de
l’administration pe ?nitentiaire du ministe ?re de la justice que selon
certaines informations provenant de sources dignes de foi, de graves
e ?pisodes de mauvais traitements envers les de ?tenus avaient eu lieu dans
la prison de Pianosa. Ce rapport mentionnait en particulier l’e ?pisode
d’un de ?tenu handicape ? transporte ? a ? l’inte ?rieur de la prison sur une
brouette sous la de ?rision des gardiens, ou encore celui d’un autre
de ?tenu contraint de s’agenouiller devant un cierge.

 Le 12 octobre 1992, une note du directeur ge ?ne ?ral du de ?partement
de l’administration pe ?nitentiaire du ministe ?re de la justice, adresse ?e
au chef de cabinet du ministre, estima notamment que suite a ? une
inspection par des fonctionnaires du ministe ?re, les e ?pisodes de mauvais
traitements de ?nonce ?s devaient e ?tre re ?duits a ? leurs justes proportions
et que les conditions releve ?es par le juge d’application des peines de
Libourne e ?taient a ? imputer surtout au fait que 55 de ?tenus avaient e ?te ?
transfe ?re ?s a ? Pianosa d’urgence la nuit entre le 19 et le 20 juillet
1992, apre ?s l’attentat ou ? avait perdu la vie un autre juge anti-mafia,
ce qui avait pose ? des proble ?mes pratiques pouvant expliquer en grande
partie les inconve ?nients releve ?s. En outre, des travaux de
restructuration en cours dans la prison avaient pose ? quelques proble ?mes
supple ?mentaires.

 Le 28 octobre 1992, le me ?me directeur ge ?ne ?ral remit au chef du
cabinet du ministre, ainsi qu’au parquet, les conclusions d’un groupe
d’experts nomme ?s par le de ?partement. Selon ceux-ci, sur la base des
e ?le ?ments fournis par les de ?tenus interroge ?s sur place les alle ?gations
de mauvais traitements e ?taient de ?nue ?es de tout fondement, a ? l’exception
de l’e ?pisode du transport d’un de ?tenu handicape ? par une brouette, du ?
cependant a ? l’absence d’un fauteuil roulant dans la prison.

 A la suite du rapport du juge d’application des peines, une
enque ?te fut ne ?anmoins ouverte et les actes recueillis furent envoye ?s
au parquet pre ?s le juge d’instance de Libourne, dans la mesure ou ? il
avait e ?te ? possible de restreindre le champ de l’enque ?te a ? deux
gardiens, les seuls que l’on avait pu identifier, soupc ?onne ?s des de ?lits
de le ?sions personnelles (article 582 du Code pe ?nal) et abus d’autorite ?
sur des personnes arre ?te ?es ou de ?tenues (article 608 du Code pe ?nal).

 Le parquet demanda le classement sans suite des deux chefs
d’accusation, respectivement pour de ?faut de plainte et prescription.
Cette demande fut accueillie quant au chef de le ?sions personnelles,
mais fut rejete ?e quant a ? l’autre accusation, et le 20 de ?cembre 1996 le
G.I.P. demanda des renseignements comple ?mentaires. Cette enque ?te serait
toujours en cours.

 Le re ?gime des visites de la part des membres de la famille du
 reque ?rant et la censure sur sa correspondance

1. L’application de l’article 41bis de la loi sur l’administration
 pe ?nitentiaire et le re ?gime des visites

 Le 20 juillet 1992, le ministe ?re de la Justice prit un de ?cret
imposant au reque ?rant, jusqu’au 20 juillet 1993, le re ?gime spe ?cial de
de ?tention pre ?vu par l’article 41bis de la loi n° 354 de 1975. Le
ministe ?re conside ?ra que pareille mesure s’imposait notamment pour de
graves raisons d’ordre et de su ?rete ? publique, compte tenu de l’action
de plus en plus agressive et impitoyable de la mafia, qui venait
d’ailleurs d’assassiner trois magistrats et huit policiers et de
commettre des attentats a ? la voiture pie ?ge ?e dans des grandes villes
italiennes. La situation rendait de ?s lors ne ?cessaire de couper les
contacts de certains de ?tenus avec leur milieu d’origine. Le reque ?rant
e ?tait vise ? par la mesure en question en conside ?ration de sa
personnalite ? et dangerosite ?, qui laissaient pre ?sumer qu’il avait en
fait garde ? des contacts avec le milieu criminel dont il e ?tait issu et
qu’il aurait pu les utiliser pour impartir des directives ou instaurer
des liens avec le monde exte ?rieur, pouvant porter atteinte a ? l’ordre
public et a ? la su ?rete ? des e ?tablissements pe ?nitentiaires. En outre, il
e ?tait raisonnable de penser que de tels de ?tenus pouvaient recruter des
adeptes chez les autres de ?tenus ou e ?tablir avec ces derniers, dans la
prison, un rapport de supre ?matie et de vexation semblable a ? celui
existant dans une organisation criminelle.

 A l’e ?gard du reque ?rant, la mesure en question entrai ?nait en
particulier :

- la suppression de toute conversation te ?le ?phonique ;

- la suppression de tout colloque ou correspondance e ?pistolaire ou
 te ?le ?graphique avec un autre de ?tenu, me ?me si membre de la famille
 ou concubin/e ;
- toute la correspondance au de ?part ou en arrive ?e devait e ?tre
 toujours soumise au visa de censure du directeur de la prison ou
 d’un autre membre de l’administration pe ?nitentiaire de ?le ?gue ? par
 le directeur ;

- interdiction de colloques avec des tierces personnes ;

- la limitation des colloques avec d’autres membres de la famille
 ou concubins a ? une seule fois par mois et a ? une seule heure a ? la
 fois, inde ?pendamment du nombre de personnes admises au colloque ;

- interdiction de recevoir ou d’envoyer des sommes d’argent
 supe ?rieures aux limites fixe ?es par le de ?cret du Pre ?sident de la
 Re ?publique (ci-apre ?s "D.P.R.") n° 431 du 29 avril 1976, mis a ?
 part le paiement d’amendes et des frais de justice ;

- interdiction de recevoir des paquets de l’exte ?rieur, sauf ceux
 contenant de la lingerie ;

- interdiction d’organiser des activite ?s culturelles, re ?cre ?atives
 et sportives ;

- interdiction de participer a ? la nomination ou aux activite ?s des
 repre ?sentations des de ?tenus ;

- interdiction d’exercer des activite ?s artisanales ;

- interdiction d’acheter des aliments destine ?s a ? la cuisson ;

- limitation de la promenade a ? deux heures par jour.

 Le 20 juillet 1993, ces mesures furent proroge ?es jusqu’au
31 janvier 1994.

 D’apre ?s les renseignements fournis par le reque ?rant, que le
Gouvernement n’a pas conteste ?s, ainsi que sur la base de certains
articles de presse, lors des entretiens le reque ?rant e ?tait totalement
se ?pare ? de sa famille, y compris ses enfants, par une barrie ?re en verre
et il pouvait communiquer avec eux uniquement par hygiaphone. Par
ailleurs, les visiteurs, et donc aussi l’e ?pouse du reque ?rant et leurs
enfants, e ?taient oblige ?s de se de ?shabiller et de se soumettre a ? une
fouille corporelle avant chaque entrevue, nonobstant la pre ?sence de la
barrie ?re en verre.

 Le 22 de ?cembre 1993, le reque ?rant demanda l’autorisation de
rendre visite a ? son e ?pouse en raison d’un grave deuil l’ayant atteinte.
En effet, deux fre ?res de celle-ci venaient d’e ?tre assassine ?s dans le
cadre du conflit entre diffe ?rents clans mafieux. Cette demande fut
rejete ?e le 28 de ?cembre 1993, au motif que le reque ?rant e ?tait soumis a ?
un re ?gime spe ?cial de de ?tention en raison des graves de ?lits qui lui
e ?taient reproche ?s, et compte tenu en outre de ce qu’un de ?placement ne
paraissait en tout cas pas ne ?cessaire, le reque ?rant pouvant recevoir
des visites pre ?s la prison.

 Le 30 janvier 1994, l’application de l’article 41bis fut proroge ?e
de six mois. Le reque ?rant recourut alors au tribunal d’application des
peines de Florence.

 Ce tribunal estima, le 24 mai 1994, que le ro ?le pre ?sume ? du
reque ?rant au sein de l’organisation incrimine ?e imposait sa se ?paration
de son milieu d’origine et la re ?duction des contacts avec le monde
exte ?rieur par les instruments fournis par l’article 41bis. Cette mesure
e ?tait motive ?e par les graves accusations porte ?es a ? son encontre et par
son lien familial avec le chef de l’organisation mafieuse objet de
l’enque ?te, qui venait d’e ?tre e ?limine ? par d’autres criminels pendant
qu’il e ?tait en fuite avec sa compagne. Les rapports de la police
confirmaient d’ailleurs sa position importante pre ?sume ?e au sein de
l’organisation.

 A de ?faut, le reque ?rant aurait pu, selon le tribunal, contribuer
a ? la prise de de ?cisions ou a ? des agissements criminels par des mafieux
en liberte ?, "d’une manie ?re qu’il n’e ?tait pas possible d’e ?tablir a ?
l’avance mais que l’on pouvait raisonnablement pre ?sumer et qui e ?tait
donc redoutable". La mesure en question e ?tait en conse ?quence
ne ?cessaire. En ce qui concernait en revanche la ne ?cessite ? de certaines
des mesures spe ?cifiques de ?coulant de l’application de l’article 41bis,
le tribunal annula l’interdiction de conversations te ?le ?phoniques entre
le reque ?rant et sa famille, la limitation des colloques personnels a ?
une fois par mois, l’interdiction de recevoir des aliments a ? cuire et
enfin la limitation a ? deux heures de promenade par jour. En ce qui
concerne plus particulie ?rement les deux premiers points, le tribunal
estima, conforme ?ment a ? la jurisprudence en la matie ?re selon laquelle
la ne ?cessite ? de chaque mesure concre ?te doit e ?tre ve ?rifie ?e a ? la lumie ?re
des finalite ?s poursuivies par l’article 41bis, que ces mesures ne se
justifiaient pas par le but final de re ?duire les contacts du reque ?rant
avec le monde exte ?rieur et surtout de couper ceux avec le milieu
criminel avec lequel il e ?tait accuse ? d’avoir coope ?re ?. En effet, il
n’avait aucun sens d’interdire les conversations te ?le ?phoniques avec les
membres de sa famille si l’on admettait la possibilite ? de s’entretenir
avec eux lors de colloques directs et par ailleurs, une fois que l’on
admettait la possibilite ? de tels colloques il n’y avait aucune raison
de les limiter a ? une seule fois par mois.

 Cependant, le 2 aou ?t 1994, le ministe ?re de la Justice prorogea
une deuxie ?me fois l’application au reque ?rant du re ?gime pre ?vu par
l’article 41bis, jusqu’au 31 janvier 1995, en lui imposant de nouveau
les me ?mes mesures qui avaient e ?te ? adopte ?es par le premier de ?cret,
nonobstant le contenu de la de ?cision du tribunal d’application des
peines de Florence.

 Le 23 aou ?t 1994, l’avocat du reque ?rant pre ?senta une instance au
ministe ?re de la Justice faisant valoir que le dispositif de
l’ordonnance du tribunal d’application des peines de Florence du 24 mai
1994 devait s’appliquer e ?galement a ? la dernie ?re prorogation de
l’application du re ?gime pre ?vu par l’article 41bis. A la me ?me date,
l’avocat de ?posa e ?galement un recours ("reclamo") a ? l’encontre de cette
dernie ?re de ?cision.

 Dans une note date ?e du 31 aou ?t 1994 et envoye ?e a ? plusieurs
autorite ?s, parmi lesquelles figuraient le ministre de la Justice et le
directeur ge ?ne ?ral du de ?partement de l’administration pe ?nitentiaire, le
pre ?sident du tribunal d’application des peines de Florence souligna que
l’administration e ?tait lie ?e par les de ?cisions des tribunaux et que la
prorogation par l’administration de l’application des mesures de ?clare ?es
ille ?gales par l’autorite ? judiciaire e ?tait inadmissible.

2. La censure de la correspondance du reque ?rant

 De ?s le 21 avril 1992, la correspondance du reque ?rant fut soumise
a ? un visa de censure sur de ?cision du tribunal de Trapani, qui ne
contenait pas de motivation spe ?cifique. Cependant, la correspondance
du reque ?rant ne fut pas contro ?le ?e pendant qu’il se trouvait dans la
prison de Termini Imerese.

 Le contro ?le de la correspondance du reque ?rant fut par la suite
ordonne ? e ?galement par le de ?cret du ministe ?re de la Justice du
20 juillet 1992, appliquant au reque ?rant pour la premie ?re fois le
re ?gime pre ?vu par l’article 41bis.

 Les courriers suivants furent en conse ?quence soumis a ? un visa de
censure :

a) lettre du reque ?rant a ? son e ?pouse, date ?e du 21 octobre 1992 ; la
 remise de cette lettre fut retarde ?e par la prison de Pianosa
 puisqu’en raison de son contenu, juge ? suspect par l’autorite ?
 pe ?nitentiaire, elle avait e ?te ? pre ?alablement envoye ?e a ? l’autorite ?
 judiciaire ;

b) lettre envoye ?e au reque ?rant par un premier avocat, date ?e du 7 mai
 1993 (visa de censure de la prison de Pianosa) ;

c) lettre envoye ?e par le reque ?rant a ? sa famille, date ?e du 28 fe ?vrier
 1993 (visa de censure de la prison de Termini Imerese) ;

d) lettre envoye ?e par le reque ?rant a ? sa famille, le cachet de la
 poste indiquant le 7 mai 1993 (visa de censure de la prison de
 Pianosa).

 Dans cette dernie ?re lettre, le reque ?rant mentionne notamment le
fait que lors du pre ?ce ?dent envoi a ? son e ?pouse d’une lettre accompagne ?e
d’un certificat, celle-ci aurait rec ?u uniquement le certificat et non
pas la lettre, qui aurait e ?te ? retenue par la prison. En fait, il
ressort d’une note de la prison de Termini Imerese que le 2 mars 1993
cette dernie ?re prison avait remis au de ?partement de l’administration
pe ?nitentiaire du ministe ?re de la Justice une lettre du reque ?rant, qui
selon la prison contenait des informations probablement calomnieuses
envers la prison, en demandant l’autorisation pour la remise de cette
lettre au reque ?rant. Cette demande n’eut aucune suite et la lettre ne
fut en conse ?quence pas remise au reque ?rant.

 Suite a ? l’arre ?t de la Cour constitutionnelle n° 349 du 28 juillet
1993 (voir infra, "Droit interne applicable", section "a."), par de ?cret
du 15 septembre 1993 le ministe ?re de la Justice re ?voqua la mesure du
contro ?le de la correspondance contenue dans ses de ?crets d’application
de l’article 41bis.

 La correspondance du reque ?rant continua toutefois d’e ?tre
contro ?le ?e en vertu de la de ?cision du tribunal de Trapani du 21 avril
1992.

 Le 21 fe ?vrier 1994, le tribunal de Trapani ordonna la re ?vocation
du visa de censure sur la correspondance du reque ?rant. A partir de
cette date et jusqu’au 10 juin 1994, la correspondance du reque ?rant fut
ne ?anmoins contro ?le ?e, en l’absence de toute de ?cision l’autorisant
conforme ?ment a ? la loi.

 Le 12 mai 1994, alors qu’il se trouvait dans la prison de Termini
Imerese, le reque ?rant demanda que sa correspondance soit soumise de
nouveau a ? un visa de censure, compte tenu du fait que l’autorite ?
judiciaire avait suspendu l’application du visa de censure. Dans cette
demande, qui fut verbalise ?e a ? la pre ?sence de deux gardiens de la
prison, le reque ?rant pre ?cisa qu’il autorisait la direction de la prison
a ? soumettre sa correspondance a ? un visa de censure afin d’e ?tre admis
a ? fre ?quenter d’autres de ?tenus face a ? la possibilite ? d’e ?tre enferme ? seul
avec interdiction de rencontrer d’autres de ?tenus.

 Du 10 juin 1994 au 3 aou ?t 1994, la correspondance ne fut pas
contro ?le ?e, suite a ? une de ?cision de la direction de la prison. En effet,
le 10 juin 1994, la direction de la prison de Termini Imerese avait
ordonne ? que le reque ?rant soit a ? nouveau soumis au re ?gime normal de
de ?tention, ce qui entrai ?nait notamment la suppression du visa de
censure et la possibilite ? de be ?ne ?ficier de quatre visites par mois.

 Cependant, pendant cette me ?me pe ?riode au moins la lettre suivante
fit ne ?anmoins l’objet d’un visa de censure :

- lettre envoye ?e au reque ?rant par son e ?pouse, date ?e du 28 juillet
 1994 (visa de la prison de Pianosa).

 Le visa de censure ne s’appuya a ? nouveau sur une de ?cision
formelle qu’a ? partir du 13 aou ?t 1994, lorsque sur demande de la
direction de la prison de Pianosa cette mesure fut ordonne ?e par
de ?cision du pre ?sident de la section criminelle du tribunal de Trapani,
qui ne contenait pas de motivation spe ?cifique. Apre ?s cette de ?cision,
les lettres suivantes furent contro ?le ?es :

a) lettre envoye ?e au reque ?rant par un deuxie ?me avocat, date ?e du
 24 aou ?t 1994 (visa de la prison de Pianosa) ;

b) lettres envoye ?es au reque ?rant par son e ?pouse, date ?es
 respectivement des 18, 21, 29 et 30 aou ?t 1994 et contenant deux
 photos des enfants du reque ?rant, portant chacune le cachet du
 visa de censure (visa de la prison de Pianosa) ;

c) lettre envoye ?e par le reque ?rant a ? sa famille, date ?e du 31 aou ?t
 1994 (visa de la prison de Pianosa) ;

d) lettre envoye ?e au reque ?rant par ses enfants, date ?e du
 1er septembre 1994 (visa de la prison de Pianosa) ;

e) lettre envoye ?e au reque ?rant par sa petite fille, date ?e du
 16 octobre 1994 (visa de censure illisible) ;

f) lettres envoye ?es au reque ?rant par son e ?pouse, date ?es
 respectivement des 18 et 20 octobre 1994 (visa de la prison de
 Termini Imerese) ;

g) lettre envoye ?e au reque ?rant apparemment par des membres de sa
 famille, date ?e du 20 octobre 1994 (visa de la prison de Termini
 Imerese).

 Il faut ajouter e ?galement une lettre, non date ?e, envoye ?e au
reque ?rant par sa petite fille (visa de la prison de Pianosa).

 En revanche, la lettre envoye ?e par le reque ?rant a ? sa famille le
26 septembre 1994, apparemment depuis une prison de Rome, ne porte pas
de visa de censure.

 Quant a ? la correspondance du reque ?rant avec son avocat, la
direction de la prison de Pianosa a pre ?cise ? qu’aucune des deux lettres
soumises au visa de censure n’e ?tait reconnaissable comme concernant la
correspondance avec le de ?fenseur au sens de l’article 35 des
dispositions transitoires du nouveau Code de proce ?dure pe ?nale italien
(voir infra, "Droit interne applicable", section "b.").

 Les mesures de pre ?vention applique ?es au reque ?rant apre ?s son
 acquittement

 Par de ?cret du 10 mai 1993, le tribunal de Trapani, section
compe ?tente en matie ?re de mesures de pre ?vention, de ?cida d’appliquer a ?
l’encontre du reque ?rant une se ?rie de mesures de pre ?vention pendant une
pe ?riode de trois ans. Le tribunal conside ?ra en particulier que des
indices concrets, tels la participation du reque ?rant, en me ?me temps que
d’autres personnes soupc ?onne ?es d’appartenir a ? la mafia locale, dans la
socie ?te ? ge ?rant une discothe ?que ou ? se rencontraient des mafieux, ainsi
que les poursuites engage ?es a ? son encontre, prouvaient sa dangerosite ?.
En particulier, le reque ?rant e ?tait oblige ? :

a) de ne pas s’e ?loigner de sa re ?sidence sans avoir pre ?venu
 l’autorite ? charge ?e de le surveiller ;

b) de vivre honne ?tement ;

c) de ne pas susciter des soupc ?ons ;

d) de ne pas s’associer a ? des personnes ayant fait l’objet d’une
 condamnation ou soumises a ? des mesures de pre ?vention ou de
 su ?rete ? ;

e) de ne pas rentrer chez soi apre ?s 20h00 et de ne pas en sortir
 avant 6h00, sauf pour des motifs de ne ?cessite ? du ?ment prouve ?s et
 en tout cas apre ?s avoir pre ?venu l’autorite ? charge ?e de le
 surveiller ;

f) de ne pas de ?tenir ou porter d’armes ;

g) de ne pas fre ?quenter des bistrots et de ne pas participer a ? des
 re ?unions publiques ;

h) de porter toujours sur soi la carte indiquant les obligations
 spe ?cifiques re ?sultant des mesures de pre ?vention applique ?es a ? son
 encontre, ainsi qu’une copie du de ?cret du tribunal ;

i) de se pre ?senter au bureau de police compe ?tent chaque dimanche
 entre 9h00 et 12h00.

 Le reque ?rant e ?tait e ?galement oblige ? de verser 5 millions de lires
(environ 15 000 FF) au be ?ne ?fice de la caisse des amendes.

 Selon le reque ?rant, on lui aurait e ?galement retire ? son passeport,
son permis de conduire et sa carte d’identite ? valable pour sortir du
pays.

 En revanche, le tribunal estima qu’en l’e ?tat du dossier il
n’e ?tait pas possible de conclure que ladite socie ?te ? servait de canal
de recyclage d’argent sale provenant des activite ?s illicites de la
mafia. Il ordonna par conse ?quent la se ?paration de la proce ?dure
concernant la saisie des quotes-parts du reque ?rant dans la socie ?te ? en
question ainsi que de certains de ses biens immobiliers.

 Le reque ?rant interjeta appel mais il en fut de ?boute ? le 7 de ?cembre
1993. Son pourvoi en cassation fut e ?galement rejete ? par arre ?t du
3 octobre 1994.

 Suite a ? l’application de ces mesures, la Commission e ?lectorale
municipale d’Alcamo de ?cida, le 10 janvier 1995, de rayer le reque ?rant
des listes e ?lectorales pour de ?che ?ance de sa capacite ? e ?lectorale, en
application de l’article 32 du D.P.R. n° 223 du 20 mars 1967.

 Le reque ?rant saisit alors en appel, conforme ?ment a ? la loi, la
Commission e ?lectorale de circonscription, se plaignant avant tout de
l’absence de motivation de la de ?cision de la commission e ?lectorale
municipale et faisant valoir que si la de ?cision de le rayer des listes
e ?lectorales e ?tait due a ? l’application des mesures de pre ?vention,
celles-ci avaient e ?te ? prises sur la base de son arrestation pour
association de type mafieux et l’on ne pouvait ne pas tenir compte du
fait qu’il avait entre-temps e ?te ? relaxe ?. Ce recours fut cependant
rejete ?.

 Le 13 fe ?vrier 1996, le reque ?rant fut de ?boute ? d’une demande
d’autorisation a ? quitter Alcamo pour accompagner son e ?pouse et l’un de
ses fils a ? l’ho ?pital de Palerme, ou ? ceux-ci devaient effectuer des
examens me ?dicaux. Le tribunal de Trapani, section compe ?tente en matie ?re
de mesures de pre ?vention, estima en effet que les examens me ?dicaux en
question ne portaient pas sur des maladies graves et que par
conse ?quent, les membres de la famille du reque ?rant concerne ?s auraient
bien pu s’y rendre seuls.

 Entre-temps, le 8 janvier 1996 le reque ?rant avait demande ? au
tribunal de Trapani, section des mesures de pre ?vention, la re ?vocation
des mesures de pre ?vention prises a ? son encontre, faisant valoir
notamment le fait d’avoir e ?te ? de ?sormais de ?finitivement acquitte ? et se
plaignant de l’impossibilite ? de retrouver un emploi.

 Le 11 juin 1996, le tribunal de ?bouta le reque ?rant de sa demande.
Il rappela tout d’abord la jurisprudence constante de la Cour de
cassation, selon laquelle les faits e ?tablis au cours d’un proce ?s, bien
qu’insuffisants pour fonder la condamnation du pre ?venu, pouvaient tout
de me ?me constituer, avec e ?ventuellement d’autres e ?le ?ments a ? l’appui,
des indices significatifs de nature a ? prouver le caracte ?re dangereux
du pre ?venu acquitte ?. Selon le tribunal, tel e ?tait le cas en l’espe ?ce,
en tenant compte du fait que des de ?clarations faites par B.F. il
ressortait que le reque ?rant e ?tait proche du clan mafieux d’Alcamo,
comme le prouvait le fait que son beau-fre ?re de ?ce ?de ? avait e ?te ? le chef
du clan dominant. Quant a ? l’impossibilite ? de retrouver un emploi, le
tribunal estima que ce fait n’e ?tait aucunement lie ? aux mesures de
pre ?vention, e ?tant donne ? qu’a ? tout moment le reque ?rant aurait pu
demander une permission de travailler, a ? condition bien entendu que le
travail soit compatible avec les prescriptions de ?coulant des mesures
de pre ?vention.

 Droit interne applicable

a. L’article 41bis de la loi n° 354 de 1975

 L’article 41bis de la loi sur l’administration pe ?nitentiaire (loi
n° 354 du 26 juillet 1975), tel qu’il a e ?te ? modifie ? par la loi n° 356
du 7 aou ?t 1992, attribue au ministre de la Justice le pouvoir de
suspendre comple ?tement ou partiellement l’application du traitement
normal des de ?tenus, tel que pre ?vu par la loi n° 354 de 1975, par de ?cret
motive ? et contro ?lable par l’autorite ? judiciaire, pour des raisons
d’ordre et de se ?curite ? publique, lorsque le re ?gime normal de la
de ?tention serait en conflit avec ces dernie ?res exigences. Pareille
disposition peut e ?tre applique ?e uniquement a ? l’e ?gard des de ?tenus
poursuivis ou condamne ?s pour les de ?lits indique ?s a ? l’article 4bis de
la me ?me loi, parmi lesquels figurent des de ?lits lie ?s aux activite ?s de
la mafia. Il est pre ?vu que la disposition en question demeure en
vigueur jusqu’en 1999.

 En pratique, l’article 41bis impose un re ?gime de de ?tention
particulie ?rement se ?ve ?re et poursuit notamment le but de couper tout
lien entre la personne concerne ?e et son milieu mafieux ou criminel
d’origine. En effet, il est arrive ? a ? plusieurs reprises que des chefs
mafieux aient continue ? a ? communiquer avec l’exte ?rieur et a ? transmettre
des ordres me ?me en e ?tant de ?tenus. Cette disposition constitue
actuellement l’un des instruments principaux dans la lutte contre la
mafia a ? la disposition des autorite ?s italiennes.

 L’article 41bis ne contient aucune liste des restrictions
autorise ?es, qui doit e ?tre e ?tablie par de ?cret du ministre de la Justice.
Au de ?but de son application, cette disposition a e ?te ? interpre ?te ?e comme
attribuant e ?galement, au ministre de la Justice, le pouvoir d’appliquer
un visa de censure sur la correspondance du de ?tenu.

 La Cour constitutionnelle italienne a e ?te ? saisie de la question
de savoir si le principe du domaine re ?serve ? au le ?gislateur est respecte ?
par un tel syste ?me. La Cour constitutionnelle (dans ses arre ?ts n° 349
et 410 de 1993) a estime ? que l’article 41bis est compatible avec la
Constitution. Elle a en effet conside ?re ? que s’il est vrai que le re ?gime
spe ?cial de de ?tention au sens de la disposition en question est
concre ?tement e ?tabli par le ministre, le de ?cret de ce dernier peut
ne ?anmoins e ?tre attaque ? devant les juges d’application des peines, qui
exercent un contro ?le tanto ?t sur sa ne ?cessite ?, tanto ?t sur les mesures
concre ?tes devant e ?tre applique ?es au de ?tenu concerne ? lesquelles en tout
cas, ne peuvent jamais aboutir a ? un traitement inhumain.

 Cependant, la Cour constitutionnelle a pre ?cise ?, se fondant sur
l’article 15 de la Constitution, qui pre ?voit notamment que les
restrictions a ? la correspondance peuvent avoir lieu uniquement par acte
motive ? de l’autorite ? judiciaire, que le pouvoir de soumettre la
correspondance d’un de ?tenu a ? un visa de censure appartient
exclusivement a ? l’autorite ? judiciaire. Par conse ?quent, l’article 41bis
ne peut e ?tre interpre ?te ? comme incluant le pouvoir, pour le ministre de
la Justice, de prendre des mesures a ? l’e ?gard de la correspondance des
de ?tenus.

 Toutefois, la Cour de cassation avait pour sa part conside ?re ? que
les tribunaux d’application des peines devaient se limiter a ? contro ?ler
la le ?gitimite ? du de ?cret du ministe ?re en tant que tel, sans pouvoir se
substituer a ? l’administration dans le choix des modalite ?s d’application
concre ?tes. En revanche, dans la pratique les tribunaux d’application
des peines e ?taient alle ?s jusqu’a ? contro ?ler la conformite ? de chaque
mesure concre ?te par rapport au but poursuivi par l’administration. Il
s’en est ensuivi que souvent les de ?cisions des tribunaux d’application
des peines sont reste ?es inexe ?cute ?es, ce qui a donne ? lieu a ? des conflits
entre ces tribunaux et l’autorite ? administrative.

 Ce n’est enfin que par arre ?t n° 351 des 14 - 18 octobre 1996 que
la Cour constitutionnelle a e ?tabli que le pouvoir de contro ?le des
tribunaux d’application des peines s’e ?tend aux modalite ?s concre ?tes
d’application de la mesure, a ? la fois par rapport au but poursuivi et
a ? la lumie ?re des droits fondamentaux garantis par la Constitution. La
Cour de cassation avait d’ailleurs change ? d’orientation a ? cet e ?gard
avant me ?me l’arre ?t de la Cour constitutionnelle, en admettant la
possibilite ? pour le juge d’application des peines de re ?voquer
l’application, totalement ou partiellement, des mesures ille ?gitimes
(voir arre ?ts n° 6873 du 12 fe ?vrier 1996 et 684 du 1er mars 1996).

b. Dispositions pertinentes en matie ?re de contro ?le de la
 correspondance

 Selon l’article 18 de la loi n° 354 du 26 juillet 1975, tel qu’il
a e ?te ? modifie ? par l’article 2 de la loi n° 1 du 12 janvier 1977,
l’autorite ? compe ?tente a ? de ?cider en matie ?re de visa de censure sur la
correspondance des de ?tenus est le juge saisi de l’affaire, qu’il
s’agisse de la juridiction d’instruction ou de la juridiction de
jugement, jusqu’au jugement de premie ?re instance, et le juge
d’application des peines pendant le de ?roulement ulte ?rieur de la
proce ?dure. Cette disposition pre ?voit e ?galement que le magistrat
compe ?tent peut ordonner le contro ?le de la correspondance d’un de ?tenu
par de ?cision motive ?e, sans toutefois pre ?ciser les cas dans lesquels une
telle de ?cision peut e ?tre prise.

 Le visa de censure dont se plaint le reque ?rant consiste
concre ?tement en l’interception et la lecture par l’autorite ? judiciaire
qui l’a ordonne ?, par le directeur de la prison ou par le personnel
pe ?nitentiaire de ?signe ? par ce dernier, de toute la correspondance du
de ?tenu qui fait l’objet d’une telle mesure, ainsi qu’en l’apposition
d’un cachet sur les lettres, qui sert a ? prouver la re ?alite ? dudit
contro ?le (voir e ?galement l’article 36 du Re ?glement d’exe ?cution de la
loi n° 354 ci-dessus, e ?mis par le D.P.R. n° 431 du 29 avril 1976).
Cette mesure de contro ?le ne peut pas re ?sulter en l’effacement de mots
ou de phrases, mais suite au contro ?le l’autorite ? judiciaire peut
ordonner qu’une ou plusieurs lettres ne soient pas remises. Dans ce
cas, le de ?tenu doit en e ?tre aussito ?t informe ?. Cette dernie ?re mesure
peut e ?galement e ?tre ordonne ?e provisoirement par le directeur de la
prison, qui doit toutefois en donner communication a ? l’autorite ?
judiciaire.

 Par ailleurs, l’article 103 du nouveau Code de proce ?dure pe ?nale
italien, entre ? en vigueur le 24 octobre 1989, interdit la saisie et
toute forme de contro ?le de la correspondance entre un de ?tenu et son
de ?fenseur, a ? condition qu’elle soit reconnaissable comme telle et sauf
dans le cas ou ? l’autorite ? judiciaire ait des motifs fonde ?s de croire
que cette correspondance constitue le corps du de ?lit. L’article 35 des
dispositions transitoires du nouveau Code de proce ?dure pe ?nale dispose
e ?galement que les dispositions relatives au visa de censure sur la
correspondance d’un de ?tenu pre ?vues par la loi n° 354 et le D.P.R.
n° 431 pre ?cite ?s, ne s’appliquent pas a ? la correspondance entre le
de ?tenu et son de ?fenseur. Cependant, pour que la correspondance avec
l’avocat puisse be ?ne ?ficier de l’exemption de tout contro ?le l’enveloppe
doit indiquer les ge ?ne ?ralite ?s du pre ?venu, celles de l’avocat ainsi que
la qualification professionnelle de ce dernier et la mention
"correspondance pour des raisons de justice" ("corrispondenza per
ragioni di giustizia"). En outre, cette dernie ?re mention doit e ?tre
signe ?e par l’expe ?diteur, lequel doit e ?galement pre ?ciser a ? quelle
proce ?dure se re ?fe ?re la lettre. Si l’expe ?diteur est l’avocat, sa
signature doit e ?tre certifie ?e conforme par le pre ?sident du barreau ou
son de ?le ?gue ?. En l’absence de ces indications, prescrites par
l’article 35 pre ?cite ? des dispositions transitoires, l’interdiction de
contro ?ler la correspondance avec le de ?fenseur ne s’applique pas.

 Enfin, quant aux recours disponibles contre la mesure incrimine ?e,
la Cour de cassation italienne a soutenu dans plusieurs de ?cisions que
la mesure litigieuse constitue en effet un acte de nature
administrative. Elle a par ailleurs affirme ?, dans une jurisprudence
constante et bien e ?tablie, que la loi italienne ne pre ?voit pas de voies
de recours a ? cet e ?gard, la mesure en question ne pouvant non plus faire
l’objet d’un recours en cassation, car elle ne concerne pas la liberte ?
personnelle du de ?tenu (Cour de cassation italienne : arre ?ts n° 3141 du
14 fe ?vrier 1990 et 4687 du 4 fe ?vrier 1992).

c. Dispositions pertinentes en matie ?re de dure ?e de la de ?tention
 provisoire

 Le premier paragraphe de l’article 273 du Code de proce ?dure
pe ?nale italien pre ?voit que "nul ne peut e ?tre soumis a ? des mesures de
de ?tention provisoire s’il n’y a pas a ? sa charge de graves indices de
culpabilite ?".

 L’article 274 pre ?voit ensuite que des mesures de de ?tention
provisoire peuvent e ?tre prises :

 "a) en pre ?sence d’exigences ine ?luctables ayant trait a ? l’enque ?te,
en relation avec des situations de danger concret pour l’administration
ou l’authenticite ? de la preuve ;

 b) quand l’inculpe ? s’est enfui ou il y a un danger concret de
fuite, a ? condition que le juge estime qu’une peine supe ?rieure a ? deux
ans d’emprisonnement puisse e ?tre inflige ?e ;

 c) quand, pour les modalite ?s spe ?cifiques et les circonstances des
faits et compte tenu de la personnalite ? de l’inculpe ?, il y a un danger
concret que celui-ci commette de graves de ?lits par l’usage d’armes ou
d’autres moyens de violence contre les personnes, ou des de ?lits contre
l’ordre constitutionnel, ou des de ?lits en rapport avec le crime
organise ?, ou encore des de ?lits du me ?me type que ceux reproche ?s a ?
l’inculpe ?."

 Selon l’article 275 par. 3, tel qu’il a e ?te ? modifie ? par les
de ?crets-lois n° 152 de 1991, converti en la loi n° 203 de 1991, et 292
de 1991, converti en la loi n° 356 de 1991, l’existence de ces
exigences est pre ?sume ?e pour certains de ?lits particulie ?rement graves,
parmi lesquels figure celui reproche ? au reque ?rant, sauf s’il y a des
e ?le ?ments de ?montrant le contraire.

 L’article 303 pre ?voit des de ?lais maxima de de ?tention provisoire
en fonction de l’e ?tat de la proce ?dure. Etant donne ? que le reque ?rant
e ?tait poursuivi pour le de ?lit pre ?vu par l’article 416bis du Code pe ?nal,
les de ?lais qui e ?taient applicables a ? sa situation au cours de la
proce ?dure en premie ?re instance sont les suivants :

- un an du de ?but de la de ?tention jusqu’a ? la de ?cision disposant le
 proce ?s ;

- un an du de ?but du proce ?s jusqu’au jugement de condamnation en
 premie ?re instance.

 L’article 303 dispose en particulier que si avant l’e ?che ?ance de
ces de ?lais n’ont pas e ?te ? e ?mis respectivement la de ?cision disposant le
de ?but du proce ?s ou le jugement de condamnation de premie ?re instance,
la de ?tention provisoire cesse d’e ?tre le ?gale et l’inculpe ? doit e ?tre mis
en liberte ?.

 Cependant, le par. 2 de l’article 304 pre ?voit que les de ?lais
prescrits par l’article 303 peuvent e ?tre suspendus au cours du proce ?s,
s’agissant de certains de ?lits parmi lesquels figure celui pre ?vu par
l’article 416bis du Code pe ?nal, si les de ?bats se re ?ve ?lent
particulie ?rement complexes, et cela pendant la pe ?riode ou ? se tiennent
les audiences ou ? le jugement de premie ?re instance est de ?libe ?re ?, ou
encore pendant la proce ?dure d’appel. L’article 304 dispose que la dure ?e
de la de ?tention provisoire ne peut en tout cas de ?passer les deux tiers
du maximum de la peine pre ?vue pour le de ?lit reproche ? a ? l’inculpe ? ou
inflige ?e par le jugement de premie ?re instance.

 D’autre part, le par. 2 de l’article 305 dispose qu’"au cours de
l’enque ?te pre ?liminaire, le ministe ?re public peut demander la
prorogation des de ?lais de de ?tention provisoire touchant a ? leur
e ?che ?ance, en pre ?sence de graves exigences de pre ?caution qui, dans le
cadre d’activite ?s d’instruction particulie ?rement complexes, rendent
indispensable la continuation de la de ?tention provisoire". Cette
disposition pre ?voit ensuite que pareille prorogation ne peut e ?tre
renouvele ?e qu’une seule fois et qu’en tout cas, les de ?lais pre ?vus par
l’article 303 ne peuvent pas e ?tre de ?passe ?s de plus de la moitie ?.

 Enfin, quant aux formalite ?s de mise en liberte ?, il est a ? noter
qu’en date du 29 mars 1996, le ministe ?re de la Justice a informe ? tous
les e ?tablissements pe ?nitentiaires de la ne ?cessite ? d’assurer certains
services administratifs me ?me de nuit, en vue de rendre possible non
seulement la mise en liberte ? de de ?tenus, mais aussi, entre autres,
l’accueil de personnes arre ?te ?es ou s’e ?tant pre ?sente ?es spontane ?ment, ou
encore l’hospitalisation d’urgence de de ?tenus.

d. Dispositions pertinentes en matie ?re de mesures de pre ?vention de
 nature personnelle

 Les mesures de pre ?vention ont e ?te ? institue ?es par la loi n° 1423
du 27 de ?cembre 1956. L’article 3 de cette loi permet de placer sous la
surveillance spe ?ciale de la police des personnes dangereuses pour la
se ?curite ? et pour la moralite ? publique. La mesure de la surveillance
peut e ?tre assortie au besoin soit de l’interdiction de se ?journer dans
telle(s) commune(s) ou province(s) soit, si ces personnes pre ?sentent
un danger particulier, d’une assignation a ? re ?sidence dans une commune
de ?termine ?e ("obbligo di soggiorno").

 Ces mesures rele ?vent de la compe ?tence exclusive du tribunal du
chef-lieu de la province. Le tribunal statue en chambre du conseil et
par une de ?cision motive ?e, apre ?s avoir entendu le ministe ?re public et
l’inte ?resse ? qui peut pre ?senter des me ?moires et se faire assister par
un avocat ou avoue ?. Le parquet et l’inte ?resse ? peuvent interjeter appel
dans les dix jours, sans effet suspensif. La de ?cision de la cour
d’appel peut a ? son tour faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

 Lorsqu’il adopte l’une des mesures e ?nume ?re ?es a ? l’article 3, le
tribunal en pre ?cise la dure ?e - qui peut aller d’un an a ? un maximum de
cinq ans - et fixe les re ?gles a ? observer par la personne en question.

 La loi n° 575 du 31 mai 1965, amende ?e en 1982, comple ?te la
premie ?re loi de 1956 par des dispositions spe ?cifiques dirige ?es contre
les personnes soupc ?onne ?es d’appartenir a ? des groupes mafieux.

 La loi n° 327 du 3 aou ?t 1988 a supprime ? la possibilite ?
d’incarce ?rer l’inte ?resse ? pendant l’examen de la demande d’assignation
a ? re ?sidence. En outre, la mesure d’assignation a ? re ?sidence doit
de ?sormais e ?tre exe ?cute ?e dans la commune ou ? la personne concerne ?e a son
domicile ou sa re ?sidence.

 Enfin, la loi n° 55 du 19 mars 1990 pre ?voit que le juge a la
faculte ? de suspendre la proce ?dure relative a ? l’application de mesures
de pre ?vention lorsqu’un proce ?s pe ?nal est pendant et jusqu’a ? l’issue de
ce dernier.

e. Disposition pertinente en matie ?re de radiation des listes
 e ?lectorales

 L’article 32, par. 1 (3), du D.P.R. 223 de 1967 dispose qu’en cas
de de ?che ?ance de la capacite ? e ?lectorale suite notamment a ? une de ?cision
de l’autorite ? judiciaire ou de police imposant des mesures de
pre ?vention, le pre ?fet de police ("questore") compe ?tent pour exe ?cuter
pareilles mesures envoie une certification des de ?cisions entrai ?nant la
perte de capacite ? e ?lectorale a ? la commune de re ?sidence. La commission
e ?lectorale constitue ?e pre ?s cette dernie ?re commune proce ?dera alors a ? la
radiation de la personne concerne ?e des listes e ?lectorales, me ?me en
dehors de la pe ?riode normale de re ?vision desdites listes.

GRIEFS

1. Le reque ?rant se plaint en premier lieu de la violation de
l’article 3 de la Convention en raison des mauvais traitements, de
nature a ? la fois psychique et physique, qu’il alle ?gue avoir subis dans
la prison de Pianosa, ainsi que lors des transfe ?rements d’une prison
a ? l’autre.

2. Il se plaint en deuxie ?me lieu d’une violation de l’article 8 de
la Convention en raison du fait que sa vie familiale pendant sa
de ?tention a e ?te ? grie ?vement affecte ?e. En effet, le re ?gime de de ?tention
auquel il e ?tait soumis ne lui permettait de voir sa famille, y compris
ses enfants, qu’une seule fois par mois et pendant uniquement une
heure. En outre, les rencontres, me ?me celles avec ses enfants, e ?taient
rendues extre ?mement difficiles et pe ?nibles par la pre ?sence d’une
barrie ?re en verre, qui empe ?chait tout contact physique, en particulier
entre le reque ?rant et ses enfants, et en outre par le fait que les
communications orales n’e ?taient possibles que par le biais d’un
hygiaphone.

3. Le reque ?rant se plaint ensuite du visa de censure auquel a e ?te ?
soumise sa correspondance avec sa famille et avec son avocat. Quant a ?
la correspondance avec son de ?fenseur, le reque ?rant alle ?gue e ?galement
une violation des droits de la de ?fense et invoque l’article 6 de la
Convention.

4. Le reque ?rant se plaint en outre de la dure ?e de sa de ?tention.

5. Le reque ?rant alle ?gue e ?galement que nonobstant le fait d’avoir e ?te ?
acquitte ? le 12 novembre 1994, il n’a e ?te ? remis en liberte ? que le
lendemain. A cet e ?gard, il invoque l’article 5 de la Convention.

6. Le reque ?rant se plaint par ailleurs du fait que nonobstant son
acquittement, il a fait l’objet d’une se ?rie de mesures de pre ?vention.
Le reque ?rant se plaint en particulier de ce que ces mesures entravent
sa re ?insertion dans la socie ?te ? civile en limitant notamment sa liberte ?
de mouvement et en re ?duisant ses chances de trouver un travail.

7. Il se plaint ensuite d’une violation de l’article 6 de la
Convention au motif qu’il a e ?te ? empe ?che ? de confe ?rer avec ses de ?fenseurs
et de pre ?parer sa de ?fense, a ? cause des conditions de de ?tention dans la
prison de Pianosa et de l’application a ? son encontre du re ?gime spe ?cial
de de ?tention pre ?vu par l’article 41bis de la loi n° 354 de 1975.

8. Le reque ?rant se plaint enfin de la dure ?e de la proce ?dure, en
invoquant l’article 6 de la Convention.

 PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

 La reque ?te a e ?te ? introduite le 10 avril 1994 et enregistre ?e le
21 mars 1995.

 Des renseignements pre ?liminaires ont e ?te ? fournis par le
Gouvernement de ?fendeur le 23 fe ?vrier 1996. Le reque ?rant a pre ?sente ? des
commentaires le 7 mai 1996.

 Le 21 octobre 1996, la Commission a de ?cide ? de porter la reque ?te
a ? la connaissance du Gouvernement de ?fendeur, en l’invitant a ? pre ?senter
par e ?crit ses observations sur la recevabilite ? et le bien-fonde ? de la
reque ?te.

 Le Gouvernement a pre ?sente ? ses observations les 19 fe ?vrier,
7 mars et 16 juin 1997, apre ?s prorogation du de ?lai imparti, et le
reque ?rant a fait parvenir les siennes le 24 avril 1997.

 Par ailleurs, le 7 mars 1997 la Commission avait de ?cide ?
d’accorder au reque ?rant le be ?ne ?fice de l’assistance judiciaire.

EN DROIT

1. Le reque ?rant se plaint en premier lieu de la violation de
l’article 3 (art. 3) de la Convention en raison des mauvais
traitements, de nature a ? la fois psychique et physique, qu’il alle ?gue
avoir subis dans la prison de Pianosa, ainsi que lors des
transfe ?rements d’une prison a ? l’autre.

 Selon l’article 3 (art. 3) de la Convention, "nul ne peut e ?tre
soumis a ? la torture ni a ? des peines ou traitements inhumains ou
de ?gradants".

 Quant aux transfe ?rements d’une prison a ? l’autre, le Gouvernement,
se fondant sur les relations du juge d’application des peines de
Libourne a ? l’e ?poque des faits et du pre ?sident du tribunal d’application
des peines de Florence, reconnai ?t qu’ils se sont de ?roule ?s dans des
conditions discutables. Le Gouvernement souligne ne ?anmoins le climat
extre ?mement tendu de cette pe ?riode, apre ?s les attentats qui avaient
cou ?te ? la vie a ? deux hauts magistrats, l’e ?pouse de l’un des deux et les
agents de leurs escortes respectives. Par ailleurs, le Gouvernement
pre ?cise que l’enque ?te ouverte a ? la suite du rapport du juge
d’application des peines est toujours en cours.

 Pour ce qui concerne plus particulie ?rement les traitements
pre ?tendument subis par le reque ?rant, le Gouvernement fait valoir qu’il
s’agit d’actes imputables a ? des initiatives individuelles de la part
de certains gardiens de prison et certainement pas le re ?sultat d’une
politique pe ?nitentiaire ge ?ne ?rale. Aucune responsabilite ?, selon le
Gouvernement, ne saurait de ?s lors e ?tre impute ?e a ? l’Etat, qui par le
biais de ses organes judiciaires a tout mis en oeuvre pour trouver les
coupables, lesquels malheureusement n’ont pas pu e ?tre identifie ?s.

 Par ailleurs, dans une note du 12 de ?cembre 1996, annexe ?e aux
observations du Gouvernement, le pre ?sident du tribunal d’application
des peines de Florence pre ?cise que les faits ayant eu lieu dans la
prison de Pianosa avaient e ?te ? voulus ou tole ?re ?s par le Gouvernement en
poste a ? l’e ?poque. Plus particulie ?rement, celui-ci estime que les
transfe ?rements des de ?tenus a ? la prison de Pianosa ont e ?te ? effectue ?s
suivant des me ?thodes discutables et injustifie ?es, visant en re ?alite ? a ?
intimider les de ?tenus, alors que l’autorite ? de l’Etat aurait pu e ?tre
mieux re ?affirme ?e par des me ?thodes correctes. Selon lui, les alle ?gations
du reque ?rant concernant les modalite ?s des transfe ?rements sont tout a ?
fait vraisemblables. Il souligne en outre que la section de haute
se ?curite ? de la prison de Pianosa fut mise en place en faisant appel a ?
des gardiens provenant d’autres prisons, qui n’avaient pas e ?te ? soumis
a ? une se ?lection et qui avaient rec ?u carte blanche. Le re ?sultat,
poursuit le pre ?sident de ce tribunal, a e ?te ? que la gestion de la
section en question a e ?te ? dans un premier moment caracte ?rise ?e par des
abus et des irre ?gularite ?s, ce qui e ?tait ine ?vitable, a ? son avis, compte
tenu de la manie ?re dont elle avait e ?te ? re ?alise ?e.

 Pour sa part, le reque ?rant se borne a ? observer que les e ?le ?ments
ressortant des observations du Gouvernement, et en particulier du
rapport du juge d’application des peines de Libourne date ? du
12 de ?cembre 1996 et annexe ? a ? celles-ci, constituent une admission de
ses alle ?gations.

 La Commission estime que sur ce point la reque ?te soule ?ve des
questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent e ?tre re ?solues
a ? ce stade de l’examen de la reque ?te, mais ne ?cessitent un examen au
fond. De ?s lors, cette partie de la reque ?te ne saurait e ?tre de ?clare ?e
manifestement mal fonde ?e en application de l’article 27 par. 2
(art. 27-2) de la Convention.

 La Commission constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte
a ? aucun autre motif d’irrecevabilite ?.

2. Le reque ?rant se plaint en deuxie ?me lieu d’une violation de
l’article 8 (art. 8) de la Convention en raison du fait que sa vie
familiale pendant sa de ?tention a e ?te ? grie ?vement affecte ?e. En effet, le
re ?gime de de ?tention auquel il e ?tait soumis ne lui permettait de voir
sa famille, y compris ses enfants, qu’une seule fois par mois et
pendant uniquement une heure. En outre, les rencontres, me ?me celles
avec ses enfants, e ?taient rendues extre ?mement difficiles et pe ?nibles
par la pre ?sence d’une barrie ?re en verre, qui empe ?chait tout contact
physique, en particulier entre le reque ?rant et ses enfants, et en outre
par le fait que les communications orales n’e ?taient possibles que par
le biais d’un hygiaphone.

 Aux termes de l’article 8 (art. 8) de la Convention,

 "1. Toute personne a droit au respect de sa vie prive ?e et
familiale, de son domicile et de sa correspondance.

 2. Il ne peut y avoir inge ?rence d’une autorite ? publique dans
l’exercice de ce droit que pour autant que cette inge ?rence est pre ?vue
par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une socie ?te ?
de ?mocratique, est ne ?cessaire a ? la se ?curite ? nationale, a ? la su ?rete ?
publique, au bien-e ?tre e ?conomique du pays, a ? la de ?fense de l’ordre et
a ? la pre ?vention des infractions pe ?nales, a ? la protection de la sante ?
ou de la morale, ou a ? la protection des droits et liberte ?s d’autrui."

 Le Gouvernement soutient que les mesures en question e ?taient
totalement conformes aux exigences de l’article 8 (art. 8) de la
Convention. Le Gouvernement fait valoir en outre qu’a ? l’e ?poque des
faits, la jurisprudence de la Cour de cassation excluait le pouvoir des
juges d’application des peines de contro ?ler les modalite ?s d’application
concre ?tes du de ?cret du ministre de la Justice, et c’est pourquoi ce
dernier re ?ite ?ra envers le reque ?rant certaines mesures nonobstant les
de ?cisions contraires des juges d’application des peines.

 Par ailleurs, dans sa note du 12 de ?cembre 1996, annexe ?e aux
observations du Gouvernement, le pre ?sident du tribunal d’application
des peines de Florence fait valoir que l’article 41bis a e ?te ? conc ?u pour
e ?tre soustrait a ? tout contro ?le juridictionnel et a e ?te ? initialement
applique ? avec approximation.

 Le reque ?rant observe qu’apre ?s son introduction, l’article 41bis
a e ?te ? initialement applique ? avec beaucoup d’approximation quant aux
personnes devant faire l’objet de son application. Ainsi, cette mesure
lui a e ?te ? applique ?e malgre ? le fait qu’il n’avait jamais fait l’objet
de poursuites auparavant. En outre, le reque ?rant souligne lui aussi que
l’article 41bis a e ?te ? conc ?u depuis le de ?but pour e ?tre soustrait a ? tout
contro ?le judiciaire, e ?tant donne ? son but ultime de re ?pondre aux
meurtres des magistrats ci-dessus mentionne ?s. Ceci expliquerait, selon
le reque ?rant, le fait que les de ?cisions des tribunaux d’application des
peines de ?clarant l’ille ?galite ? de certaines mesures n’ont pas eu de
suite. Il en est alle ? de me ?me concernant la mesure ille ?gale de la
de ?nudation de l’e ?pouse du reque ?rant et de leurs enfants en vue des
entretiens en prison.

 La Commission rappelle d’abord que la Convention n’accorde pas
aux de ?tenus le droit de choisir le lieu de de ?tention et que la
se ?paration et l’e ?loignement du de ?tenu de sa famille constituent des
conse ?quences ine ?vitables de la de ?tention (voir par exemple n° 5229/71,
de ?c. 5.10.72, Recueil 42, p. 14, et 5712/72, de ?c. 15.7.74, Recueil 46,
p. 112). Ne ?anmoins, le fait de de ?tenir une personne dans une prison
e ?loigne ?e de sa famille a ? tel point que toute visite s’ave ?re en fait
tre ?s difficile, voire impossible, peut dans des circonstances
exceptionnelles, constituer une inge ?rence dans sa vie familiale, la
possibilite ? pour les membres de la famille de rendre visite au de ?tenu
e ?tant un facteur essentiel pour le maintien de la vie familiale (voir
n° 7819/77, de ?c. 6.5.78, D.R. 14, p. 186).

 La Commission rele ?ve ensuite qu’en l’espe ?ce, le droit du
reque ?rant de recevoir les visites des membres de sa famille n’a pas e ?te ?
totalement supprime ?, mais a fait l’objet de certaines restrictions. Ces
restrictions s’analysent, cependant, en une inge ?rence d’une autorite ?
publique dans l’exercice d’un droit garanti par le paragraphe 1 de
l’article 8 (art. 8).

 Pareille inge ?rence n’enfreint pas la Convention, si elle est
"pre ?vue par la loi", vise un ou des buts le ?gitimes au regard du
paragraphe 2 de l’article 8 (art. 8-2) et peut passer pour une mesure
"ne ?cessaire dans une socie ?te ? de ?mocratique".

 La Commission note que les mesures de se ?curite ? ont e ?te ? ordonne ?es
a ? l’encontre du reque ?rant en conformite ? avec l’article 41bis de la loi
n° 354 de 1975. La Commission conside ?re que les mesures en cause
poursuivaient des objectifs le ?gitimes sous l’angle du paragraphe 2 de
l’article 8 (art. 8) de la Convention, a ? savoir la de ?fense de l’ordre
et de la su ?rete ? publique, ainsi que la pre ?vention des infractions
pe ?nales.

 Quant a ? la ne ?cessite ? de l’inge ?rence dans le droit du reque ?rant
au respect de sa vie familiale, la Commission rappelle que pour reve ?tir
un caracte ?re ne ?cessaire "dans une socie ?te ? de ?mocratique", une inge ?rence
doit se fonder sur un besoin social impe ?rieux et notamment demeurer
proportionne ?e au but le ?gitime recherche ? (voir, en dernier lieu, Cour
eur. D.H., arre ?t C. c. Belgique du 7 aou ?t 1996, Recueil 1996-III,
fasc. 12, par. 31). La Commission rele ?ve qu’en l’espe ?ce, les
restrictions du droit de visite des membres de la famille du reque ?rant
e ?taient dicte ?es par le risque de voir utiliser les contacts personnels
du reque ?rant pour continuer a ? communiquer avec les structures du clan
mafieux auquel il e ?tait accuse ? d’appartenir. De l’avis de la
Commission, le reque ?rant n’a pas de ?montre ? que le point de vue des
autorite ?s e ?tait sans fondement ou de ?raisonnable, compte tenu de la
nature spe ?cifique du phe ?nome ?ne mafieux, ou ? les relations familiales
jouent souvent un ro ?le primordial, et du fait que le beau-fre ?re du
reque ?rant e ?tait soupc ?onne ? d’occuper une position importante au sein du
clan mafieux local dominant et a e ?te ? d’ailleurs implique ? dans le
conflit entre clans et par la suite assassine ?. Par ailleurs, ces
restrictions ont e ?te ? alle ?ge ?es par la suite.

 D’autre part, compte tenu des conside ?rations qui pre ?ce ?dent et
face aux graves exigences des enque ?tes en matie ?re de mafia mene ?es par
les autorite ?s italiennes apre ?s le meurtre de deux hauts magistrats, on
ne saurait reprocher au Gouvernement de ne s’e ?tre conforme ? aux
de ?cisions du tribunal d’application des peines de Florence pre ?voyant
la re ?vocation des restrictions en cause, e ?tant donne ? qu’apre ?s une
jurisprudence contraire de la Cour de cassation, ce n’est qu’en 1996
que la Cour constitutionnelle a e ?tabli que les de ?cisions des tribunaux
d’applications des peines en la matie ?re lient le ministe ?re de la
Justice.

 La Commission conside ?re de ?s lors que les restrictions du droit
de visite du reque ?rant ne sont pas alle ?es au-dela ? de ce qui, dans une
socie ?te ? de ?mocratique, est ne ?cessaire a ? la de ?fense de l’ordre et de la
su ?rete ? publique et a ? la pre ?vention des infractions pe ?nales, au sens de
l’article 8 par. 2 (art. 8-2) de la Convention.

 Il s’ensuit que, sur ce point, la reque ?te est manifestement mal
fonde ?e et doit e ?tre rejete ?e en application de l’article 27 par. 2
(art. 27-2) de la Convention.

3. Le reque ?rant se plaint ensuite du visa de censure auquel a e ?te ?
soumise sa correspondance avec sa famille et avec son avocat. Quant a ?
la correspondance avec son de ?fenseur, le reque ?rant alle ?gue e ?galement
une violation des droits de la de ?fense et invoque l’article 6 (art. 6)
de la Convention.

 L’article 8 (art. 8) de la Convention garantit le droit de toute
personne au respect de sa correspondance aux conditions rappele ?es au
point n° 2 ci-dessus.

 Par ailleurs, l’article 6 (art. 6) de la Convention garantit
notamment le droit de toute personne a ? ce que sa cause soit entendue
e ?quitablement et celui de tout accuse ? a ? avoir "l’assistance d’un
de ?fenseur de son choix".

 Dans une note du 31 janvier 1997, annexe ?e aux observations du
Gouvernement, le ministe ?re de la Justice italien reconnai ?t que les
de ?cisions des 21 avril 1992 et 13 aou ?t 1994, ayant soumis la
correspondance du reque ?rant a ? un visa de censure, ont e ?te ?
insuffisamment motive ?es. Le ministe ?re attribue cette carence au manque
de clarte ? du texte de l’article 18 de la loi n° 354 de 1975, qui
n’indique nullement les raisons pour lesquelles l’autorite ? judiciaire
compe ?tente peut appliquer un visa de censure. Le ministe ?re pre ?cise
d’ailleurs qu’a ? la lumie ?re des arre ?ts de la Cour europe ?enne des droits
de l’homme dans les affaires Diana c. Italie et Domenichini c. Italie
(arre ?ts du 15 novembre 1996), une re ?forme des dispositions pertinentes
est actuellement en pre ?paration. Ce projet viserait a ? pre ?ciser qu’un
visa de censure pourrait e ?tre applique ? pour des raisons de su ?rete ? et
d’ordre dans les e ?tablissements pe ?nitentiaires, et en outre que
pareille mesure pourrait faire l’objet d’un recours devant le tribunal
d’application des peines quant aux de ?tenus condamne ?s et devant le
tribunal ordinaire quant aux de ?tenus pre ?venus. Les formes actuelles de
re ?clamation seraient donc supprime ?es.

 Quant aux deux lettres provenant de l’avocat du reque ?rant, le
Gouvernement fait valoir qu’elles n’ont pu e ?tre reconnues comme telles
par le personnel pe ?nitentiaire puisqu’elles n’e ?taient pas conformes aux
prescriptions pre ?vues par l’article 35 des dispositions transitoires
du nouveau Code de proce ?dure pe ?nale.

 La Commission estime que sur ce point la reque ?te soule ?ve des
questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent e ?tre re ?solues
a ? ce stade de l’examen de la reque ?te, mais ne ?cessitent un examen au
fond. De ?s lors, cette partie de la reque ?te ne saurait e ?tre de ?clare ?e
manifestement mal fonde ?e en application de l’article 27 par. 2
(art. 27-2) de la Convention.

 La Commission constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte
a ? aucun autre motif d’irrecevabilite ?.

4. Le reque ?rant se plaint en outre de la dure ?e de sa de ?tention.

 La Commission rappelle qu’au sens du paragraphe 3 de l’article 5
(Art. 5-3) de la Convention, "toute personne arre ?te ?e ou de ?tenue, dans
les conditions pre ?vues au paragraphe 1.c (...) doit e ?tre aussito ?t
traduite devant un juge ou un autre magistrat habilite ? par la loi a ?
exercer des fonctions judiciaires et a le droit d’e ?tre juge ?e dans un
de ?lai raisonnable, ou libe ?re ?e pendant la proce ?dure (...)".

 Le Gouvernement soutient que la de ?tention du reque ?rant e ?tait
justifie ?e par les graves indices pesant sur lui et fait valoir que sa
dure ?e a e ?te ? tout a ? fait raisonnable. Le Gouvernement souligne en
particulier que le reque ?rant a e ?te ? poursuivi dans le cadre d’un proce ?s
complexe rentrant dans la cate ?gorie des soi-disant "maxi-processi". La
proce ?dure en cause a concerne ? un nombre important de coi ?nculpe ?s et
surtout, elle a porte ? sur une re ?alite ? extre ?mement complexe telle que
celle de la mafia. En effet, le phe ?nome ?ne criminel en question,
poursuit le Gouvernement, ne peut e ?tre saisi en profondeur que par une
vue d’ensemble, de sorte que plusieurs proce ?dures distinctes ne
permettraient pas d’appre ?cier le ro ?le de chacun des coi ?nculpe ?s dans le
cadre de l’organisation. Il s’ensuit, conclut le Gouvernement, que la
conduite d’une proce ?dure pareille entrai ?ne ine ?vitablement une
instruction et des de ?bats particulie ?rement complexes et d’une certaine
longueur.

 Le reque ?rant fait valoir en revanche que son arrestation se
fondait uniquement sur les de ?clarations faites par B.F., lui-me ?me
condamne ? a ? plusieurs reprises, lequel n’avait jamais fait partie du
clan auquel le reque ?rant e ?tait accuse ? d’appartenir et dont B.F. avait
de ?s lors une connaissance tre ?s approximative. Tout au long de
l’enque ?te, la de ?tention du reque ?rant est reste ?e ancre ?e exclusivement
dans ces de ?clarations, nonobstant l’absence de tout autre e ?le ?ment et
nonobstant le fait que d’autres repentis avaient de ?clare ? ne pas
connai ?tre le reque ?rant. Malgre ? ces circonstances, le parquet, lequel
du 21 avril 1992 jusqu’au 8 avril 1993 n’avait recueilli aucun autre
e ?le ?ment a ? la charge du reque ?rant, a demande ? et re ?ussi a ? obtenir la
prorogation des de ?lais maxima de de ?tention provisoire. Le reque ?rant
fait valoir qu’en re ?alite ?, il a eu la malchance, comme le reconnai ?t
implicitement le Gouvernement, d’e ?tre arre ?te ? au lendemain du meurtre
d’un haut magistrat, de son e ?pouse et des agents de son escorte : aucun
juge n’aurait a ? cette e ?poque ose ? remettre en liberte ? une personne
accuse ?e d’appartenir a ? la mafia. Dans ces circonstances, poursuit le
reque ?rant, on pouvait raisonnablement s’attendre a ? son acquittement et
la dure ?e de sa de ?tention a certainement de ?passe ? toute limite
raisonnable.

 La Commission estime que sur ce point la reque ?te soule ?ve des
questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent e ?tre re ?solues
a ? ce stade de l’examen de la reque ?te, mais ne ?cessitent un examen au
fond. De ?s lors, cette partie de la reque ?te ne saurait e ?tre de ?clare ?e
manifestement mal fonde ?e en application de l’article 27 par. 2
(art. 27-2) de la Convention.

 La Commission constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte
a ? aucun autre motif d’irrecevabilite ?.

5. Le reque ?rant alle ?gue e ?galement que nonobstant le fait d’avoir e ?te ?
acquitte ? le 12 novembre 1994, il n’a e ?te ? remis en liberte ? que le
lendemain. A cet e ?gard, il invoque l’article 5 (art. 5) de la
Convention.

 Le Gouvernement de ?fendeur explique le retard dans la mise en
liberte ? du reque ?rant par la ne ?cessite ? d’accomplir des formalite ?s
d’administration pe ?nitentiaires, telles la restitution des effets
personnels ou la de ?claration de domicile, et pre ?cise que l’e ?tat de
de ?tention du reque ?rant a cesse ? au moment du prononce ? de la de ?cision
d’acquittement et de mise en liberte ?. Il admet cependant que l’absence
de l’employe ? du bureau de la matricule ne pouvait justifier un renvoi
dans la mise en liberte ? du reque ?rant. En effet, le ministe ?re de la
Justice, dans sa note du 31 janvier 1997, annexe ?e aux observations du
Gouvernement, estime que la proce ?dure de libe ?ration du reque ?rant suivie
par la prison de Termini Imerese ne saurait e ?tre conside ?re ?e comme e ?tant
justifie ?e, puisqu’apre ?s les formalite ?s ordinaires de libe ?ration,
l’absence de l’employe ? du bureau de la matricule ne pouvait pas
retarder la mise en liberte ? du reque ?rant. Le ministe ?re pre ?cise
ne ?anmoins qu’inde ?pendamment du cas du reque ?rant, le 29 mars 1996 une
note contenant des prescriptions pre ?cises a ? cet e ?gard a e ?te ? transmise
a ? tous les directeurs de prison afin que certaines mesures, telles la
mise en liberte ? d’un de ?tenu, soient toujours garanties, me ?me pendant
la nuit.

 Le reque ?rant souligne que malgre ? le fait qu’il devait e ?tre
conside ?re ? en e ?tat de liberte ? imme ?diatement apre ?s le jugement
d’acquittement du tribunal, comme le pre ?cise le Gouvernement, il a e ?te ?
raccompagne ? en prison avec des menottes et a passe ? une nuit de plus
dans sa cellule. Selon le reque ?rant, les formalite ?s de mise en liberte ?
auraient pu e ?tre accomplies les jours suivant sa mise en liberte ?, sans
qu’il soit ne ?cessaire d’attendre en prison la pre ?sence de l’employe ? du
bureau de la matricule.

 La Commission estime que sur ce point la reque ?te soule ?ve des
questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent e ?tre re ?solues
a ? ce stade de l’examen de la reque ?te, mais ne ?cessitent un examen au
fond. De ?s lors, cette partie de la reque ?te ne saurait e ?tre de ?clare ?e
manifestement mal fonde ?e en application de l’article 27 par. 2
(art.27-2) de la Convention.

 La Commission constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte
a ? aucun autre motif d’irrecevabilite ?.

6. Le reque ?rant se plaint par ailleurs du fait que nonobstant son
acquittement, il a fait l’objet d’une se ?rie de mesures de pre ?vention.
Le reque ?rant se plaint en particulier de ce que ces mesures entravent
sa re ?insertion dans la socie ?te ? civile en limitant notamment sa liberte ?
de mouvement et en re ?duisant ses chances de trouver un travail.

 Quant a ? la mesure de l’assignation du reque ?rant a ? re ?sidence et
aux limitations a ? sa liberte ? de mouvement, la Commission rappelle que
cette mesure n’a pas entrai ?ne ? une privation de liberte ? au sens de
l’article 5 par. 1 (art. 5-1) de la Convention (voir Cour eur. D.H.,
arre ?ts Raimondo c. Italie du 22 fe ?vrier 1994, se ?rie A n° 281-A, p. 19,
par. 39, et Guzzardi c. Italie du 6 novembre 1980, se ?rie A n° 39,
p. 33, par. 92, ainsi que n° 12541/86, de ?c. 27.5.91, D.R. 70, p. 112).

 Il y a lieu donc de de ?terminer si la mesure litigieuse a porte ?
atteinte au droit du reque ?rant a ? la liberte ? de circuler, garanti par
l’article 2 du Protocole n° 4 a ? (P4-2) la Convention.

 L’article 2 du Protocole n° 4 (P4-2) a ? la Convention dispose
notamment :

 "1. Quiconque se trouve re ?gulie ?rement sur le territoire d’un
 Etat a le droit d’y circuler librement et d’y choisir librement
 sa re ?sidence.

 2. Toute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y
 compris le sien.

 3. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres
 restrictions que celles qui, pre ?vues par la loi, constituent des
 mesures ne ?cessaires, dans une socie ?te ? de ?mocratique, a ? la se ?curite ?
 nationale, a ? la su ?rete ? publique, au maintien de l’ordre public,
 a ? la pre ?vention des infractions pe ?nales, a ? la protection de la
 sante ? ou de la morale, ou a ? la protection des droits et liberte ?s
 d’autrui.

 (...)".

 Par ailleurs, quant a ? la radiation du reque ?rant des listes
e ?lectorales, la Commission rappelle que l’article 3 du Protocole n° 1
(P1-3) a ? la Convention pre ?voit que "les Hautes Parties contractantes
s’engagent a ? organiser, a ? des intervalles raisonnables, des e ?lections
libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre
expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps le ?gislatif".

 Le Gouvernement pre ?cise tout d’abord que la carte d’identite ? du
reque ?rant ne lui a jamais e ?te ? retire ?e. Par ailleurs, le Gouvernement
estime que conforme ?ment a ? la jurisprudence constante de la Commission
en la matie ?re, l’assignation a ? re ?sidence du reque ?rant et les autres
mesures de pre ?vention prises a ? son encontre sont conformes aux
exigences de l’article 2 du Protocole n° 4 a ? (P4-2) la Convention,
l’acquittement du reque ?rant n’entrai ?nant pas ipso facto la disparition
de sa dangerosite ?, compte tenu notamment de ses rapports d’affaires
avec des membres de la mafia locale ainsi que de sa proximite ? d’un chef
de clan dont il avait e ?pouse ? la soeur.

 En revanche, le Gouvernement n’a pas pris position quant la
radiation du reque ?rant des listes e ?lectorales.

 Le reque ?rant conside ?re qu’il est inadmissible qu’une personne
acquitte ?e pour n’avoir pas commis les faits, en appel conforme ?ment a ?
la demande du procureur ge ?ne ?ral en personne, puisse e ?tre soumise a ? des
mesures de pre ?vention. Le reque ?rant souligne a ? cet e ?gard que la
motivation fournie par le tribunal de Trapani est insuffisante, puisque
ce dernier se re ?fe ?re notamment aux rapports d’affaires entre le
reque ?rant et des membres importants de la mafia locale, dont il
n’indique cependant pas les noms. Selon le reque ?rant, le sacrifice de
sa liberte ? de circulation ne peut e ?tre justifie ? par la vague alle ?gation
de la ne ?cessite ? de combattre le phe ?nome ?ne mafieux, alors qu’un arre ?t
de ?finitif le conside ?re comme un citoyen honne ?te.

 Quant a ? sa radiation des listes e ?lectorales, le reque ?rant affirme
e ?tre toujours en attente d’explications et d’e ?tre re ?inse ?re ? dans ledites
listes.

 La Commission estime que sur ce point la reque ?te soule ?ve des
questions de fait et de droit complexes qui ne peuvent e ?tre re ?solues
a ? ce stade de l’examen de la reque ?te, mais ne ?cessitent un examen au
fond. De ?s lors, cette partie de la reque ?te ne saurait e ?tre de ?clare ?e
manifestement mal fonde ?e en application de l’article 27 par. 2
(art. 27-2) de la Convention.

 La Commission constate, par ailleurs, que ce grief ne se heurte
a ? aucun autre motif d’irrecevabilite ?.

7. Le reque ?rant se plaint ensuite d’une violation de l’article 6
(art. 6) de la Convention au motif qu’il a e ?te ? empe ?che ? de confe ?rer avec
ses de ?fenseurs et de pre ?parer sa de ?fense, a ? cause des conditions de
de ?tention dans la prison de Pianosa et de l’application a ? son encontre
du re ?gime spe ?cial de de ?tention pre ?vu par l’article 41bis de la loi
n° 354 de 1975.

 Les parties n’ont pas pris position a ? cet e ?gard.

 La Commission note que le reque ?rant n’a produit aucun e ?le ?ment
concret de nature a ? de ?montrer en quoi les conditions de de ?tention
auraient effectivement et concre ?tement entrave ? sa de ?fense. Elle
conside ?re de ?s lors qu’a ? supposer me ?me que le reque ?rant puisse e ?tre
conside ?re ? comme ayant la qualite ? de victime a ? cet e ?gard, ce grief n’a
en tout cas pas e ?te ? e ?taye ? et qu’il doit e ?tre rejete ? comme e ?tant
manifestement mal fonde ?, au sens de l’article 27 par. 2 (art. 27-2) de
la Convention.

8. Le reque ?rant se plaint enfin de la dure ?e de la proce ?dure, en
invoquant l’article 6 (art. 6) de la Convention.

 Les parties n’ont pas pris position a ? cet e ?gard.

 La dure ?e de la proce ?dure litigieuse, qui a de ?bute ? le 21 avril
1992, date de l’arrestation du reque ?rant (voir Cour eur. D.H., arre ?t
Wemhoff c. Allemagne du 27 juin 1968, se ?rie A n° 7, p. 26, par. 19),
et s’est termine ?e le 25 juin 1996, date du passage en force de chose
juge ?e de l’arre ?t de la cour d’appel de Palerme, est donc de quatre ans
et deux mois.

 Selon le reque ?rant, la dure ?e de la proce ?dure ne re ?pond pas a ?
l’exigence du "de ?lai raisonnable" (article 6 par. 1 (art. 6-1) de la
Convention).

 La Commission rappelle que le caracte ?re raisonnable de la dure ?e
d’une proce ?dure doit s’appre ?cier suivant les circonstances de la cause
et a ? l’aide des crite ?res suivants : la complexite ? de l’affaire, le
comportement des parties et le comportement des autorite ?s saisies de
l’affaire (voir Cour eur. D.H., arre ?t Kemmache c. France du 27 novembre
1991, se ?rie A n° 218, p. 27, par. 60).

 La Commission note qu’entre l’arrestation du reque ?rant et
l’ordonnance du tribunal de Trapani du 8 avril 1993, donnant suite a ?
la demande du ministe ?re public de proroger les de ?lais maxima de
de ?tention provisoire, aucune activite ? d’instruction d’une certaine
importance ne semble avoir e ?te ? accomplie. En outre, on sait que par la
suite le reque ?rant a e ?te ? renvoye ? en jugement, mais le Gouvernement
de ?fendeur n’a fourni aucune information pre ?cise sur le de ?roulement
concret de la suite de l’instruction et des de ?bats.

 Ces laps de temps peuvent sembler de prime abord excessifs.
Toutefois, si on les rapproche, comme il se doit, de la dure ?e totale
de la proce ?dure, ils apparaissent tole ?rables. En outre, la proce ?dure
en appel n’a dure ? qu’un peu plus d’un an.

 Partant, la Commission estime que la dure ?e globale de la
proce ?dure ne se re ?ve ?le pas suffisamment importante pour que l’on puisse
conclure a ? une apparence de violation de l’article 6 par. 1 (art. 6-1)
de la Convention.

 Il s’ensuit que ce grief du reque ?rant est manifestement mal fonde ?
et doit e ?tre rejete ? conforme ?ment a ? l’article 27 par. 2 (art. 27-2) de
la Convention.

 Par ces motifs, la Commission :

 a ? la majorite ?, DECLARE IRRECEVABLE le grief du reque ?rant
 concernant le re ?gime des visites en prison des membres de sa
 famille ;

 a ? l’unanimite ?, DECLARE IRRECEVABLES les griefs concernant le
 respect des droits de la de ?fense et la dure ?e de la proce ?dure
 pe ?nale au fond ;

 a ? l’unanimite ?, DECLARE LA REQUETE RECEVABLE pour le surplus, tous moyens de fond re ?serve ?s.

S. TRECHSEL
Pre ?sident de la Commission

 M. de SALVIA 
Secre ?taire de la Commission