Publié le vendredi 20 juillet 2007 | http://prison.rezo.net/1991-alerte-au-suicide-dans-les/ Alerte au suicide dans les prisons [1] Le nombre de suicides de détenus a nettement augmenté en 1991. Au 1er septembre, 51 personnes s’étaient volontairement données la mort en prison, alors qu’on n’en comptait que 37 à la même date en 1990. L’alerte a amené la direction de l’administration pénitentiaire à se livrer à une enquête sur les suicides en prison et leur prévention. Dans une circulaire datée du 12 novembre et adressée à tous les directeurs de prison, elle détaille par le menu les chiffres, et définit les moments particulièrement fragiles. Certains jours y sont particulièrement propices. Le samedi, la nuit du samedi au dimanche précisément, enregistre à elle seule le quart des suicides de l’année. Si on fait le total du week-end, samedi-dimanche, jours sans activités, on arrive à 33%. La nuit est bien sûr le moment privilégié de l’angoisse. Restent les 23 suicides qui ont lieu de jour, entre les rondes, les promenades, les repas, pour prouver si besoin était combien l’acte suicidaire en prison peut être rapide. 80% des suicides ont lieu en cellule. Que le détenu y soit seul (19 cas) ou à plusieurs (27 cas). L’enquête ne relève pas l’écart entre ces deux chiffres. La proportion de détenus seuls qui se suicident semble pourtant forte compte tenu de la population pénale qu’ils représentent. Les suicidés sont majoritairement des prévenus (70%), alors que les prévenus ne représen -tent que 40% de la population pénale. Non seulement les « suicidaires » sont nettement plus nombreux parmi les prévenus, mais ils se « ratent » moins. Le nombre de suicides « réussis » rapportés à celui des « tentatives » est supérieur parmi les prévenus. L’année 1991 a été mauvaise sous cet aspect-là aussi. 16% des 269 ten-tatives de suicides ont abouti à un suicide effectif. Alors qu’en 1990, la proportion des suicides « réussis » avait été de 13,5%. En prison on se suicide par pendaison. Massivement. 52 des 59 suicidés de 1990 avaient trouvé un drap et des barreaux pour se pendre ou s’étrangler. Et 229 avaient essayé. Alors que sur les 62 détenus qui ont économisé soir après soir les barbituriques distribués à l’unité par l’administration, aucun n’est mort. L’automutilation, les fourchettes avalées et autres « appels au secours » n’aboutissent que rarement à la mort, mais chaque année en compte tout de même. Enfin, contrairement à la vie civile, les femmes se suicident plus que les hommes. Et les jeunes plutôt moins que les hommes d’âge mûr. C’est entre 30 et 40 ans que le nombre de suicides est le plus élevé en prison. Catherine Erhel Source : Quasimodo - n° 2 (« Corps incarcérés »), janvier 1997, Montpellier, p. 26-27. [1] article publié dans Libération du 27 décembre 1991
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