Un jeune homme avait été écroué le 19 octobre 1996, placé en détention provisoire au quartier mineur de la Maison d’Arrêt d’Angoulême et condamné le 05 novembre 1996 à une peine de cinq mois d’emprisonnement. Le soir même de sa condamnation, le jeune mis fin à ses jours dans sa cellule.
Son père estimait que l’administration pénitentiaire avait commis une faute de nature à engager la responsabilité de l’État. D’une part, il arguait que la fragilité psychologique de son fils avait été repérée durant sa détention provisoire ce qui avait conduit l’établissement à le placer dans un milieu collectif, sauf le soir de son suicide où l’administration l’a placé dans une cellule individuelle. D’autre part, il était fait état de ce que les rondes normalement prévues par les surveillants pénitentiaires n’avaient ce soir-là pas eu lieu.
Le Tribunal Administratif (TA) de Poitiers, puis la Cour Administrative d’appel (CAA) ont tour à tour rejeté la requête de la famille, la CAA expliquant que de son point de vue « seule une faute est de nature à engager la responsabilité de l’État du fait des services pénitentiaires à raison des suicides des détenus ; que, par suite, [le requérant] n’est pas fondé à soutenir que le suicide d’un détenu mineur en prison devrait entraîner une présomption de défaut de surveillance qui engagerait la responsabilité sans faute de l’administration. » La CAA avait par la suite considéré que l’absence de rondes postérieurement au suicide n’aurait rien changé et devait donc être regardée comme sans lien de causalité avec le décès du jeune.
Le Conseil d’État, en revanche, est venu annuler les décisions du TA et de la CAA expliquant que si les rondes postérieures n’auraient en effet rien changé, une ronde devait avoir lieu entre 23h30 et minuit soit aux alentours de l’heure du décès et qu’en ne retenant pas cela comme une faute de l’administration de nature à engager sa responsabilité, la CAA a commis une erreur de qualification juridique des faits. Réglant l’affaire au fond et retenant au surplus qu’aucun accompagnement particulier n’avait eu lieu en dépit de l’état psychologique du jeune, le Conseil d’État a jugé que les défauts de vigilance constatés étaient constitutifs d’une faute de l’administration pénitentiaire de nature à engager la responsabilité de l’État