Dépôt au TA Rouen 27/01/2006
RAPPORT D’EXPERTISE
Objet :
Dossier 0502488 et 0502449
ordonnance du 24/11/2005
Rapport rédigé en vue de répondre à la nouvelle ordonnance
Donner leur avis sur le ooint de savoir si les installations de la maison d’arrêt de Rouen répondent aux normes d’hygiène et de sécurité en vigueur, notamment par rapport aux normes en matière d’aération, de cubage d’air disponible.
Afin de répondre à la question chacun dans son domaine de spécialité posée par le tribunal, les experts ont traité le sujet :
. M.D : AERATION
. Mme N : HYGIENE
AERATION
En application du code de la santé publique (article L j311-1) il apparaît que le règlement sanitaire départemental de Seine Maritime est la norme de référence en matière de salubrité de "tous les milieux de vie de l’homme" outre les habitâtions.
Le règlement ci-joint traite dans son titre III les dispositions applicables aux bâtiments autre que ceux qui sont à usage d’hâbitations et assimilés.
L’aticle 62 précise le tvpe de locaux visés :
"Les presciptions du présent règlement, traitant des habitations, sont étendues à toutes catégories d’immeubles ou d’établissements ainsi qu’à leurs dépendances quand ils reçoivent en tout ou partie les mêmes équipements que les immeubles d’habitation et sont justiciables pour raisons de salubrité des mémes règles d’établissement, d’entretien ou d’usage.
Section 2 : ventilation des locaux
Les dispositions de cette section s’appliquent aux constructions neuves et aux constructions subissant des modifications importantes affectant le gros oeuvre ou l’économie de l’immeuble.
Seules les presciptions relatives à l’entretien des installations de ventilation
s’appliquent aux constructions existantes à moins que ne soit démontré la nécessité de prendre des mesures assurant la salubité publique...."
Les cellules de la maison d’arrêt n’ont pas fait l’objet de modifications importantes affectant le gros oeuvre ou l’économie de l’immeuble.
Seuls ont fait l’objet de modifications importantes les douches collectives et la cuisine collective.
Nous laissons à l’appréciation du tribunal s’il y a lieu d’interpréter le texte par secteur de bâtiment ou dans son ensemble.
Si les travaux sont considérés sur l’ensemble de la maison d’arrêt, il nous apparaît que les travaux ont subi quelques modifications importantes du moins dans leurs parties communes.
Dans l’hypothèse où le règlement départemental serait applicable au regard de modifications importantes
Les règles de ventilation qui pourraient s’appliquer relèveraient :
- Soit de l’article 64 "Ventilation mécanique ou naturelle par conduit".
- Soit de l’article 66 "Ventilation par ouvrants extérieurs".
Nous prendrons en considération l’article 66 ayant constaté que la cellule est munie d’un ouvrant extérieur et que l’article 64 ne s’applique pas. Les cellules n’étant pas pourvues de ventilations mécaniques contrôlées.
La cellule par elle-même pourrait être considérée comme un local à pollution non spécifique. Néanmoins, la cuvette d’aisance intégrée à la cellule rend la définition du local plus délicate.
Le règlement sanitaire considérant le cabinet d’aisance comme un local à pollution spécifique.
Notre consoeur traite ce problème au point de vue de l’hygiène dans le chapitre suivant "HYGIENE’,
Dans l’hypothèse d’un local à pollution non spécifique, le volume minimum d’air par occupant requis est de 8 m² pour les locaux sans interdiction de fumer.
Les cellules offrant une moyenne de 45 m3 et étant occupées par un maximum de 3 personnes, le cubage d’air est suffisant (24 m3 minimum).
Pour les locaux à pollution spécifique, la ventilation par portes ou fenêtres est possible si le volume du local est au moins égale à 5 mé par occupant potentiel.
Le volume de la pièce à cet égard est suffisant, mais nous l’avons vu, la présence dans la cellule de la cuvette sanitaire relève plus d’un problème d’hygiène générale (odeurs, transmissions de germes, etc...), que d’un cubage d’air disponible. Pour rappel : le règlement sanitaire départemental spécifie qu’une entrée d’air est nécessaire pour le cabinet d’aisance.
LA SURFACE DES OUVRANTS
Toujours dans le cadre de l’hypothèse où il serait considéré que la maison d’anêt a subi des modifications importanles, l’article 66.3 du règlement départemental s’appliquerait.
La surface de l’ouvrant est régie par une formule : s= S / 8tog10S
s : Surface ouvrant - S : Surface local
La surface moyenne d’une cellule est de 12 m² et la surface de l’ouvrant est de 0,435 m².
Le tableau indique que pour 10 m², il faut un surface d’ouvrant de 1,25 m2.
Sur ces bases, les surfaces des ouvrants sonl inférieure d’au moins 200 0/o aux valeurs recommandées.
Conclusions
En matière d’aération, il peut être considéré que les cellules de la maison d’arrêt disposent d’un cubage d’air disponible suffisant et que le cabinet d’aisance ne dispose pas d’une entrée d’air frais par gaine spécifique.
S’il est considéré que la maison d’arrêt a subi des modifications importantes, la surface des ouvrants est insuffisante au regard du respect du règlement sanitaire départemental.
Concernant l’hygiène, le Docteur N s’exprime dans le chapitre ci-après.
HYGIENE
Je soussignée, Docteur M. N, médecin hygiéniste, déclare completer et commenter les constatations faites lors de ma visite à la maison d’arrêt de Rouen, le 2/11105 et ce sur requête de Mr le Juge des référés
Rappel du texte de référence, le Code de la Santé publique, qui reprend tes termes du Règlement Sanitaire Départemental :
"L’article L 1311-l du Code de la Santé Publique (loi N° 2004-806 du 9 août 2001 art54 1 Journal officiel du ll août 2004) institue le principe des Règlements sanitaires départementaux, pris par arrêté préfectoral, permettant de compléter les dispositions du Code notamment en matière de salubrité des habitations et de tous les milieux de vie de l’homme et de prévention des maladies transmissibles.
Article 40-l : les pièces de service (cabinet d’aisance, cuisine) doivent être munies d’une amenée d’air frais soit par gaine spécifique soit par l’intermédiaire d,une pièce munie d’un prise d’air extérieur.
Article 45 : Le cabinet d’aisance ne doit pas communiquer avec la pièce à usage de cuisine et les pièces où se prennent les repas. Les cabinets non conformes à ces obligations doivent être transformés dans un délai de trois ans .Il est interdit d’utiliser des appareils brûlants même sans flamme un combustible solide ou liquide dans un cabinet d’aisance ou tout autre local ayant les deux destinations (salle de baihs, cabinet d’aisance)
Article 46 : la cuvette des cabinets d’aisance doit être obligatoirement munie d’un dispositif d’occlusion. De l’eair doit être disponible en permanence pour le nettoyage des cuvettes
Article 53 : les installations d’appareils utilisant des combustibles solides ou liquides doivent être raccordées à un conduit d’évacuation des gaz de combustion.
Article 53-4 : la ventilation des locaux où sont installés des appareils utilisant le gaz ou les hydrocarbures liquéfiés, doit répondre aux règles d’aménagement et de sécurité applicables à l’utilisation de ces combustibles"
Lors de ma visite à la maison d’arrêt le 2/11/05 j’ai pu constater qu’aucune de ces obliqations léqales n’était respectée.
Les cabinets d’aisance sont :
- situés sans cloisonnement ni aération spécifique dans la pièce principale
- non munis d’occlusion de la cuvette
- à proximité immédiate du coin de préparation des repas
- à proximité d’appareils chauffants à combustible, appareils qui ne sont raccordés à aucune ventilation pour élimination des gaz toxiques.
- Les ustensiles pour la préparation des repas côtoient les latrines.
Ces obligations légales non satistaites sont des recommandations d’hygiène de base qui s’appliquent à toutes les formes possibles d’habitation individuelle mais aussi collectives.
Dans ces conditions, le risque de transmission interhumaine de germes pathogènes d’origine fécale (virus de l’hépatite C, B, salmonelles, virus des diarrhées épidémiques) à partir des latrines est majeur. Dans une telle promiscuité (trois personnes pour 10 à 12 m²) le risque de transmission de pathogènes bronchopulmonaires par transmission aérienne (grippe,
tuberculose, méningites à méningocoque) est également très important.
Ce risque est d’autant plus important que, en hiver, l’aération des locaux par ouverture de la fenêtre n’est pas toujours possible à cause du froid. On ne peut donc pas garantir que le renouvellement d’air est convenable en toute circonstance. ll est donc à craindre que des épidémies ne se développent dans de telles conditions.
L’utilisation d’appareils chauffants non contrôlés, non munis d’évacualion des gaz, expose au risque d’intoxication au monoxyde de carbone et au risque d’incendie
Le règlement sanitaire départemental s’applique bel et bien non seulement aux habitations individuelles mais aussi à tous les milieux de vie de l’homme. Le risque de contracter une infection digestive ou pulmonaire, à partir d’un sujet malade est donc bien majoré dans les conditions actuelles de déteniton à la maison d’arrêt de Rouen comparativement à la vie civile.
L’absence de séparation entre cabinet d’aisance et la pièce à vivre constitue un manquement grâve au Code de Santé Publique et au règlement sanitaire départemental.
Ces différentes infractions au code de santé publique observées dans les cellules des prévenus contrastent avec le bon niveau d’hygiène des parties communes (douches, ateliers, cuisines).
On peut s’interroger sur cette évidente différence d’application des mesures d’hygiène de base.
Le présent rapport est déposé en 5 exemplaires au Tribunal Administratif de ROUEN.
Fait à Evreux, Ie 24 janvier 2006
Didier D Expert
Michelle N Médecin hygiéniste.