Publié le mardi 26 avril 2005 | http://prison.rezo.net/2-l-organisation-de-l/ 1. L’organisation de l’administration pénitentiaire aujourd’hui en France 1.1 L’administration pénitentiaire, une administration complexe L’administration pénitentiaire française est un ensemble complexe qui met en relation plusieurs ministères et d’autres institutions. Chacun des acteurs a des pouvoirs et des missions à exercer en vue d’un seul et même objectif : préparer la réinsertion des détenus et leur resocialisation grâce à la culture. Des textes de lois et des protocoles ont été constitués pour régir ces interactions mais ils sont parfois bien loin d’être appliqués et/ou applicables. Ainsi, les détenus sont « victimes » des dysfonctionnements organisationnels entre toutes ces institutions et ne bénéficient pas de ce dont ils sont en droit de réclamer. 1.1.1 L’administration centrale L’administration pénitentiaire est l’une des cinq directions du ministère de la justice, placée sous l’autorité du garde des sceaux et dirigée par un directeur. Elle est composée d’une administration centrale, de services déconcentrés (directions régionales, établissements pénitentiaires, Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation) (annexe), et d’un établissement public chargé de la formation de tout le personnel pénitentiaire, l’Ecole Nationale d’Administration Pénitentiaire (ENAP) basée à Agen dans le Lot et Garonne (47). 1.1.2 Les services déconcentrés L’administration pénitentiaire répond à une organisation compliquée qui se décline selon quatre territoires : national, régional, départemental et local. Cette structuration permet une répartition des responsabilités et des missions de chacun des agents mais posent aussi des problèmes de coordination des actions. 1.1.3 Les établissements pénitentiaires Après avoir étudié les services déconcentrés, il convient de s’intéresser aux établissements pénitentiaires, lesquels sont implantés sur tout le territoire national. Ils sont dirigés par un chef d’établissement, qui au niveau local, applique les décisions prises par le Ministère de la Justice, par les directions régionales et départementales de l’administration pénitentiaire. Son rôle est de veiller à ce que son établissement répondent aux normes de sécurité et qu’il soit en accord avec les directives nationales. Il dirige les chefs de détention et le personnel pénitentiaire. Afin d’en étudier une plus en détails, nous axerons notre étude sur les centres de détention. Ce sont des établissements pour peine, principalement orientés vers la resocialisation des condamnés, pour lesquels la réinsertion sociale semble favorable. 1.2 Le personnel des centres de détention En ce qui concerne le personnel de l’administration pénitentiaire, il regroupe les fonctionnaires de l’Etat, placés par décret sous statut spécial [2]. Sont concernés le personnel administratif, technique et directionnel ainsi que le personnel d’insertion et de probation et le personnel couvrant les missions sécuritaires. Les autres fonctionnaires tels que le personnel médical ou enseignant dépendent des Ministères de la Santé ou de l’Education et la Communication. 1.2.1 Les Services Pénitentiaire d’Insertion et de Probation Ces services, plus communément appelés SPIP ont été crées en 1994, par le Ministère de la Justice. Ce sont les services déconcentrés de l’administration pénitentiaire au niveau régional qui permettent aux établissements de mettre en œuvre l’objectif de réinsertion qui leur a été assigné. Ils regroupent tout le personnel du service social en milieu pénitentiaire. Le directeur du service, placé sous l’autorité du directeur régional du service d’insertion et probation, est responsable du fonctionnement du service au niveau départemental, du travail d’animation du personnel de l’insertion et la probation, des assistants des services sociaux et des personnels administratifs. Expliquer le fonctionnement de l’administration pénitentiaire est un exercice fastidieux. L’organisation territoriale et la répartition des responsabilités en terme d’application des peines est complexe, tant au niveau des établissements que de leur personnel. Cependant, une telle structuration permet une meilleure prise en compte des personnes placées sous main de justice par les collectivités locales d’action sociale qui peuvent plus facilement intervenir grâce à cette proximité. 1.2.2 Le paradoxe de l’existence des Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation en milieu carcéral Les objectifs de l’administration pénitentiaire dans leur ensemble sont en contradiction avec le but essentiel des établissements pour peines. On assiste à une opposition fondamentale entre enfermement et démocratie. Les travailleurs sociaux sont les premières victimes de cette contradiction puisque c’est à eux de préparer la réinsertion sociale. Ils sont confrontés à un problème de moyens. En effet, le Ministère de la Justice accorde un budget plus conséquent pour le réaménagement des établissements en terme de capacité d’accueil et de renforcement sécuritaire intra-muros afin de répondre à une demande sociale de sécurité de plus en plus forte, plutôt qu’à l’organisation de manifestations culturelles ou artistiques. Malgré les difficultés de gestion et de financement, des collaborations interministérielles sont mises en place pour faire vivre la culture en prison. Les rencontres et les colloques aboutissent à des protocoles et des circulaires qui définissent les objectifs de chacun des acteurs et leur mode d’intervention. 1.3 Les collaborations interministérielles Afin de faire de la prison un lieu socialisant, l’administration pénitentiaire et les ministères ont pris conscience de la nécessité de s’associer afin de créer des conditions de détention plus humaines. Cette collaboration passe par la signature de protocoles d’accord ou par l’édition de circulaires qui définissent les moyens statutaires et financiers pour introduire la culture en prison. Même si l’administration pénitentiaire a mené une "révolution culturelle" en déléguant quelques unes de ses fonctions à des personnels qui n’appartiennent pas au champ judiciaire, les actions sont parfois difficiles à mettre en œuvre. La prison et la société civile semblent étrangère l’une à l’autre, chacune avec son organisation et son fonctionnement. 1.3.1 Le protocole d’accord du 25 janvier 1986 Les Ministères de la Justice et de la Culture veulent mener une politique commune afin de mettre en place des actions culturelles au sein des établissements pénitentiaires. Le texte qui ratifie cette entente est le protocole d’accord entre le Ministère de la Justice et celui de la Culture, signé le 25 janvier 1986. Le texte permet d’accorder les actions en fonction des buts de chacun. D’un côté, le Ministère de la Justice veut renforcer son dispositif d’accès à la culture en proposant aux détenus différentes formes de pratiques culturelles ; de l’autre, le Ministère de la Culture veut faire prendre conscience que le public carcéral à des besoins culturels et qu’il faut se donner les moyens d’y répondre. Afin de concilier les demandes, quatre objectifs ont été fixés : 1.3.2 Le droit à l’enseignement Les établissements pour peine doivent respecter les droits fondamentaux des personnes placées sous main de justice. Ainsi, l’accès à l’enseignement doit s’appliquer au sein des centres pour peines. L’éducation primaire est faite dans tous les centres par des enseignants, fonctionnaires rattachés au Ministère de l’Education et de la Communication, qui n’ont pas de statuts particuliers consécutifs à leur intervention en détention. Les enseignements secondaires et supérieurs sont assurés dans des Unités Pédagogiques Régionales (UPR), présente dans chaque région pénitentiaire. Ces unités regroupent les différents niveaux d’enseignement et ressources de formation initiale fournies par le Ministère de l’Education et de la Communication pour l’enseignement aux personnes détenues. La circulaire du 29 mars 2002 [4] réorganise les conditions d’intervention de l’éducation nationale dans les établissements pénitentiaires et redéfinit les modalités de partenariat des deux ministères. 1.3.3 La place du sport en milieu carcéral Tout comme avec le Ministère de l’Education et de la Communication, des accords interministériels sont passés avec le Ministère de la Jeunesse et des Sports. Les activités physiques et sportives sont considérées comme des outils de réinsertion, c’est pour cela que les établissements pénitentiaires doivent être équipés en matériels sportifs afin de répondre aux demandes des détenus. Des professeurs vacataires rattachés au Ministère de la Jeunesse et des Sports interviennent dans les centres pour mettre en œuvre les activités. Ainsi, l’administration pénitentiaire, et plus précisément les centres de détention sont au centre d’un processus de collaborations interministérielles. Les acteurs ont des missions distinctes, interviennent de manière différente mais restent rattachés au même objectif, celui d’arriver à concilier le milieu pénitentiaire et l’accès à la culture, en vue d’une réinsertion sociale. [1] Article 1 de la loi n°87-482 du 22 juin 1987 extraite du code pénal français, relative au service public pénitentiaire [2] Article D196 du code de procédure pénale, décret n°2001-730 du 30 juillet 2001 [3] Article D216 à 218 du code de procédure pénale, décret n°93-1113 du 21 septembre 1993 [4] Bulletin Officiel de l’Education Nationale n°18 du 2 mai 2002 |