4) Le maintien des liens familiaux des mineurs détenus
La famille doit jouer un rôle de tout premier plan dans la préparation à la réintégration du mineur au sein de la collectivité. Selon les règles des Nations Unies, « Tout doit être mis en œuvre pour que les mineurs aient suffisamment de contact avec le monde extérieur car ceci fait partie intégrante du droit d’être traité humainement et est indispensable pour préparer les mineurs au retour dans la société. » ; « Tout mineur doit avoir le droit de recevoir des visites régulières et fréquentes de membre de sa famille (...) dans des conditions tenant compte du besoin du mineur de parler sans témoin, d’avoir des contacts et de communiquer sans restriction avec les membres de sa famille. Tout mineur doit avoir le droit de communiquer par écrit ou par téléphone avec la personne de son choix, sauf interdiction légale (...) » Pour le CPT, « le principe directeur devrait être de promouvoir les contacts avec le monde extérieur ; toute restriction à ces contacts devrait être fondée exclusivement sur des impératifs sérieux de sécurité ou des considérations liées aux ressources disponibles. La promotion de tels contacts peut être tout particulièrement bénéfique aux mineurs privés de liberté, beaucoup d’entre eux pouvant présenter des problèmes de comportement liés à une carence affective ou à une incapacité à vivre en société. (...) les contacts d’un mineur avec le monde extérieur ne devraient jamais être réduits, ni supprimés, à titre de sanction disciplinaire ». [1]
Alors que l’incarcération fragilise considérablement la vie familiale des mineurs, les efforts accomplis pour limiter les risques de rupture sont très souvent réduits au minimum. Pour Alain Vogelweith, magistrat, ancien conseiller auprès du Défenseur des Enfants, « l’emprisonnement venant souvent en bout de chaîne, on tend à considérer que la prison vient signifier l’échec de l’éducatif, et on a tendance à ne rien faire. Notamment, presque aucun travail avec la famille n’est assuré, alors que l’incarcération de l’enfant influe fortement sur leur relation. » [2]. Pourtant, l’isolement du mineur du reste de sa famille peut aboutir à lui faire perdre davantage ses repères. Force est de constater que les moyens humains des services pénitentiaires d’insertion et de probation sont dérisoires au regard des nécessités, un agent suivant en moyenne plus d’une centaine de personnes.
De nombreuses familles rencontrent les plus grandes difficultés pour assurer des visites régulières à leurs enfants, du fait de l’éloignement et de la faiblesse de leurs ressources financières. D’autres peuvent ressentir comme une honte rejaillissant sur tous, le fait qu’un des membres soit écroué. D’une manière générale, la séparation est accentuée par la grande difficulté qu’éprouvent la plupart de ces jeunes à s’exprimer par écrit, ce qui empêche ou limite considérablement les correspondances.
Dans ces conditions, il apparaît nécessaire qu’un dialogue s’instaure entre les services pénitentiaires et les familles et qu’une information complète soit donnée à ces dernières concernant la situation de leur enfant. Les éducateurs de la PJJ, ou les SPIP lorsqu’ils sont encore en fonction, doivent veiller à ce que le contact soit maintenu entre enfants et parents. Une aide financière devrait également être apportée pour les familles dont la situation économique ne permet pas la prise en charge des visites. La possibilité de téléphoner à leurs parents devrait être reconnue aux mineurs détenus, le cas échéant sur autorisation du magistrat saisi du dossier.
Un autre problème réside dans le fait que bien souvent la famille n’est pas du tout associée à la préparation de la sortie de prison. Un véritable projet devrait être mis en place avec la famille en coordination avec l’équipe d’éducateurs de la PJJ présente en prison et l’école.
D’autre part, les mineurs peuvent faire l’objet de mesures durant leur détention qui accentuent encore la séparation avec leur famille. C’est ainsi que la punition de mise en cellule disciplinaire emporte pour toute sa durée, la privation des visites. Tous les mineurs peuvent faire également l’objet d’une sanction de suppression de l’accès au parloir sans dispositif de séparation, pour une durée maximum de quatre mois lorsqu’une faute a été commise au cours ou à l’occasion d’une visite (mesure communément appelée « parloir hygiaphone »).
Proposition 6
La CNCDH demande que soient améliorées les conditions matérielles de visites. Elle recommande une hausse sensible des effectifs des SPIP et préconise qu’une information continue des familles soit organisée concernant la situation de leur enfant en prison. Elle estime qu’une aide financière devrait être allouée à celles qui éprouvent des difficultés pour se rendre au parloir. D’autre part, le système des autorisations de sortie sous escorte d’éducateurs devrait être développé pour assurer le maintien des liens familiaux des prévenus mineurs. Les possibilités de permissions de sortir devraient être étendues.