Les faits :
Le requérant est un addict à l’héroïne depuis 1973. Souhaitant se défaire de sa dépendance, il a pris un traitement de substitution, sous la supervision d’un médecin de 1991 à 2008, année de son placement en détention provisoire où le traitement fut stoppé contre son gré.
En juin 2009, il fut condamné à une peine de six ans d’emprisonnement pour trafic de stupéfiants, avec obligation de suivre une cure de désintoxication au bout de six mois de détention. Ainsi, en décembre 2009, il fut transféré dans un centre de désintoxication où sa dépendance fut traitée par une thérapie fondée sur l’abstinence, sans qu’aucun traitement de substitution ne lui soit administré.
En avril 2010, il fut à nouveau transféré en prison, ce qu’il contesta mais son recours fut rejeté aux motifs “que l’on ne pouvait pas escompter avec une probabilité suffisante qu’il serait possible de le guérir de sa dépendance aux stupéfiants ou de l’empêcher pour longtemps de retomber dans la toxicomanie.”
En juin 2011, le requérant demanda à ce que sa dépendance soit soignée par un traitement de substitution afin de soulager ses douleurs chroniques. Les autorités pénitentiaires lui opposèrent un refus, arguant « qu’un traitement de substitution n’était ni nécessaire aux fins de la loi pénitentiaire bavaroise, ni adapté à sa désintoxication. » et qu’après trois ans d’emprisonnement, ils ne manifestaient plus de symptômes de sevrage.
Le requérant contesta cette décision aux motifs que l’administration pénitentiaire n’avait pas regardé si le traitement de substitution était nécessaire ou non dans son cas.
Ses recours furent rejetés par les voies internes.
A sa mise en liberté en décembre 2014, il fut examiné par un médecin qui lui prescrivit un traitement de substitution.
Devant la Cour EDH :
Invoquant l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, le requérant voyait un traitement inhumain dans le refus de lui délivrer un traitement de substitution pendant son séjour en prison, qui lui aurait valu des douleurs considérables et une détérioration de son état de santé, ainsi que dans le refus par les autorités pénitentiaires de solliciter un médecin expert extérieur pour déterminer la nécessité d’une thérapie de substitution.
La Cour, a tout d’abord relevé que les autorités allemandes elles-mêmes avaient indiqué, au moment de son transfert du centre de cure vers la prison, qu’il apparaissait peu probable de pouvoir un jour soigner l’addiction du requérant, ce dernier ayant été sous traitement de substitution pendant 17 ans avant d’être incarcéré.
Elle a par ailleurs ajouté que sur les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe, 41 avaient mis en place des traitements de substitution aux opioïdes dont 30 le mettaient en place pour les personnes détenues, ce qui était le cas de l’Allemagne.
Enfin, elle a expliqué que le fait que le traitement de substitution soit remis une fois hors de prison, indiquait bien qu’il s’agissait pour lui du traitement adapté.
La Cour s’est dit convaincue convaincue “qu’en principe, l’épreuve physique et mentale que [le requérant] a traversée du fait de son état de santé peut à elle seule satisfaire aux critères de l’article 3.”
Estimant que les autorités n’avaient pas chercher à déterminer, en q’appuyant sur les conseils d’un médecin expert indépendant, si une telle thérapie pouvait être adaptée au cas du requérant, la Cour juge qu’il y a bien eu violation de l’article 3.